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Journée mondiale de suicide ce lundi : y a-t-il un manque d’encadrement ?

suicide

Elle voulait laisser sa vie derrière elle, sa famille, son travail, ses amis et ses enfants. Accablée par la violence et l’infidélité de son mari, elle a ingurgité des comprimés dans un accès de détresse. Puis elle a sombré dans le noir…

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Davina : « J’ai eu une deuxième chance »

davinaDavina, une jeune mère de famille, a survécu à une tentative de suicide. Elle avait pris un grand nombre de médicaments, un geste qui n’a heureusement pas eu de conséquences fatales. Lorsqu’elle a repris connaissance, elle était à l’hôpital. « J’étais soulagée, mais ce sentiment a été de courte durée. J’ai été vite rattrapée par la réalité quand j’ai découvert des policiers à mon chevet  », confie Davina

Il y a quatre ans, un dimanche de juin, cette mère de deux garçons de 10 et 12 ans, a pris la décision de tout envoyer balader. Las de son époux violent, de ses infidélités et de ses insultes durant 10 ans de vie commune, Davina était plongée dans le désespoir. Pour s’en sortir, elle pensait n’avoir pas d’autre choix que de mettre fin à sa vie. « Sur le coup, je voulais être libérée, mais j’ai été égoïste de ne pas penser à mes enfants. J’en avais juste marre de cette vie et je ne trouvais pas de solution pour m’en sortir », raconte-t-elle, les larmes aux yeux.

Toutefois, malgré son geste désespéré, Davina, alors âgée de 29 ans, ne considère pas son geste comme un acte de lâcheté et ne le regrette pas non plus. « Lorsque la réalité m’a rattrapée et que j’ai rouvert les yeux, c’était comme une deuxième chance que la vie m’offrait. Je l’ai réalisé en voyant le visage de mes enfants et celui de mon ex-époux. C’est comme si, à travers cet acte de désespoir, j’avais tué mon mari violent. Depuis ma tentative de suicide, j’ai divorcé », raconte Davina qui est dorénavant une femme épanouie.

« Cette deuxième naissance, je la dois à mes fils qui m’ont retrouvée inerte sur le sol. J’ai passé trois jours dans un état semi-comateux. Mon unique regret, c’est d’avoir laissé mes fils seuls pendant ces trois jours », ajoute Davina.


Kavish : « J’ai pu de m’en sortir »

« J’ai fait ma première tentative de suicide à 16 ans et c’est ma mère qui m’a empêché de passer de l’autre côté  », raconte de son côté Kavish. À 18 ans, le jeune homme a fait une deuxième tentative, mais une amie est intervenue… « Puis, ça été le calme plat entre 18 et 22 ans. Ensuite, après avoir raté ma première année à l’université, j’ai fait un burnout ! J’ai connu la solitude, la vraie, lorsque ma petite amie m’a trompé avec mon meilleur ami. J’en ai eu assez et mes idées noires ont été plus fortes que tout. J’ai fait un mélange de médicaments, qui cette fois, aurait pu être fatal », avoue Kavish.

Cependant, encore une fois, son heure n’avait pas sonné, car ses cousins ont débarqué à temps au domicile du jeune homme, alors âgé de 23 ans. Ils l’ont emmené à l’hôpital.

« J’ai commis trois tentatives qui ont été finalement prises au sérieux. À mon réveil, j’ai eu des entretiens avec des psychiatres en charge d’évaluer mon cas pour décider s’il fallait ou pas que j’intègre un hôpital psychiatrique. Heureusement, mon frère a proposé de veiller sur moi et c’est ainsi que je n’ai pas été admis à l’hôpital psychiatrique. J’ai eu la frousse de ma vie ! Soulagé, je suis rentré à la maison. Puis, j’ai commencé à me documenter sur le suicide et j’ai rédigé un rapport sur ce sujet, à la fois tabou et tellement poignant. J’ai obtenu une excellente note et cela m’a permis d’expliquer, de comprendre et même de maîtriser mes pulsions suicidaires », explique Kavish.

