Interview

Inapte à faire face un procès : les implications

L’avocat Rouben Mooroongapillay. L’avocat Rouben Mooroongapillay.

La Constitution de Maurice protège les droits d'un accusé. Qu'en est-il lorsqu’il est inapte à faire face à un procès pour répondre de ses actes ? L'avocat Rouben Mooroongapillay aborde le sujet avec Défi Plus.

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L’aptitude à subir son procès et la responsabilité criminelle sont deux concepts différents.

Qu’en est-il lorsqu’une personne est inapte à subir un procès ?
L'avocat de la défense devra soumettre une motion en ce sens en cour.

Que dit notre législation à ce sujet ?
Sous l'article 10 de la Constitution, un accusé a droit à un procès équitable. Donc, s’il est inapte à plaider ou à subir son procès, la cour doit se prononcer sur cette inaptitude de l'accusé et déterminer s’il peut subir son procès ou non.

En vertu de l’article 58 de la Courts Act, lorsqu’au cours d’un procès, sur avis de la cour, l’accusé devient incapable pour cause de maladie ou autre cause suffisante pour subir son procès, le tribunal peut libérer le jury et ajourner le procès.

En outre, selon l’article 114 de la Criminal Procedure Act, lorsqu’au cours du procès, un accusé est pris au point d'être incapable de subir son procès pour sa défense, le jury peut être libéré. Dans ce cas, l’accusé peut être jugé par un autre panel de jury.

Quel est le rôle du tribunal dans ce cas figure ?
Suite à la motion de l'avocat de la défense, la cour émet un ordre pour que l'accusé soit évalué par des experts dans le domaine. Le principe général est que la cour doit attendre une décision sur l'évaluation de l’incapacité de l’accusé pour passer en jugement. Cela en se basant sur toute évidence qui peut être apportée devant elle, incluant les avis de psychiatres et de psychologues. Toutefois, la cour ne peut se limiter aux évidences des médecins.

Comment évalue-t-on l’aptitude de cette personne ?
Si l'on affirme qu'un accusé est inapte à plaider ou à subir son procès, le test classique implique six points : (1) l'accusé peut-il comprendre les accusations portées contre lui ? ; (2) l'accusé peut-il prendre une décision éclairée quant à savoir s'il doit plaider coupable ou non? ;(3)  l’accusé peut-il exercer son droit de contester les jurés? ;(4) l'accusé peut-il instruire un avocat? ;(5)  l'accusé peut-il suivre la procédure et (6) peut-il témoigner pour sa propre défense ?

À qui revient le dernier mot?
Le principe général est que la cour doit se prononcer sur la question de l'inaptitude à subir son procès sur la base de tous les éléments de preuves qui peuvent lui être présentés.

Si la cour maintient le procès?
Si une décision a été rendue par le tribunal concernant l'aptitude de l'accusé, la défense peut faire appel au motif que la décision d'aptitude de l'accusé à subir son procès constitue une violation de l'article 10 de la Constitution.

Qu’arrive-t-il si la personne n’arrive jamais à subir son procès ?
Le tribunal peut ordonner la suspension de l’instance. Les accusations sont abandonnées et la personne peut vivre dans la collectivité sans restriction.

Qu'en est-il pour les victimes ?
La question ne se pose pas si l'accusé plaide coupable. Mais au cas où l'accuse plaide non coupable et où il coule de source que la victime doit témoigner lors du procès, le représentant légal de la victime, ou souvent à travers un membre de la famille, a le devoir d'informer la cour que la victime est inapte à témoigner. Ainsi, la cour décidera de la marche à suivre en vertu de l'article 10 de la Constitution.

Quelle est la différence entre « responsabilité criminelle » et « aptitude à subir un procès » ?
L’aptitude à subir son procès et la responsabilité criminelle sont deux concepts différents. Si la personne est déclarée apte à subir son procès, une évaluation ultérieure peut démontrer qu’elle n’était pas consciente mentalement au moment du crime pour comprendre la nature et les conséquences de son geste. Elle doit donc être déclarée non-responsable criminellement. À l’inverse, la personne peut être déclarée inapte à subir son procès au moment présent, mais une évaluation psychiatrique peut démontrer qu’elle savait ce qu’elle faisait au moment du crime et elle peut donc être considérée responsable criminellement.

 

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