Certains pharmaciens songent à ne plus commercialiser les médicaments classifiés sous les Schedule II, III et IV de la Dangerous Drugs Act 2000. Ils considèrent que ce sera trop contraignant, avec l’Online Monitoring Platform qui sera en vigueur le 1er juin prochain.
L’Online Monitoring Platform continue à faire des vagues. Ce nouveau système vise à assurer un meilleur contrôle des médicaments classifiés sous les Schedule II, III et IV de la Dangerous Drugs Act 2000. Il sera implémenté par le ministère de la Santé, en collaboration avec la Mauritius Revenue Authority (MRA). Cela, à partir du 1er juin prochain.
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Contraintes
La « surprise » passée après l’annonce de ces nouvelles dispositions, des pharmaciens envisagent désormais de suspendre la commercialisation de ces médicaments classifiés. C’est ce qu’affirme Siddique Khodabacus, président de l’Union des pharmaciens. Selon lui, la vente de ces produits s’annonce plus contraignante. Cela, d’autant plus que les pharmaciens doivent respecter la Pharmacy Act, la Dangerous Drugs Act, les règlements du ministère du Commerce ainsi que ceux du Pharmacy Board et du Pharmacy Council. Impliquer cette fois la MRA avec la nouvelle plateforme en ligne, où les pharmaciens doivent rapporter immédiatement la vente des médicaments classifiés, est une mesure de trop, disent-ils.
« Nous sommes d’accord qu’il faut un contrôle en temps réel des produits classifiés. C’est l’instance régulatrice de la profession (des pharmaciens) qui devrait gérer ce système et non la MRA. Ce n’est pas logique », fait ressortir Siddique Khodabocus. Pour lui, cela devrait être le Pharmacy Board ou le Pharmacy Council, selon les provisions de la loi. Ajouté à cela, il se demande comment la confidentialité des patients sera préservée. Selon lui, ce n’est pas le rôle de la MRA de s’occuper des affaires réglementaires.
Instances régulatrices
« Un pharmacien est autorisé par la loi à s’occuper de la gestion et la vente des médicaments classifiés. La MRA est une structure non autorisée et lui soumettre les données les transactions des pharmacies sur la vente de médicaments classifiés n’est pas clair », lance-t-il. Le président de l’Union des pharmaciens se demande pourquoi le ministère de la Santé ne met pas en place une unité de surveillance avec tous les mécanismes nécessaires. Il fait aussi remarquer que toutes les pharmacies ne sont pas dotées d’outil informatique et qu’il leur faudrait du temps pour avoir les équipements nécessaires.
Autre point de discorde, pourquoi ce sont uniquement les pharmaciens qui seront davantage contrôlés. « Il faut aussi contrôler les médecins. Si les pharmaciens doivent soumettre les détails de leurs ventes et prescriptions, il faut également placer sous surveillance les ordonnances des médecins », souligne-t-il.
Même s’il admet que le contrôle des pharmaciens à travers un système de surveillance en ligne est un début, Siddique Khodabocus est néanmoins d’avis que plusieurs règlements ne sont pas pris en considération, tels la Data Protection. « On ne peut pas fournir des informations confidentielles concernant la santé des patients, surtout en ce qu’il s’agit de sa santé mentale, à une plateforme de la MRA qui n’est pas une instance régulatrice des pharmaciens », explique-t-il.
Absence de consultations
Le président de l’Union des pharmaciens fait aussi ressortir que, même si ce système va mettre un frein aux pratiques illégales, les choses doivent être faites selon les règles, soutient-il. « Dans la forme, c’est une bonne initiative afin mieux contrôler la vente en temps réel. Mais dans le fond, il faut le faire correctement. » Il insiste sur le fait qu’il faut donner du temps aux pharmaciens afin qu’ils puissent se doter de l’outil informatique. Ce qui implique des coûts, souligne-t-il. « Il faut s’assurer que toutes les pharmacies soient informatisées, tout en prenant en considération les lois sur la confidentialité des patients ».
Siddique Khodabacus déplore, en outre, qu’il n’y a pas eu de consultations élargies avant l’annonce des nouvelles dispositions qui seront mises en œuvre le 1er juin prochain. Il affirme que le Pharmacy Council n’a pas été sollicité, ce qui aurait permis à l’instance régulatrice d’informer ses membres sur les tenants et aboutissants du nouveau système. Les associations des pharmaciens et des patients auraient dû être consultées également, selon lui. « Nous ne sommes pas contre le contrôle, mais nous sommes contre la façon de faire. Il y a des lacunes dans l’implémentation de ce système qui peuvent engendrer des problèmes à l’avenir », avance-t-il.