Après quelque temps et contre toute attente, le jeune homme obtient le poste de ses rêves. Cerise sur le gâteau : il rencontre l’amour, l’unique, le vrai… Kavish, tout joyeux, raconte : « J’ai découvert la patience, la douceur et la sincérité. Elle veut qu’on se marie et faire sa vie avec moi, c’est un pur bonheur... Petit à petit, j’ai commencé à voir plus clair et comprendre qu’on ne sait jamais de quoi demain sera fait. J’ai été chanceux que toutes mes tentatives de suicide se soient soldées par des échecs. Aujourd’hui, j’ai une meilleure idée de ma valeur et je suis heureux avec ma copine. Une chose est sûre : si ma dernière tentative de suicide avait réussi, je n’aurais jamais su que j’allais vivre un tel bonheur. Le bonheur ne dépend que de nous, il est à l’intérieur de nous et il faut se maîtriser pour le conserver ».

Désormais, âgé de 34 ans, Kavish prend la vie différemment. Il croit en l’avenir parce que, selon lui, c’est la clé du bonheur. « Je remercie le ciel de m’avoir fait rater mon voyage pour la mort », affirme-t-il.


Taux de suicide en hausse

À Maurice, le taux de suicide ne cesse d’augmenter. Quid de l’encadrement des Mauriciens par rapport à ce fléau ? Le 10 septembre 2018 se tiendra la 16e Journée mondiale de la prévention du suicide. Le thème est Travaillons ensemble pour prévenir le suicide. Celui-ci concerne tout le monde. Comme Davina et Kavish, une centaine de personnes se donnent la mort à Maurice chaque année. Dans le monde, on dénombre près de 800 000 personnes qui mettent fin à leur jour pour de multiple raisons. Le suicide est la deuxième cause de mortalité chez les jeunes de 15 à 30 ans, selon l’Organisation mondiale de la Santé.

« La majorité des personnes suicidaires sont atteintes d’au moins un trouble non-traité comme la dépression, l’anxiété ou l’addiction. Toutefois, d’autres facteurs comme l’isolement, la perte d’un emploi, d’un être cher ou encore une rupture amoureuse, peuvent pousser quelqu’un à commettre l’irrémédiable », explique José Emilien, de l’ONG Befrienders.

Ce phénomène touche toutes les couches sociales et tous les âges, mais les plus jeunes sont plus influençables ou plus vulnérables face aux «  suicides par imitation » qui surviennent lorsque des personnalités mettent fin à leur jour.

« La prévention du suicide est un enjeu collectif qui demande de l’engagement de chacun d’entre nous. À Maurice, nous manquons de soutien et d’encadrement, surtout pour les personnes à tendance suicidaire et pour leurs familles. Le suicide devrait être considéré comme un problème majeur avec des cellules ou un département spécialisé pour aider les individus qui ont besoin d’être écoutés », souligne José Emilien.


Befrienders 150 appels chaque mois

Créée en 1995, l’association Befrienders, avec ses 53 volontaires, met tout en œuvre pour accompagner les 150 appels qu’ils reçoivent tous les mois et gérer l’accueil des personnes en détresse. « Nous avons au sein de l’association une période de pointe où l’on reçoit plusieurs appels et la visite d’un grand nombre de personnes. Cette période de pointe correspond à la saison des fêtes où les gens sont plus susceptibles de se sentir seuls, à la période des examens et des résultats », explique José. Ce dernier souligne le manque de suivi au sein de la société avec une interaction minimale des professionnels.

« Toutes les écoles, ainsi que les espaces de travail, devraient être dotés d’une cellule avec un psychologue, mais ce n’est quasiment jamais le cas. Il y a plusieurs personnes qui veulent parler de leurs problèmes et trouver des solutions, mais souvent, ils ne savent pas vers qui se tourner. Trouver une épaule sur laquelle s’épancher est compliqué. Dans les hôpitaux par exemple, c’est uniquement sur rendez-vous. Quant au privé, tout le monde n’a pas les moyens de payer une consultation. C’est fort dommage, voire grave, car les personnes suicidaires ne peuvent pas se permettre d’attendre pour parler de leurs problèmes », regrette José Emilien.

