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Marché du travail - Travailleurs étrangers : bras de fer gouvernement/secteur privé

Pour le moment, seuls les étudiants étrangers sont autorisés à travailler dans les hôtels.

Plus de 5 000 travailleurs étrangers sont nécessaires pour répondre aux exigences immédiates du marché du travail, selon le secteur privé. Mais, le gouvernement n’est pas prêt à ouvrir les vannes pour tous les secteurs. 

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Selon le secteur privé, il faudrait plus de 5 000 travailleurs étrangers pour faire face aux exigences du marché du travail. Les principaux secteurs concernés sont la construction, le textile, le tourisme, l’agriculture et le commerce.

Ceux-ci viendraient s’ajouter aux quelque 33 000 ressortissants étrangers, dont 18 000 à 20 000 Bangladais, qui travaillent à Maurice. Or, le gouvernement n’est pas prêt à ouvrir encore davantage les vannes. Avec un taux de chômage de 8,7%, soit environ 50 000 chômeurs, pour les trois premiers mois de cette année-ci, contre 8,1% pour les trois derniers mois de 2021, priorité doit être donnée à l’embauche locale.

Le patronat soutient cependant qu’il y a urgence, surtout dans des secteurs tels que l’hôtellerie, où il y a peu d’intérêt de la part des Mauriciens. Le secteur privé, à travers ses représentants, tels que l’Association des hôteliers et restaurateurs de l’île Maurice (AHRIM) et Business Mauritius, continue son plaidoyer.

Mais le gouvernement ne plie pas sur certaines demandes. Pas plus tard que mardi, le ministre du Travail, Soodesh Callichurn, a mis les points sur les i. Il concède que la situation est urgente dans l’hôtellerie, avec 2 500 postes à remplir dans l’immédiat avec la haute saison qui pointe son nez, mais « avant de prendre une décision hâtive, il convient de réfléchir aux causes profondes de cette situation et d’analyser les moyens d’inciter les Mauriciens à prendre de l’emploi dans ce secteur ». 

Si un entrepreneur veut importer une cinquantaine de travailleurs étrangers, il ne pourra le faire. « Il faudra qu’il prenne également des Mauriciens », dit un cadre du ministère. Ce dernier ajoute que le ministère du Travail va contrôler l’importation des travailleurs étrangers. « Il faut faire de la place aux Mauriciens. Sinon, il n’y aura que des étrangers », fait comprendre cette source.

Reste que l’hôtellerie est prête à s’engager dans ce sens. Officiellement, des représentants de ce secteur ont proposé un ratio de 1:3, soit un étranger pour trois Mauriciens. Cela, pour ne pas mettre en péril l’emploi des Mauriciens. Argument qui ne convainc pas le gouvernement.

Le paradoxe veut que plusieurs milliers de Mauriciens sont sans emploi, avec une plus forte concentration parmi ceux qui ne sont pas ou sont peu diplômés. Pourtant, beaucoup ne sont pas intéressés par un emploi dans les secteurs qui cherchent des travailleurs désespérément.

« Pour des secteurs tels que le tourisme, le commerce (supermarchés) et l’agriculture, c’est vraiment difficile à trouver », confirme Ravish Pothegadoo, fondateur et directeur de l’agence de recrutement Talent On Tap. « Le Mauricien ne voudra pas travailler dur et à des horaires difficiles pour Rs 12 000 ou Rs 15 000, sachant qu’avec ce salaire, il ne pourra jamais progresser dans sa vie personnelle, alors que le sacrifice à faire pour ce salaire est grand », ajoute-t-il. Ceux qui prennent de l’emploi, « sont ceux qui en ont absolument besoin, car ils n’ont pas d’autres choix. »

Le consultant en relations industrielles, Ivor Tan Yan, explique qu’on a atteint une telle situation au pays où non seulement les jeunes sont au chômage, mais les jeunes diplômés également. « Ainsi, on est dans un contexte de chômage chronique. Ce, parce que le travail offert ne correspond pas à la demande. C’est pourquoi les jeunes sont sans emploi », soutient-il. Ce dernier indique que les néolibérales du pays disent toujours que l’offre et la demande dictent le prix, mais cela ne se fait pas quand il s’agit du salaire. Il ajoute que dans le secteur de l’hôtellerie, il y a certains employés qui ont 22 ans de service et leur salaire ne dépasse pas les Rs 20 000 et c’est quelque chose d’inacceptable.

Il avance aussi que les jeunes qui ont une formation au sein de l’école hôtelière doivent travailler pendant plus de 45 heures par semaine afin d’avoir un salaire de Rs 12 000 à Rs 15 000. « C’est l’une des raisons, pourquoi, une fois qu’ils ont de l’expérience, ils partent travailler dans des bateaux de croisières. Ils sont mieux rémunérés », fait-il comprendre. Il souligne que dans ce secteur porteur, les gens connaissent du progrès, sauf à Maurice.

Ravish Pothegadoo affirme que les Mauriciens sont peu friands de certains métiers, notamment dans l’hôtellerie locale, mais sont prêts à faire le même travail à l’étranger ou sur des paquebots qui paient beaucoup mieux. Et c’est exactement la même chose pour les étrangers qui viennent travailler à Maurice. 

« Les entreprises préfèrent, pour des petits métiers dans le commerce, la construction, les usines, entre autres, avoir recours à la main d’œuvre étrangère, car elles savent qu’elles auront moins de soucis. L’étranger n’a aucune attache à Maurice, il n’a pas de famille, pas de vie sociale, il sera donc peu absent. Il est venu pour bosser et envoyer des sous à sa famille. D’ailleurs, c’est exactement ce que fait le Mauricien quand il va travailler à l’étranger », déclare-t-il.

Enter le National Employment Department

Le National Employment Department (NED) aura un rôle important à jouer. Le département, qui tombe sous le ministère de l’Emploi, vient d’être créé. Les sections 7,8 9 de la National Employment Act, qui encadrent le fonctionnement du directeur du NED, ont été promulguées le 15 septembre dernier.

Dans un second temps, les sections 10 et 11 seront également promulguées. Elles régissent l’obligation des chercheurs d’emploi et des entreprises qui cherchent des travailleurs de s’enregistrer auprès du NED. Le but est de lutter efficacement contre le chômage. Une fois ces sections en vigueur, tout employeur devra, à travers le National Employment Dashboard, que le NED devra créer et gérer, s’enregistrer auprès du directeur du NED, signaler tout poste vacant dans un délai de sept jours et soumettre les noms et les détails des personnes recrutées dans un délai de 30 jours. Tout employeur devra aussi signaler, dans un délai de 15 jours, lorsqu’un employé démissionne ou part à la retraite. La loi prévoit aussi que tout chômeur doit se faire enregistrer auprès du département et signaler, dans un délai de 15 jours, lorsqu’il a obtenu un emploi. Un chômeur ne pourra « sans excuse raisonnable » décliner une offre d’emploi, ou une proposition de formation, qui correspond à ses qualifications, trois fois de suite dans une période d’un an. Sinon, il ne pourra plus bénéficier des services du National Employment Department pour une durée d’un an depuis la dernière offre d’emploi déclinée.

 

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