26 500 femmes sont au chômage. C’est ce que révèle les derniers chiffres de Statistics Mauritius. La situation risque de s’empirer et des observatrices plaident pour que les femmes soient encadrées sur le marché du travail.
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L’économiste Manisha Dookhony met en avant les conclusions d’une étude de la banque mondiale en début d’année. Elle révèle que plus de femmes que d’hommes avaient perdu leur travail à Maurice à cause de la pandémie.
« Les inégalités entre les femmes et les hommes dans le monde du travail ont été exacerbées pendant la pandémie de Covid-19. Tout porte à croire que ces inégalités persisteront dans un avenir proche », indique Manisha Dookhony.
Elle cite des chiffres de l’Organisation internationale du travail. Elles indiquent qu’il y a 13 millions de femmes en moins sur le marché du travail dans le monde en 2021 par rapport à 2019. Par contre, le nombre d’hommes au travail a retrouvé les niveaux de 2019.
« La croissance prévue concernant le nombre de femmes au travail en 2021 dépasse celle des hommes. Mais elle sera néanmoins insuffisante pour ramener les femmes au niveau d’emploi d’avant la pandémie », fait-elle observer.
Manisha Dookhony explique que le problème est multiple et que les femmes sont surreprésentées dans les secteurs les plus durement touchés. Il y a les services d’hébergement et de restauration et le secteur manufacturier. En comparaison, à Maurice dans le secteur financier par exemple, les femmes représentent autour de 60 % de l’effectif.
Selon elles, ce sont les subventions salariales (Wage Assistance Scheme) à Maurice qui ont aidé à maintenir une partie de l’emploi des femmes.
Dans certains pays, comme la Colombie et le Sénégal ont appliqué un taux de subvention plus élevé pour les femmes. Au Mexique ou au Kenya, des quotas ont été établis pour garantir que les femmes bénéficient des programmes publics d’emploi.
« Sans le Wage Assistance Scheme, la situation aurait été pire. Et je suis contente que le gouvernement ait décidé de l’étendre jusqu’à la fin de l’année. Ce qui permettra à certains secteurs de se renforcer et de ne plus dépendre du soutien du gouvernement. Mais pour éviter le pire, il faut continuer à investir dans le secteur de la santé, du travail social et de l’éducation. Car ce sont d’importants générateurs d’emplois pour les femmes », avance-t-elle.
Elle estime aussi que la grande expérience du « work from home » a été d’une certaine façon bénéfique aux femmes. Elle se prononce en faveur de l’extension de cette mesure, afin de permettre à plus de femmes de maintenir une activité rémunératrice. « Ce qui manque cruellement à Maurice c’est la participation des femmes dans les organes de décision. On le voit au niveau des budgets qui ne sont pas faits avec des « gender lens » », déplore-t-elle.
Davantage Burn-out chez les femmes
Un sondage de McKinsey & Company and LeanIn.org, rapporté par CNN, montre que la pandémie de Covid-19 a amplifié le burn-out chez la gent féminine à hauteur de 42 %.
Manisha Dookhony est d’avis qu’il est difficile pour les femmes de s’occuper de vie de famille, du travail, des enfants et des parents âgés. Quand une femme est à la maison, la perception est qu’elle n’est pas en train de travailler.
Il faut aussi savoir que beaucoup de femmes vivent des situations difficiles à la maison et que leur travail est une échappatoire. Il leur donne la possibilité de sortir, de parler à leurs amis, de marcher dans les rues, etc., fait-elle observer.
La syndicaliste Jane Ragoo déplore que les femmes soient considérées comme une armée de réserve. « Quand il y a la guerre et quand les hommes sont au front, c’est à ce moment qu’on réalise l’importance de la femme au travail. Sauf que quand il y a une maladie comme la Covid-19, les femmes sont considérées comme moins importantes que les hommes. Et ce sont les premières à perdre leur emploi », regrette Jane Ragoo.
Base de données
Elle précise que ce sont des femmes qui payent les pots cassés dans plusieurs domaines, comme les commerces, les magasins et les restaurants. Elles ont été remerciées à cause de la situation économique difficile.
« Les femmes sont très vulnérables sur le marché du travail. J’ai adressé une requête au ministère du Travail pour qu’il y ait une base de données. Il est nécessaire qu’elle soit explicite avec tous les détails des personnes qui ont perdu leur travail », préconise-t-elle. Elle pense qu’il est grand temps de prendre le taureau par les cornes.
Côté burn-out, elle concède que les femmes sont encore une fois vulnérables. « Il y a des femmes qui ont perdu leur travail, qui sont stressées et qui ne peuvent honorer leurs engagements financiers. Ce qui affecte leur mental », avance-t-elle. Elle est d’avis qu’il est grand temps d’accorder le soutien nécessaire aux femmes.
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