PNQ - Molnupiravir : différence de Rs 70 millions entre deux contrats

Akash Chuttoo, l’homme derrière CPN Distributors Ltd

Qui est l’homme derrière CPN Distributors Ltd, la compagnie qui a raflé un contrat de Rs 79,8 millions pour l’achat d’un million de comprimés de Molnupiravir, alors que la concurrence propose un prix très nettement inférieur pour le même médicament ?  Jay Kumar « Akash » Chuttoo est l’unique actionnaire de cette compagnie incorporée le 31 mars 2017 et qui a ses quartiers à la rue St Georges, Port-Louis, et à Montagne-Longue. Ses activités comportent l’import-export, la vente de produits alimentaires et non alimentaires, la location de voitures, et plus récemment, la vente en gros de produits pharmaceutiques. Pour l’année financière 2019/2020, CPN Distributors Ltd a déposé un chiffre d’affaires de Rs 0.

Mais, l’homme d’affaires est plus connu en tant qu’actionnaire et directeur de RSL Security Services Ltd. Cette dernière a décroché plusieurs contrats de gardiennage auprès de divers ministères. Active depuis mai 2004, la compagnie a enregistré un chiffre d’affaires de Rs 207 185 829 pour l’année financière 2019/20, pour un profit de Rs 11 784 921. Récemment, Akash Chuttoo s’est aussi intéressé à la radio. Il était l’un des actionnaires d’Admiralty Media Company qui a postulé, sans succès, auprès de l’Independent Broadcasting Authority (IBA) pour une licence radio en octobre 2018. Les tentatives pour entrer en contact avec celui-ci ont été vaines.

Statement du Dr Jagutpal : « Nous n’avions pas d’autres choix »

Dans un « urgent statement in the public interest », vendredi soir, le ministre de la Santé, le Dr Kailesh Jagutpal, a souligné que le Molnupiravir devait être commandé en extrême urgence, vu la situation dans les hôpitaux et à l’ENT au moment où la commande avait été passée. Le ministère de la Santé ne pouvait pas attendre avant de recevoir ce médicament « qui peut sauver des vies ». S’il a affirmé lors de la PNQ qu’une cargaison de 1,2 million de comprimés de Molnupiravir devait arriver le vendredi 10 décembre, lors de son ‘statement’, le Dr Jagutpal est revenu sur ses propos en avançant que le fabricant indien ne pourrait honorer cette demande et ne pourrait livrer sa cargaison que le 25 décembre. Par rapport à CPN Distributors Ltd, qui a eu le contrat pour 999 000 comprimés de ce médicament le 7 décembre, le ministre précise qu’il ne s’agissait en fait pas d’une offre non sollicitée, mais que « la compagnie avait signalé au ministère qu’elle avait du Molnupiravir en stock ». Il souligne aussi que CPN Distributors Ltd est enregistrée en tant que revendeur de produits pharmaceutiques auprès du Pharmacy Council depuis le 28 juillet dernier et que toutes les procédures ont été suivies dans le strict respect de la loi.

Un médicament révolutionnaire

Le Molnupiravir, un comprimé antiviral, est le dernier médicament en date à s’ajouter à la panoplie de produits déjà prescrits aux patients atteints de la Covid-19. Il a été lancé le jeudi 9 décembre et est disponible dans tous les hôpitaux régionaux et au New ENT Hospital.   

1,2 million de comprimés de Molnupiravir à l’intention de 25 000 patients ont été reçus pour le traitement contre la Covid-19. Les pilules sont à prescrire dès qu’une personne a été testée positive, a fait ressortir le Dr Ramprakash Reesaul, pneumologue et membre du comité qui décide du protocole de traitement. Il a expliqué que l’étude de ce médicament antiviral est encore en phase 3. Le laboratoire Merck a cependant eu l’autorisation de le commercialiser en raison des bons résultats obtenus lors des essais.
Le médicament sera prescrit à trois catégories de patients :

• Ceux qui ont des symptômes légers ou modérés ;
• Ceux qui sont asymptomatiques mais qui ont des comorbidités (hypertension artérielle, diabète, problème rénal, entre autres) ; 
• Ceux qui ont plus de 60 ans. 

Ceux qui seront sous ce traitement devront prendre 40 comprimés en cinq jours, soit 800 mg matin et soir. Le produit est disponible dans les hôpitaux régionaux ainsi que les mediclinics et les Area Health Centres. Les autres médicaments qui sont utilisés dans le protocole de traitement sont le Dexamethasone, le Remdesivir, le Favipiravir, et le Tocilizumab. Le ministère va bientôt introduire le Ronapreve. Une première cargaison devrait arriver au pays vers la fin du mois de décembre ou au début de l’année 2022. Une commande de médicaments pour 3 000 patients a été placée, a indiqué le Dr Ramprakash Reesaul.

Xavier-Luc Duval : « Le plus grand scandale soulevé par une PNQ ces dernières années »

Après la séance parlementaire de ce vendredi 10 décembre, le leader de l’opposition a souligné que pour pouvoir importer ce médicament, un permis spécial du ministère de la Santé est requis. « Comment une compagnie qui est nouvelle sur la place a pu recevoir l’autorisation d’importer 1 million de doses de médicaments », demande le leader de l’opposition. CPN Distributors a été enregistrée au Pharmacy Council en juin dernier et n’a, selon Xavier-Luc Duval, jamais approvisionné le ministère de la Santé auparavant. Il soutient aussi qu’alors que les médicaments de Mauritius Pharmacy ont une date de péremption à 18 mois, ceux de CPN Distributors n’auraient qu’une durée de vie de sept mois. L’ensemble de ces éléments fait dire au leader de l’opposition qu’il s’agit là d’un « scandale d’une ampleur jamais vue ».

Les députés du Parti travailliste (PTr) ont également tenu un point de presse devant l’Hôtel du gouvernement ce vendredi après-midi. « Le Ptr est extrêmement choqué. En ce temps de pandémie durant laquelle des gens perdent la vie par centaines, d’autres dévalisent le pays », dénonce Patrick Assirvaden, président des rouges. Il réclame la démission du ministre de la Santé, Kailesh Jagutpal, au plus vite. Arvin Boolell le suit : « C’est un scandale sans précèdent. Si le Premier ministre a un peu de dignité, il doit demander à son ministre de la Santé de démissionner ».