Les médicaments classifiés
Schedule II : Médicaments (anti-douleurs) à base d’opioïdes, tels que la morphine.
Schedule III : Médicaments psychoactifs pour le traitement de douleurs neuropathiques, médicaments anxiolytiques dérivés des benzodiazépines et triazolobenzodiazépines.
Schedule IV : Précurseurs (ingrédients pouvant être utilisés pour la fabrication de drogues synthétiques, comme les cétones).
Contrôle en temps réel
Selon le ministère de la Santé, ces nouvelles dispositions sont en lien avec les recommandations de la commission d’enquête sur la drogue présidée par l’ancien juge Paul Lam Shang Leen. Le rapport indique au chapitre 10.3.15, que « la commission considère qu’à l’ère de l’électronique, l’usage de l’ordinateur est incontournable. Les travaux de routine ennuyeux peuvent être effectués sans faute par le logiciel adapté aux besoins du Pharmacy Board. Celui-ci se chargera du stockage des informations requises dans une base de données. Ce qui faciliterait la surveillance en temps réel des transactions effectuées par tous les pharmaciens du pays. Les informations collectées simplifieront également le travail de l’unité d’inspection ». Le président de la commission a, par ailleurs, indiqué que l’usage du Drugs Data Book (DDR) est archaïque.
Dans ses recommandations, l’ancien juge Paul Lam Shang Leen a fait ressortir que le système centralisé devrait permettre aux importateurs de scanner le connaissement concernant les importations de drogues contrôlées en vertu des annexes II et III de la loi sur les drogues dangereuses, ainsi que le certificat de dédouanement et le permis du Pharmacy Board. Cela, immédiatement après avoir pris possession de l’envoi, qu’il soit destiné aux grossistes ou aux distributeurs. De plus, toutes les ventes aux particuliers (patients) par les pharmacies doivent être scannées dans le système avec la prescription du médecin.
Nous avons sollicité la MRA, concernant le nouveau système qui entre en vigueur le 1er juin, mais sommes en attente d’une réponse.
Des propriétaires de pharmacie dans la tourmente
Les pharmacies devraient appartenir à des pharmaciens. Tel est l’avis de plusieurs professionnels du secteur. Les non-pharmaciens propriétaires d’une officine ne l’entendent pas de cette oreille. Cela, en dépit des difficultés qu’ils rencontrent. Parmi, le recrutement d’un pharmacien pour que leur entreprise puisse opérer.
Les non-pharmaciens propriétaires d’une officine ont de plus en plus de mal à opérer leur entreprise. Pour cause, ils ont du mal à trouver des pharmaciens pour pouvoir ouvrir leur pharmacie. En effet, selon la Pharmacy Act, un pharmacien doit être présent de l’ouverture à la fermeture d’une pharmacie. Cela, même si dans la pratique, c’est le « dispenser » qui est là en permanence.
Selon certains de ces propriétaires, il y a des pharmaciens qui réclament un salaire « exorbitant ». Et cela peut varier de Rs 2 000 à Rs 3 000 par jour ou entre Rs 45 000 et Rs 60 000 par mois en moyenne et cela, pour quelques heures de présence seulement par jour. Ce qui n’est pas à la portée de tous, en prenant en considération les autres charges dont ils doivent s’acquitter, notamment le loyer de l’emplacement.
Une demande pour avoir recours à des pharmaciens étrangers, soumise au Pharmacy Council et au ministère de la Santé, peine à être approuvée. On évoque, notamment la barrière de la langue, mais aussi l’exigence que le pharmacien étranger dispose comme qualification une spécialité qui n’est pas disponible à Maurice.
Face à cette situation, les propriétaires non-pharmaciens ne savent plus à quel saint se vouer. Après avoir investi gros dans leur entreprise et obtenu un permis d’opération, les voilà confrontés à la difficile tâche de trouver un pharmacien. Pour eux, il ne s’agit pas que de « business ». « C’est un service de proximité que nous voulons offrir à la population afin qu’elle ait accès à des médicaments », explique l’un deux sous le couvert de l’anonymat.
En dépit des difficultés, ces propriétaires de pharmacies multiplient les démarches et initiatives afin que leur voix puisse être entendue.
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