
La nomination contestée d’Axcel Chenney à la tête de la National Empowerment Foundation et la composition controversée du conseil d’administration a soulevé une vague d’accusations de favoritisme. Le ministre Ashok Subron se trouve ainsi au cœur d’une tempête politique. La plainte déposée par Joe Lesjongard à la Financial Crimes Commission a relancé le débat : le ministre doit-il quitter son poste ?
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Ashok Subron va-t-il survivre à la tempête qui secoue son ministère ? Cette question brûlante agite désormais l’actualité. Déjà, vendredi dernier, la nomination d’Axcel Chenney comme Chief Executive Officer de la National Empowerment Foundation (NEF) a été approuvée par le Conseil des ministres. Mais ce qui devait être un simple processus administratif a viré à la polémique. La constitution du conseil d’administration de cet organisme, composée de treize membres dont plusieurs noms ont soulevé des interrogations, a ensuite été sujette à polémique.
Joe Lesjongard, lui, n’est pas resté les bras croisés. Dès vendredi après-midi, il a saisi la Financial Crimes Commission. Il a dénoncé ce qu’il qualifie de « zones d’ombre » et de favoritisme manifeste entourant toute la procédure des nominations à la NEF. Le ministre de l’Intégration sociale, de la Sécurité sociale et de la Solidarité nationale se trouve ainsi propulsé au centre d’une controverse. Pourra-t-il redresser la barre ? Cette affaire risque-t-elle de lui coûter son poste ?
L’avocat constitutionnaliste Parvez Dookhy est catégorique : « Il y a suffisamment d’éléments pour qu’il démissionne tout court. » Il exprime un scepticisme profond quant à une enquête véritablement indépendante. « Je ne suis pas sûr qu’il y aura une enquête réelle. Le problème est que ces institutions sont politisées. L’affaire risque de dormir dans un tiroir », avance-t-il.
Responsabilité éthique
Me Parvez Dookhy ajoute que « juridiquement parlant, Ashok Subron a, si les faits sont confirmés, favorisé un membre de sa famille ». Il précise qu’un ministre doit agir dans l’intérêt de la nation. « Il a une responsabilité éthique qui dépasse ses intérêts personnels », souligne-t-il.
D’autres voix adoptent une position plus nuancée. Le syndicaliste Reeaz Chuttoo met en lumière la complexité de la situation d’Ashok Subron. « Ce n’est pas à moi de dire s’il doit démissionner ou non. Mais j’ai l’impression que le gouvernement veut qu’il parte. Il paie le prix d’avoir renié ses principes. On l’a utilisé lors des élections pour obtenir le vote des travailleurs. Pour renverser le gouvernement sortant, il y avait des alternatives à gauche. La trahison d’Ashok Subron a affaibli cette gauche. Aujourd’hui, il semblerait que le gouvernement n’ait plus besoin de lui », souligne le syndicaliste.
Il prévient cependant que la situation pourrait s’aggraver pour le ministre. « Il connaîtra pire que cela. Maintenant, on essaie de le lapider », ajoute-t-il avant de préciser : « Mais Ashok Subron est assez intelligent, il doit savoir quoi faire. »
Présomption d’innocence
Face à ces tensions, l’observateur politique Olivier Précieux rappelle une règle fondamentale de la justice : la présomption d’innocence. « Tant qu’une personne n’est pas reconnue coupable après appel, elle ne doit pas démissionner », souligne-t-il. « Dans le cas d’Ashok Subron, il n’y a aucune condamnation contre lui. Je ne vois donc pas pourquoi il devrait quitter son poste de ministre ou son mandat de député », plaide l’observateur.
Ce qui a soulevé un tollé dans cette affaire, c’est la présence, dans le panel de sélection, de Kugan Parapen, Junior Minister à la Sécurité sociale, ainsi que de la conjointe d’Ashok Subron, Dany Marie, qui fait partie de Rezistans ek Alternativ. Ces liens familiaux et politiques ont suscité des interrogations sur la transparence du processus, tout en jetant une ombre sur l’intégrité de la procédure.
Jeudi, le ministre a tenté une sortie par le haut. Lors d’une conférence de presse, il a tenté de calmer le jeu, affirmant « ne rien avoir à se reprocher ». Puis il a dit ceci : « Les nominations sont une prérogative du ministre. C’est la Constitution et la loi qui prévoient cela. »
Ashok Subron : « Je me plierai aux décisions prises par le Conseil des ministres »
Le leader de l’opposition s’est rendu à la Financial Crimes Commission, vendredi, pour demander l’ouverture d’une enquête sur les récentes nominations à la National Empowerment Foundation (NEF). « Joe Lesjongard a saisi la FCC. Je l’accueille avec la tête haute. Mo kontan linn fer sa. La FCC enquêtera sur le processus de nominations effectué par moi-même et le Cabinet ministériel », a déclaré le ministre de l’Intégration sociale, de la Sécurité sociale et de la Solidarité nationale, Ashok Subron, le samedi 24 mai 2025.
Il répondait aux questions des journalistes à l’issue d’une cérémonie sur le thème « La povrete azordi an 2025 » organisée au gymnase du collège de Lorette à Rose-Hill. « Tout ce qui a été fait est ‘in order’ », a-t-il ajouté, précisant qu’il est en contact avec son avocat pour décider de la marche à suivre.
Ashok Subron a contextualisé la polémique en expliquant que Rezistans ek Alternativ est nouveau dans un gouvernement. « Nous avons voulu faire quelque chose de bien et que les nominations puissent se faire avec la participation d’un plus grand nombre de personnes pour se mettre au service du pays », a-t-il soutenu.
Pour lui, cet exercice a été une bonne chose dans la manière dont les choses se sont déroulées. Le ministre a précisé avoir écouté les critiques formulées. « Des personnes ont commenté les procédures avec de bonnes intentions. Nous les avons écoutées et nous faisons notre autocritique sur ce sujet », a-t-il ajouté. Il a souligné qu’il a aussi pris note des critiques exprimées contre sa personne, contre le Junior Minister Kugan Parapen et contre sa compagne Dany Marie, ainsi que d’autres personnes impliquées dans ce processus.
La controverse a fait l’objet de discussions approfondies au Conseil des ministres. « Le Cabinet des ministres a pris l’affaire en main et des décisions ont été prises. Je vais me plier aux décisions qui ont été prises », a affirmé Ashok Subron. Il a fait ressortir que les questions ultérieures seront adressées par le Premier ministre et le Deputy Prime Minister.
En tant que ministre, il revendique avoir agi selon ses convictions, pensant faire ce qui est bon pour le pays et ce qui a plu à de nombreux Mauriciens, selon lui. Il admet que cela a aussi soulevé un certain nombre de questions légitimes. « Une de nos qualités, c’est l’autocritique et de voir ce que nous avons fait de bon et ce qu’il faut corriger », a-t-il dit. Ashok Subron a conclu son intervention en remerciant tous ceux qui se sont exprimés ces derniers temps. « Nous devons aussi accepter les critiques », a-t-il indiqué.

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