Le panier de la ménagère en prend un sérieux coup avec la hausse des prix des produits. les importateurs de voitures de seconde-main, eux, doivent payer jusqu’à 50 % de taxes, VAT incluse. La raison : le coût du fret ne cesse de grimper. C’est le public au final qui doit casquer. Pour le grand bonheur des gros porteurs, qui s’engraissent des subsides du gouvernement.
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Anand Ajodha est un gros importateur de riz et de produits alimentaires du Pakistan et de l’Inde. Il souffre « le martyre », nous dit-il. « Le fret est passé de $ 1 200 à $ 6 500. On doit payer, certes, mais au final, on passe obligatoirement cette hausse aux consommateurs. »
Il explique que l’appréciation du billet vert n’arrange pas les choses : « Le dollar américain est passé de Rs 33 à Rs 43, soit Rs 10 de plus et c’est le petit peuple qui doit payer. Pourtant, au niveau des importateurs, on travaille sur une marge de profit de 4 %, nous l’avons tous réduite à 3 % pour que les consommateurs ne ressentent pas la hausse. Mais toujours est-il que les prix demeurent chers. »
« C’est chagrinant »
Anand Ajodha explique qu’il payait $ 1 000 la tonne de produits importés et que le prix est passé à $ 1 400. « Tout a augmenté dans le monde et la production , elle, a baissé. Je me demande comment font ceux qui touchent le salaire minimal. C’est chagrinant et si le gouvernement n’avait pas subventionné certains produits, zot ti pou plor disan. Ils auront bien Rs 500 de compensation, mais ils devront rendre Rs 5 000 », dit-il.
De son côté, Preetam Dabydoyal, autre gros importateur de produits de base comme l’huile, le riz et les grains, se pose des questions quant à l’avenir. « Il n’y a aucune visibilité concernant le fret. Chaque semaine, le fret monte. Quand nous importons un produit de la maison-mère, c’est free on board (FOB), c’est-à-dire, on ne peut pre-order et payer sur-le-champ, alors que si c’est selon le principe coût et frais, les marchandises montent sur le bateau et on a entre 45 et 60 jours pour payer. Ce qui fait que sous le FOB, nous réduisons les importations pour diminuer les frais. Bann gro transporter fer dominer. Il y a aussi un manque de conteneurs sur le marché et l’Inde, grande exportatrice, est en train d’en construire des milliers », dit-il.
Un chauffeur de camion porte-conteneurs, Fahrad Noorah, ne sait plus où donner de la tête. « En 2021, le gouvernement n’a pas donné le permis d’importation d’oignon et de pomme de terre à un importateur. Du coup, j’ai perdu 100 conteneurs, soit 100 voyages. Une usine de boissons gazeuses n’importe plus de sucre, qui est fortement frappé par la taxe. Elle en achète ici. Je perds encore 100 conteneurs. Une grande entreprise de meubles a annulé ses importations, je perds une cinquantaine de conteneurs. Auparavant, Preetam Dabydoyal importait pour des dizaines de conteneurs, maintenant le volume a diminué drastiquement. J’ai dû licencier des hommes et je ne suis pas le seul dans cette situation », dit le camionneur.
Voitures de seconde-main
Zaid Ameer, de l’Association des Customs Brokers et importateur de voitures recon, a attiré l’attention du ministère du Commerce sur la question. « Avant la Covid-19, en 2020, un conteneur de 20 pieds de produits alimentaires coûtait, en termes de fret du transporteur, $ 1 200 (environ Rs 35 000), avec un taux de change moindre que celui en vigueur. Depuis décembre 2021 et ce jusqu’à la semaine dernière, le fret est passé à $ 6 800 (environ Rs 300 000). Ce qui fait presque 10 fois plus. Un conteneur de 40 pieds était à $ 2 200 et maintenant, c’est entre $ 14 000 et $ 15 000 (environ Rs 600 000). C’est fou, on subit de plein fouet cette hausse », dit-il.
Selon Zaid Ameer, il y avait une vingtaine de compagnies gros-porteurs dans le monde. « Elles ont merged. Actuellement, le nombre est passé à 12. Ce qui fait qu’elles font la pluie et le beau temps », dit-il. « Il faut justifier ces augmentations extrêmes, car cela touche tous les secteurs d’activité, les consommateurs et nos clients, au final. Sans oublier qu’il y a la VAT de 15 %, plus les taxes de la douane de 35 % qui frappent l’importation des voitures. Ce qui fait 50 % de taxes directes », ajoute-t-il.
À Maurice, dit-il, il n’y a que trois gros porteurs : MSC, Maersk et CGM/CMA. « Elles fonctionnent comme un cartel. J’ai dénoncé leur façon de faire à la Competition Commission. J’ai proposé d’utiliser notre diplomatie pour que d’autres compagnies desservent Port-Louis, comme Mitsui OSK, une ligne du Japon, et Cosco Line, qui est de la Chine. En Corée du Sud, les députés ont pris position pour combattre cela », avance-t-il.
« Le gouvernement », poursuit l’intervenant, « propose des subsides sur certains produits de base pour soi-disant soulager les petites gens, mais on offre ces subsides aux transporteurs avec le coût élevé du fret. Il y a de la marchandise qui coûte moins cher que le coût du fret à l’importation. »
De son côté, Suttyhudeo Tengur, président de l’Association pour la protection de l’environnement et des consommateurs (Apec), estime que le coût élevé du fret est « un gros problème » depuis la Covid-19. « Maurice ne contrôle pas le mode des opérations du commerce international. Par exemple, il y a eu un changement dans le mode de transbordement. Sans compétition, cela provoque une collusion. Dans le monde, il y a une restriction dans le rôle du transbordement et cela augmente les prix », dit-il.
Casser le monopole
« Maurice », poursuit-il, « doit tout faire pour que davantage de gros-porteurs fréquentent notre port, utiliser la SADC et le Comesa afin de créer une compagnie de transbordement régionale pour casser le monopole. Au lieu de proposer des subsides, on est en train d’engraisser les propriétaires de bateaux. » Suttyhudeo Tengur estime que trouver des bateaux est le travail de la State Trading Corporation (STC). « Au lieu de cela, li bwar disan konsomater. Elle aurait dû louer des bateaux pour transporter nos produits depuis belle lurette. »
Et cette hause du fret n’est pas prête de prendre fin, car semaine après semaine, elle prend l’ascenseur, selon les intervenants.
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