Constats alarmants du département d’État américain. Dans le chapitre qu’il consacre à Maurice dans son rapport de 2022 sur les Droits de l’Homme publié mardi, il constate que des « problèmes importants liés aux droits de l’homme comprenaient des rapports crédibles sur des traitements cruels, inhumains et dégradants par le gouvernement, arrestations arbitraires, interférence arbitraire ou illégale dans la vie privée, de sérieuses restrictions à la liberté d’expression et aux médias, y compris la censure, une grave corruption gouvernementale, le manque d’enquête et de responsabilité pour la violence sexiste, et les crimes impliquant de la violence ou des menaces de violence ciblant des membres de groupes raciaux ou ethniques minoritaires ».
Dans l’Executive Summary de son rapport, le département d’État dit constater que le gouvernement n’a pas toujours pris de mesures pour poursuivre et punir les fonctionnaires ayant commis des abus ou s’étant livrés à la corruption, tant dans les services de sécurité qu’au sein du gouvernement. « L’application des poursuites et des peines était incohérente et parfois politiquement influencée, ce qui se traduisait par l’impunité. »
Au chapitre consacré à l’« intégrité de la personne », le document note que « contrairement à l’année précédente, aucun rapport n’a signalé que le gouvernement ou ses agents aient commis des exécutions arbitraires ou illégales ». Par contre, il précise que le 26 janvier 2020, le Bureau du directeur des poursuites pénales a demandé à la police de rouvrir une enquête sur le meurtre, en 2020, de Soopramanien Kistnen après avoir reçu un rapport d’enquête judiciaire réfutant les affirmations de la police selon lesquelles il s’était suicidé. « Kistnen aurait été sur le point de révéler des informations impliquant un ancien ministre dans un stratagème frauduleux de passation de marchés impliquant des fournitures de COVID-19. Il n’y avait pas d’autres développements à la fin de l’année. »
L’impunité des policiers dénoncée
Au chapitre « Torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, et autres abus connexes », le département d’État dit que bien que la Constitution et la loi interdisent de telles pratiques, il y a eu des allégations d’abus de la police. Il cite les vidéos dans lesquelles on pouvait voir des agents de la Criminal Investigation Division de Terre-Rouge agresser sexuellement un détenu avec une matraque et maltraiter des détenus dans deux autres vidéos. Trois policiers ont été arrêtés et libérés sous caution. Sept autres ont été transférés dans d’autres unités.
Le département d’État ajoute que l’impunité est un problème important pour la police et les enquêtes impliquant des agents se poursuivent souvent des années durant. Or, il note que des actions disciplinaires contre les agents fautifs ont eu lieu et que les licenciements ou les poursuites ont, eux, été rares. « (…) l’ingérence politique et une culture d’impunité au sein de la police ont contribué à faire de l’impunité un problème. »
La loi prévoit des sanctions pénales pour les fonctionnaires ripoux mais, selon le département d’État, le gouvernement n’a pas appliqué la loi de manière efficace et ils se sont parfois livrés à des pratiques de corruption en toute impunité. « Des cas isolés de corruption gouvernementale ont été signalés au cours de l’année », note-t-il.
Liberté d’expression pas très libre
Il revient aussi sur la plainte, déposée à la police le 10 novembre, par trois journalistes du Défi Media Group, Nawaz Noorbux, Jean-Luc Emile et Al-Khizr Ramdin, et le directeur général de la station de radio Top FM, Balkrishna Kaunhye. C’était suite à du harcèlement en ligne par des groupes qui seraient proches du parti au pouvoir ayant publié des documents insinuant que les journalistes étaient impliqués dans le trafic de drogue. « À la fin de l’année, il n’y a eu aucune arrestation ni identification des individus derrière ces publications. De nombreuses informations ont fait état de parents de journalistes victimes de transferts punitifs en représailles aux critiques des journalistes à l’égard du gouvernement. »
Bissessur et Laurette
Le département d’État trouve certaines arrestations arbitraires. Il parle de celle de l’avocat Akil Bissessur et sa compagne Doomila Moheeputh pour trafic de drogue. « Bissessur faisait partie d’un groupe d’avocats qui dénonçaient le gouvernement. Il a été libéré sous caution le 6 septembre après la diffusion d’une séquence vidéo montrant des policiers entrant dans la maison de son partenaire avec le sac présumé incriminant contenant de la drogue. Les résultats des tests médico-légaux ultérieurs ont révélé l’absence d’ADN de Bissessur ou de Moheeputh sur l’emballage de la drogue. »
Il revient aussi sur l’arrestation de Bruneau Laurette et de son fils Ryan Luca Laurette. « Laurette était une critique bien connue de la gestion par le gouvernement d’une marée noire en 2020 et d’autres scandales, ainsi que des cas d’abus de la police. Les résultats préliminaires du laboratoire ont révélé que le colis trouvé dans la maison de Laurette contenait des graines de chia et non des stupéfiants comme l’avait affirmé la police. », précise le rapport.
Notre service WhatsApp. Vous êtes témoins d`un événement d`actualité ou d`une scène insolite? Envoyez-nous vos photos ou vidéos sur le 5 259 82 00 !