Befrienders a mis en place une hotline que les personnes peuvent appeler ou solliciter pour une rencontre. « Mais beaucoup n’osent pas encore le faire », regrette notre interlocuteur.


Jay Ramsaha, sociologue au MIE : «Nous avons tous une part de responsabilité»

Y a-t-il suffisamment d’encadrement pour les suicidaires ?
L’individu qui souhaite vraiment se suicider ne laissera rien paraître, tandis que ceux qui disent vouloir franchir le pas, lancent simplement des appels à l’aide. Pour les individus suicidaires, se donner la mort est la seule solution à leur problème. Ils veulent se faire entendre et comprendre, une manière pour eux de dire qu’ils sont dans une impasse, une situation difficile et qu’ils souhaitent obtenir de l’aide. Il est fréquent que le problème qui pousse les personnes à se suicider vienne de leur entourage proche. Par exemple, si un jeune rencontre des soucis avec ses parents, il ne se tournera pas vers ces derniers pour en parler. À ce moment-là, il est perdu et ne sait pas vers qui se tourner. L’écoute est essentielle pour détecter des signes précurseurs chez les personnes suicidaires.

Quelle est la meilleure prise en charge possible lors d’une situation de crise ?
La société a une certaine responsabilité vis-à-vis de ces personnes.  Si un individu pense à se suicider, c’est que la société a failli quelque part. Il se peut aussi que son passage à l’acte survienne suite à des problèmes de santé, de compréhension, d’addiction… Les raisons sont diverses et diffèrent pour chaque individu. C’est là que l’écoute entre en jeu, car la première chose à faire, c’est de tendre l’oreille. À ce stade, la personne en crise considère le suicide comme l’ultime solution parce qu’elle a épuisé toutes les issues à son problème ou qu’elle ne soit pas au courant de toutes les possibilités qui s’offrent à elle.

Comment désamorcer une phase suicidaire avant le passage à l’acte ?
Le sujet du suicide est tabou dans la société mauricienne, surtout quand il s’agit de la religion. Il y a plusieurs aspects qu’il faut étudier. Prenons l’exemple de l’étudiante qui s’est suicidée, car elle n’était pas satisfaite de ses résultats à l’école… La pression énorme venant de la famille et de la société était un poids difficile à supporter pour elle. Alors, comment pouvons-nous identifier les signes si nous ne sommes pas disponibles pour les identifier ?


Choisir de mourir, c’est légal en Suisse

david

David Goodall, un Australien de 104 ans, est mort il y a quelque mois dans le cadre d’un suicide assisté en Suisse où plusieurs fondations offrent ce service. Ce pays ne réserve pas une telle possibilité qu’aux malades incurables, mais aussi à ceux qui souffrent « d’invalidités importantes » et de « souffrances insupportables ».

L’homme, dont le cas a été très médiatisé, ne souffrait d’aucune pathologie en phase terminale, mais estimait que sa qualité de vie n’était plus satisfaisante. « Je ne veux plus continuer à vivre », avait-il affirmé.

En Suisse, le Code pénal autorise l’assistance, médicale ou non médicale, au suicide en l’absence de « mobile égoïste ». Dans les faits, cette autorisation de suicide assisté est mise en pratique par cinq associations et non par les médecins. Quant aux personnes qui demandent à se suicider, la loi n’exige pas qu’elles soient forcément atteintes d’une maladie en phase terminale.

Une journée est dédiée au bien-être, à la santé et la détente

Travailler ensemble pour prévenir le suicide. Une journée entière est dédiée au bien-être, à la santé et la détente. Le public est invité à participer à une bonne journée remplie de ‘bons vibes’, le samedi 29 septembre au Collège BPS à Beau-Bassin de 10 heures à 16 heures.

Tout est gratuit :

•       séances de sensibilisation gratuites avec l’ONG BEFRIENDERS
•       Cours de yoga et de méditation gratuits avec Fondation Art of Living (30 - 45 minutes par groupe de 10 personnes)
•       Free Access Consciousness Classes avec Endless Blessing Association (30 - 45 minutes par groupe de 10 personnes)

 

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