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Commission de Pourvoi en grâce : une loi-cadre pour définir son rôle, ses prérogatives et son fonctionnement réclamée

Le « manque de transparence » dans le fonctionnement de la Commission de Pourvoi en grâce et « l’opacité » autour des critères retenus pour accorder la grâce présidentielle ont été au centre des débats lors de l’émission Au Cœur de l’Info, avec Jean-Luc Emile, sur Radio Plus ce mardi 12 septembre.

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Une situation qui « passe mal », selon l’avocat Richard Rault, qui estime que la Commission ne peut simplement se contenter d’envoyer une lettre de refus. « Le Privy Council l’a souligné à maintes reprises, lorsqu’une décision est prise, il faut pouvoir justifier cette décision. Ce n’est pas possible qu’en 2023, nous nous arrêtions à un ‘voilà notre décision’. Les membres de la Commission sont payés des deniers publics. Ils doivent fournir un justificatif », estime l’avocat.

Lacune juridique

L’ancien magistrat Noren Seeburn impute cette situation à une « lacune juridique ». « Il n’y a pas de loi à Maurice pour réglementer les institutions de sorte qu’elles ont l’obligation envers la population et qu’au cas contraire, elles pourront être sanctionnées », fait-il remarquer. Noren Seeburn estime aussi que les institutions ne peuvent agir comme bon leur semble. « Toute décision d’une institution publique doit pouvoir être justifiée par l’intérêt public. Au cas contraire, il faut la démanteler », préconise-t-il.

Abondant dans le même sens, l’avocat Richard Rault déplore le manque d’une loi-cadre pour régir le fonctionnement de la Commission. « Il n’y a pas de procédure définie. Finalement, la Commission décide seule des critères et du caractère confidentiel, ou non, de ces décisions. Or, pour moi, les décisions doivent être motivées et communiquées à l’intéressé », est-il d’avis.

Recommandations

Pour l’ancien magistrat Noren Seeburn, l’avènement d’une loi-cadre serait la solution. Une loi qui, souligne-t-il, doit avant tout profiter au citoyen car selon lui, l’état d’esprit des dirigeants successifs du pays depuis l’indépendance n’aurait pas suffisamment évolué.

La loi-cadre préconisée devrait aussi définir les paramètres pour contester une décision de la Commission de Pourvoi en grâce. « Lorsqu’on veut contester une autorité, il faut généralement mettre en avant comment celle-ci a failli dans sa mission ou dans sa prise de décision. C’est ce qu’on appelle un ‘judicial review’. Or, dans le cas de la Commission, nous sommes dans le vide total », estime-t-il.

Rishi Bhoobun, responsable de soutien psychosocial de l’Association Kinouété, indique qu’une correspondance avait été envoyée en 2018 à la Commission. « En sus des critères, nous leur avons demandé ce qu’elle attend d’une personne qui sort de la prison, quels sont les documents à soumettre et dans quel format », déplore-t-il. Il explique que les ex-condamnés sont nombreux à faire des demandes auprès de la Commission de Pourvoi en grâce. « Ils ont besoin d’un certificat de moralité ‘propre’ pour pouvoir obtenir un travail ou pour immigrer à l’étranger, par exemple », dit-il. Il déplore cependant ce qu’il qualifie de « flou ». « Si un ex-condamné cherche sur Internet quelle est la procédure à suivre, il ne va rien trouver », soutient-il. Et d’ajouter : « Nous ne savons pas qui sont les membres qui composent cette commission ni sur quels critères ils se basent pour prendre une décision de gracier ou non une personne. C’est le flou », dit-il. Rishi Bhoobun indique que les demandeurs n’obtiennent qu’un accusé de réception et, dans la majorité des cas, une lettre de refus.

Le rôle du Président de la République 

« Je n’ai pas de raison suffisamment forte pour souhaiter que le fonctionnement de la Commission de Pourvoi en grâce soit revu ». Tel est l’avis de l’ancien président de la République, Barlen Vyapoory, lors d’un entretien réalisé par téléphone. Il a fait savoir que le président n’a pas son mot à dire lors des travaux de la Commission. « Le président de la République n’est pas tenu de donner son approbation [aux recommandations de la Commission] directement. Il a le droit de chercher des éclaircissements pour savoir si leur décision est valable et raisonnable, avant d’apposer sa signature », dit-il. Barlen Vyapoory concède cependant que même si le président de la République demande à la Commission de revoir leur décision, il devra au final donner son approbation, que la Commission change sa décision, ou pas.

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