Quel est le véritable poids des partis politiques extraparlementaires ? Parviendront-ils finalement à influencer le paysage politique lors des prochaines élections ? Le sondage récemment publié par L’Express, qui révèle un niveau très bas d’intentions de vote en leur faveur, illustre les difficultés de cette force politique à convaincre l’électorat.
Faut-il accorder du crédit aux incessants appels en faveur d’un renouveau politique émanant d’une grande partie de l’opinion publique ? Bien que l’engouement pour de nouvelles formations politiques et de nouveaux leaders soit manifeste, un sondage récent commandé par le journal L’Express suggère que les partis extraparlementaires, supposés être les porte-étendards de ce renouveau politique, rencontrent des difficultés à s’imposer.
Le sondage révèle en effet que ces partis émergents ne parviennent à obtenir qu’une part marginale de soutien, ne dépassant pas les 3 % dans les intentions de vote. Pourtant, ces formations politiques sont régulièrement saluées dans l’opinion publique pour leurs prises de position sans concession sur divers sujets d’intérêt national. De plus, elles affichent une présence constante sur le terrain, se démarquant ainsi des partis intraparlementaires que le public reproche de pratiquer une politique classique dépassée, ne correspondant pas au monde moderne.
Un exemple de cette situation paradoxale est illustré par le leader du Reform Party, dont les vidéos sur les réseaux sociaux ont suscité un vif intérêt. Il a eu l’occasion de fournir des explications détaillées sur des sujets tels que la contribution sociale généralisée et ses enjeux, ainsi que sur les prix des carburants. Ces vidéos ont recueilli de nombreux « j’aime » sur Facebook, démontrant que le public réagit favorablement à ses discours argumentés.
Malgré ces signes d’ouverture envers les nouvelles voix politiques, les partis parlementaires traditionnels, tels que le Mouvement Socialiste Militant, le Parti travailliste, le Parti Mauricien Social-Démocrate et le Mouvement Militant Mauricien, conservent une part de l’électorat nettement supérieure. Ils continuent à dominer les intentions de vote, montrant ainsi que les électeurs préfèrent encore se tourner vers des partis bien établis malgré les appels à un changement politique.
La question qui se pose est de savoir si ces partis traditionnels parviendront à répondre aux attentes de l’électorat ou si les partis extraparlementaires réussiront finalement à se tailler une place plus importante sur la scène politique de Maurice.
Ashok Subron de Rezistans ek Alternativ ne semble en tout cas nullement découragé par les chiffres révélés par ce sondage. Il considère que 5 % des votes en faveur des partis extraparlementaires ne doivent pas être sous-estimés. « 1,3 % des votes sont, selon moi, destinés à Rezistans ek Alternativ, ce qui suggère que la présence des forces extraparlementaires à Maurice est une réalité. Il y a une marge significative pour gagner plus de suffrages aux prochaines élections », déclare-t-il. Ashok Subron note également que quatre Mauriciens sur 10 soutiennent la proposition de Rezistans ek Alternativ visant à rassembler toutes les forces parlementaires et extraparlementaires.
« On peut raisonnablement estimer qu’une explication approfondie de ce projet historique suscitera davantage de soutien. Le fait que trois électeurs sur quatre considèrent cette option comme viable est clairement démontré par les résultats de ce sondage », dit-il. Cependant, il est essentiel selon lui de redoubler d’efforts pour sensibiliser les plus jeunes électeurs, qui peuvent ne pas pleinement saisir les complexités du système électoral actuel, notamment le système du « first past the post ».
L’observateur politique, Abdallah Goolamallee, apporte un éclairage différent sur cette question en affirmant que le faible taux d’intentions de vote enregistré par les forces extraparlementaires dans le sondage découle d’une culture politique solidement enracinée. À ses yeux, malgré une sincère volonté de changement et le désir de nouvelles options, les électeurs mauriciens maintiennent un attachement aux partis politiques traditionnels. « Les Mauriciens, en général, semblent appréhender l’inconnu. Les partis politiques émergents demeurent relativement inconnus, car ils n’ont pas encore eu l’occasion de faire leurs preuves sur la scène politique. En conséquence, la préférence des Mauriciens semble pencher en faveur des formations politiques ayant déjà une expérience établie. Cette attitude traduit une certaine aversion au risque parmi les électeurs mauriciens ».
Il convient, selon lui, de reconnaître le mérite des partis extraparlementaires de l’opposition pour leur travail considérable, que ce soit en termes de présence sur le terrain ou de propositions visant à améliorer le système de gouvernance à Maurice. « Les partis extraparlementaires de l’opposition déploient une énergie plus intense par rapport aux partis de l’opposition traditionnels, qui se limitent souvent à poser quelques questions au Parlement », ajoute Abdallah Goolamallee.
Ce dernier, qui ne veut cependant pas rayer complètement les chances des partis extraparlementaires, affirme qu’il est possible que des extraparlementaires soient élus en région urbaine. « Des personnalités telles que Bhadain, Belcourt et Laurette sont des acteurs qui pourraient peser sur le résultat des élections, au détriment des députés parlementaires de l’opposition. Si la population devait faire un choix, elle pourrait accorder son vote aux extraparlementaires. Par exemple, dans les circonscriptions n°19 et n°20, l’impact des élus mauves a été limité, mais des personnalités comme Roshi Bhadain et Belcourt ont réussi à émerger », avance-t-il.
« Le chiffre de 3 % pour les partis extraparlementaires révélé par le sondage ne semble pas refléter la réalité selon moi ». C’est en tout cas l’avis partagé par l’observateur politique, Faizal Jeerooburkhan. « J’aurais attribué un pourcentage plus élevé aux partis extraparlementaires, car ils ont un programme sérieux, ont démontré leur engagement, et ont produit des documents solides sur la Constitution », avance-t-il.
Faizal Jeerooburkhan reconnaît toutefois les difficultés auxquelles sont confrontés les partis extraparlementaires de l’opposition. Selon lui, le manque d’unité parmi ces partis semble compromettre largement leur crédibilité aux yeux de l’électorat. « J’avais suggéré précédemment qu’ils mettent de côté leurs egos et se réunissent pour discuter et élaborer un programme commun, afin de se présenter comme une force unifiée. Il est probable que leur incapacité à parvenir à un accord reflète en partie leur faible performance dans ce sondage », pense-t-il.
De plus, il semble, selon lui, que les partis extraparlementaires soient davantage axés sur des personnalités individuelles plutôt que sur une force collective. Certains leaders agissent principalement en tant qu’individus et se font connaître de manière autonome, reléguant d’autres membres de leurs partis extraparlementaires à un rôle secondaire. « Par exemple, bien que le Reform Party puisse donner l’impression d’une approche collégiale, en réalité, il semble que le leader exerce une influence prépondérante », fait-il remarquer.
Les partis extraparlementaires pourront-ils réellement avoir un impact significatif lors des prochaines élections générales ? Selon divers observateurs, malgré toutes leurs bonnes intentions, ils risquent de ne pas influencer le résultat s’ils restent dispersés. Beaucoup estiment qu’ils ne pourront véritablement faire une différence qu’en trouvant un consensus et en s’unissant.
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