
L’ancien DPP, Mᵉ Satyajit Boolell, nommé à la présidence de la National Human Rights Commission il y a un mois, évoque la réinsertion des ex-détenus, un enjeu prioritaire pour cette institution dédiée à la défense des droits humains à Maurice.
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Vous avez été nommé à la tête de la National Human Rights Commission (NHRC) depuis bientôt un mois. Quel bilan tirez-vous de cette prise de fonction ?
Je constate qu’il existe un manque de visibilité pour sensibiliser le public au rôle de la Commission, à son importance dans la capacité d’améliorer positivement la vie des citoyens et à son pouvoir de sanctionner les institutions publiques qui ne respectent pas les droits humains.
En effet, la Commission dispose de vastes prérogatives pour mener des ‘fact-finding enquiries’ dans tous les cas impliquant une violation des droits humains garantis par le Chapitre 2 de la Constitution, y compris pour faire respecter les droits des personnes purgeant une peine d’emprisonnement. Bien entendu, les conclusions de la Commission donneront lieu à des recommandations assorties d’actions concrètes de suivi.
Les droits de l’homme, tels que garantis par le Chapitre 2 de notre Constitution, ainsi que l’examen du traitement réservé aux personnes purgeant une peine d’emprisonnement, confèrent à la Commission un large éventail de responsabilités.
S’il est vrai que le législateur a créé deux divisions distinctes : la Division des droits de l’homme et la Division du mécanisme national de prévention, cette dernière découlant d’une obligation du Protocole facultatif à la Convention des Nations unies contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, il est essentiel de rester vigilant afin de ne pas confondre l’arbre et la forêt, pour garantir l’efficacité de ses objectifs législatifs.
Quelles actions concrètes ont été entreprises depuis votre nomination ? Quelles sont les priorités immédiates que vous avez identifiées ?
À ce stade de notre mandat, nous nous préoccupons davantage du processus et de la méthodologie que de toute autre chose, afin d’établir des relations appropriées avec les institutions publiques et les ONG avec lesquelles la commission entend collaborer étroitement. Une ‘newsletter’ est déjà prévue pour le début d’août, et nous aborderons une question qui nous préoccupe déjà : la réhabilitation et la réinsertion des ex-détenus dans la société, surtout les jeunes et les femmes.
Il est grand temps que les entreprises mauriciennes fassent une réflexion sérieuse afin de donner une seconde chance à des « ex-convicts », pour qu’ils ne deviennent pas des marginaux de la société pour le reste de leur vie. L’éligibilité au certificat de caractère doit être au centre de cette réflexion.
La Commission va employer des ex-détenus là où cela sera possible»
Vous êtes arrivé à la tête d’une Commission parfois perçue comme peu visible ou peu proactive. Comptez-vous changer cette image ? Et si oui, par quels premiers gestes forts ?
Nous avons la chance d’avoir, au sein de la Commission, une ancienne journaliste, une experte en communication (NdlR : Touria Prayag). La Commission, à travers sa newsletter et les réseaux sociaux, fera l’essentiel pour toucher un maximum de citoyens. Je tiens à souligner que la mission même de la Commission est de promouvoir les droits humains. Déjà, les membres interviennent régulièrement à la radio, et vous allez nous entendre aussi parler de nos activités et nous allons, surtout, inviter les jeunes à venir discuter des droits humains et des responsabilités qui s’imposent.
Un autre aspect vital est notre projet avec les ONG, consistant à lancer une campagne d’éducation et de réflexion à travers les institutions scolaires, les entreprises et au sein de la force de l’ordre.
Mardi prochain, nous avons une rencontre avec le Commissaire des prisons, et nous aborderons plusieurs aspects de notre mission concernant le traitement et les conditions d’incarcération des prisonniers. Bien sûr, le taux de réussite de la réhabilitation et de la réinsertion des ex-détenus sera au centre de nos préoccupations. Enfin, la Commission va employer des ex-détenus là où cela sera possible.
Avez-vous prévu une feuille de route publique ou un rapport d’étape pour vos six premiers mois ?
La législation exige un bilan annuel. La Commission compte faire mieux… Nous avons l’intention de communiquer nos recommandations concernant nos actions sur une base trimestrielle. La presse sera ainsi notre partenaire privilégiée, et je tiens également à souligner que, garantir le respect et la liberté de la presse fait partie de nos attributions.
Des rencontres avec des ONG, la police ou d’autres institutions ont-elles déjà eu lieu ? Si oui, quels en ont été les grands axes ?
Oui, bien sûr, et nous continuons cette prise de contact dans les semaines à venir. Les ONG restent une source privilégiée pour nous conscientiser sur ce qui se passe sur le terrain. La Commission, par contre, a la capacité de faire enclencher officiellement les mesures qui s’imposent. Ainsi, une synergie vitale avec les ONG est indispensable.
Comptez-vous revoir les mécanismes de plainte ou d’enquête de la Commission pour les rendre plus accessibles ou efficaces ?
La question a déjà été abordée. Une user friendly approche serait notre philosophie, de même que le recours à l’efficacité de la technologie. Tout cela se réalisera dans le temps. On discute déjà avec la Central Information Systems Division (CISD). Notre site Web demande à être revu. Les procédures ont été entamées.
L’âge d’éligibilité à la pension de vieillesse fait actuellement débat. À la lumière du cadre légal existant, cette controverse vous semble-t-elle fondée ou existe-t-il un risque de discrimination ou d’inégalité de traitement ?
Attendons de voir. L’État est conscient et a institué des comités pour s’assurer que les plus vulnérables soient les moins affectés par sa décision de rationaliser et de concorder la pension universelle avec l’âge de la retraite. Chaque action de l’État doit être proportionnée à ses objectifs. Espérons qu’une solution satisfaisante, dans l’intérêt général, soit trouvée.
Nafiisah Peerbaye

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