Dans un entretien exclusif au Défi Quotidien dans l’après-midi du vendredi 5 février, le chairman du conseil d’administration de la Mauritius Investment Corporation (MIC), explique le rôle de cet organisme, dont l’unique actionnaire est la Banque centrale. Natif de l’État du Gujerat, Inde, et membre de la House of Lords de la Grande-Bretagne, Lord Meghnad Desai balaie d’un revers de main les accusations contre la MIC. Extraits.
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État des lieux et procédures
Tourisme et manufacture dominent
Selon le dernier relevé en date, la Mauritius Investment Corporation a été en présence d’une centaine de demandes, la majeure partie venant des opérateurs engagés dans le tourisme et le textile. De ce nombre, ce sont 35 dossiers qui ont été approuvés. Le montant total du financement par le biais de la MIC est de Rs 16,5 milliards. Il nous revient que 15 demandes sont actuellement à l’étude.
Un long processus rigoureux
« La MIC reçoit des demandes qui sont rigoureusement évaluées selon des critères objectifs prédéfinis d’éligibilité. Un comité d’investissement passe en revue les bilans financiers de l’entreprise. Les membres analysent entre autres la qualité des actifs et le niveau d’endettement. Le comité aborde les perspectives du demandeur sur les dix prochaines années. (…) Ensuite, il est question du montant requis et de déterminer si cette somme serait accordée dans son intégralité ou en partie. Des discussions ont également lieu avec les banques avec lesquelles traitent les demandeurs. Par suite de cela, le comité d’investissement réfère les dossiers et les recommandations au conseil d’administration de la MIC.
L’argent de la MIC est destiné au fonds de roulement de l’entreprise demanderesse et à sauver et créer des emplois. Il n’est nullement question que cet argent soit utilisé pour couvrir les mauvais calculs financiers d’avant. (…) Et nous tenons à souligner que l’argent ne servira pas à payer des dividendes aux actionnaires.
La MIC a un mécanisme de suivi qui lui permet de s’assurer que les fonds avancés sont scrupuleusement utilisés selon le cahier des charges du MIC pour l’octroi du financement.
Après avoir passé toutes les étapes, le conseil d’administration est mis en présence du dossier. Notons que parmi les membres, nous retrouvons les deux adjoints au Gouverneur de la Banque de Maurice et deux représentants du secteur privé et un secrétaire. « A notre niveau, nous discutons des dossiers, de leur éligibilité selon les critères de la MIC. (…) Les recommandations du comité d’investissement sont examinés et, au cas où nous aurions besoin d’information ou d’éclaircissements additionnels, nous le demandons. Si nous sommes satisfaits avec les détails du dossier, nous donnons notre aval aux recommandations du comité d’investissement », soutient Lord Desai.
Profil des demandeurs et les facteurs de risque
« L’entreprise doit avoir Rs 100 millions de chiffre d’affaires à monter. Nous avons l’exemple d’un grand groupe – dont je ne mentionnerai pas le nom - qui a demandé un prêt pour une de ses subsidiaires. Nous sommes arrivés à la conclusion que cette entité n’a pas besoin de cet argent car il aurait servi à une autre transaction. Nous ne sommes pas bêtes. Donc, la MIC n’a pas approuvé le dossier parce qu’il nous a semblé que le prêt aurait permis de financer une acquisition hors de Maurice. Nous sommes conscients du fait qu’il y a toujours quelques-uns qui veulent jouer au plus fin…Dans l’ensemble, le processus est direct : les entreprises sont en difficulté, elles ont besoin de soutien et font une demande auprès de la MIC…»
Taux d’intérêt variant entre 3 % et 5 %
La Banque centrale détermine le taux d’intérêt dans l’économie. Et nos taux d’intérêt sont basés sur celle-ci. Ils se situent au niveau du marché et varient entre 3 % et 5 %. Sachez que nous permettons le remboursement du prêt à partir de la cinquième année. Certes, il est important qu’on obtienne le remboursement des prêts. Nous n’irons pas à un stade qui affaiblirait l’emprunteur. L’imposition d’un taux d’intérêt est de s’assurer que les demandeurs dépensent l’argent de manière prudente et réfléchie. (…) Nous rejetterons toute demande pour financer des acquisitions ou pour payer des découverts.
Le point sur les Rs 80 milliards
Des réserves internationales en jeu
Les fonds de la MIC proviennent des réserves internationales du pays que gèrent la Banque de Maurice. Dans un environnement mondial difficile, États et banques centrales multiplient les mesures peu orthodoxes. La MIC s’inscrit dans cette logique.
Au cours de la conversation initiale entre le Gouverneur de la Banque de Maurice et Lord Meghnad Desai, Harvesh Seegolam lui a expliqué que, dans le contexte d’alors, le retour sur les investissements à l’étranger était proche de zéro voire en territoire négatif. Le choix a été entre le maintien des réserves dans des investissements hors de Maurice et laisser péricliter les entreprises et laisser les Mauriciens mourir de faim. Ajouter à cela, il y avait une possibilité de contagion à la stabilité bancaire. A l’opposé, on se dit qu’on rapatrie une partie de cet argent, qu’on l’investit dans la sauvegarde des emplois avant que les entreprises ne mettent la clé sous le paillasson et avant que le secteur bancaire ne soit affecté. Il s’agit aussi d’investir dans l’avenir de Maurice.
Selon Lord Meghnad Desai, la MIC n’a pas à dépenser tout cet argent. La MIC n’existe que depuis huit mois. Si la pandémie du coronavirus est maîtrisée, particulièrement en Europe, et si les gens de ce continent ou des États-Unis peuvent voyager à Maurice et remplir les hôtels, ces derniers n’auront plus besoin de fonds additionnels et ils commenceront à nous rembourser. (…) Il se pourrait que dès l’été ou l’hiver (dans l’hémisphère Nord), des clients européens, américains ou même asiatiques viennent au pays. (…)
En ce qui s’agit du soutien aux entreprises systémiques, son souhait le plus cher est qu’après une période d’opération, les investissements effectués par la MIC commencent à générer du retour. Notre travail en matière de soutien aux entreprises cessera quand les gens ne demanderont plus d’argent à la Mauritius Investment Corporation pour sauver des emplois.
Il ne faut cependant pas oublier que l’aide aux entreprises impactées par la Covid-19 n’est qu’un des axes stratégiques de la MIC. En effet, il y aussi d’autres éléments selon la constitution de la MIC, notamment investir dans des entreprises d’avenir.
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