Déclarée morte depuis 1963 : Soomatee, 61 ans, ne peut pas compléter ses procédures administratives

Cela fait un an et demi depuis que Soomatee a appris des officiers de l’État civil qu’elle avait été déclarée morte depuis plus d’un demi-siècle. C’était lorsqu’elle était partie entamer ses démarches pour toucher sa pension de vieillesse après avoir eu ses 60 ans. Selon les dernières informations, le cas a été référé en Cour suprême.

Elle est toujours en vie ! Pourtant, aux yeux de l’état, Soomatee Narrain, 61 ans, est déclarée morte depuis 58 ans. C’est son fils, Kiran Narrain, résidant à Belle-Rive, Kewal Nagar, qui a approché la rédaction pour raconter ce fait étonnant. Sa mère, Soomatee, affectueusement appelée Devranee par ses proches, se retrouve dans une situation inimaginable. « Ma mère s’était rendue au bureau du ministère de la Sécurité sociale de Bel-Air lorsqu’elle a atteint l’âge de la retraite. Cela, pour formuler une demande de pension. Mais à sa plus grande surprise, les préposés de la Sécurité sociale lui avaient informée qu’elle était déclarée morte depuis 1963 », relate Kiran. Or, Soomatee Narrain est bel et bien vivante. 

Son fils poursuit que « les préposés nous ont alors référés à l’état civil de Port-Louis où les officiers nous ont référés à un avoué et un avocat pour un suivi de cette affaire. Depuis tout est au point mort et nous n’entendons rien ». Kiran explique que l’état civil a même demandé à ce que sa mère se présente régulièrement après chaque six mois à l’état civil pour prouver qu’elle est vivante.  

Le cas a été référé à la Cour suprême."

Cette anomalie a mis un frein à plusieurs formalités. « Depuis que ma mère a eu 60 ans, elle ne peut pas voyager gratuitement dans le bus, car sa pièce d’identité ne peut pas être renouvelée. Par ailleurs, ma mère souhaitait faire part d’un terrain à ses deux enfants. Lorsqu’elle m’a partagé son souhait, nous nous sommes rendus chez un notaire pour compléter les formalités, mais rien n’a pu être abouti », relate-t-il. Ce qui intrigue encore plus Kiran, c’est que sa mère s’est mariée civilement en 1988 et qu’elle a obtenu un dernier acte de naissance le 23 février 2012 avant que ce problème ne surgisse. 

Jaywantee, la sœur de Soomatee, est morte en 1963

Kiran n’est pas resté les bras croisés. Après avoir effectué des recherches, il a découvert qu’il y avait un décès au sein de sa famille en 1963. « Je me suis documenté en consultant nos archives familiales et j’ai appris que mon grand-père avait neuf enfants. Cinq d’entre eux sont décédés. Quatre filles sont toujours en vie, incluant ma mère. Il y avait un décès en 1963 et il s’agissait de la sœur de ma mère qui s’appelait Jaywantee et non pas Soomatee », avance Kiran. 

Ce dernier redoute le temps que prendront les procédures. « S’il arrive quelque chose à ma mère dans le futur, ce sera un gros problème pour nous. Cela ne nous permettra pas d’avoir un acte de décès, car il existe déjà un tel document à son nom », avance Kiran. Ce décès dans la famille en 1963 serait-il à l’origine du problème ?, s’interroge-t-il.

Le cas référé en Cour suprême par l’état civil

Contacté, Kervin Dindoyal, officier de l’état-civil, nous indique avoir déjà rencontré Kiran dans le passé. « J’avais pris connaissance du problème de sa mère lorsque je l’avais rencontré. Effectivement, un décès est enregistré au nom de Soomatee. Aussitôt que ce problème a été rapporté à l’état civil, des vérifications ont été faites. Nous avons constaté que le nom complet de Soomatee figure sur un acte de décès et que les noms de ses parents y sont également inscrits. Cela nous a interpellés. Le cas a été référé à la Cour suprême et c’est pour cette raison qu’il a obtenu une aide légale. Pour faire le suivi, il faudrait connaître le nom de l’avoué et de l’avocat pour savoir si le cas ira de l’avant », informe Kervin Dindoyal. 

Pour expliquer les raisons pour lesquelles une personne vivante a pu être déclarée morte, l’officier de l’état civil explique que ces cas affectent principalement les personnes âgées. « Le contexte, auparavant était différent de l’époque actuelle. Il y a plusieurs facteurs qui entrent en jeu. Ce problème date de 1963, soit quelques années avant l’indépendance. À cette époque, le niveau d’éducation était relativement bas. La plupart des familles vivaient dans des familles élargies (extended family). Une possibilité pourrait être qu’au moment (en 1963) de déclarer le décès d’un membre de la famille, un document avait pu être pris au hasard sans aucune vérification. C’est l’enquête qui élucidera ce problème. Je tiens aussi à informer qu’il n’y a pas lieu que Soomatee se présente à l’état civil chaque six mois. Il se pourrait que cette exigence soit du ministère de la Sécurité sociale. Par ailleurs, il sera malheureusement difficile de dire combien de temps prendront ces procédures au niveau de la Cour suprême », explique Kervin Dindoyal.

Toutefois, ce dernier a expliqué qu’un suivi du cas aura lieu afin de savoir où en est l’affaire. Un rendez-vous a aussi été arrangé pour Kiran afin d’obtenir des réponses à ses questions.