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Chasse touristique à Maurice : une activité économique méconnue, mais à fort potentiel

Un touriste chasseur dépense entre 10 000 et 15 000 euros par séjour.

Chaque année, environ 300 touristes viennent à Maurice principalement pour la chasse. Bien que cette activité ne soit pas considérée comme un pôle touristique majeur, son impact sur l'économie mauricienne est significatif.

« Lionel Passion Guide », une entreprise spécialisée dans la chasse, accueille chaque année une centaine de touristes qui viennent à Maurice spécifiquement pour cette activité. Son directeur, Lionel Berthault, un technicien supérieur en gestion de la faune sauvage, a travaillé dans des fédérations de chasse en France, au Canada et en Alaska. « Nous recevons des touristes de plus de 15 nationalités pour chasser le cochon et le cerf à Maurice. Nous avons promu Maurice comme une destination touristique de luxe pour la chasse, attirant ainsi de nombreux clients qui pourraient choisir d'autres destinations touristiques comme la Martinique, les Seychelles ou Hawaï », souligne-t-il. 

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Selon Lionel Berthault, la chasse touristique génère des revenus pour l’économie mauricienne à plusieurs niveaux. « Les éleveurs de chiens, les vendeurs d'équipements de chasse, les zones de chasse, les assurances, les hôtels, les agences de voyages, les compagnies aériennes, ainsi que les emplois directs et indirects et la vente de viande aux bouchers, illustrent l'impact positif de notre activité », explique-t-il.

Le directeur de Hunting Mauritius, Jean François de Rosnay, partage cet avis. Depuis 2021, son entreprise accueille des touristes venant de France, de Slovaquie, de République tchèque, de Hongrie, d'Espagne et d'Afrique du Sud. « Il y a une forte demande de la part des chasseurs étrangers pour chasser à Maurice, notamment en raison de la présence du cerf Rusa, une espèce indigène introduite par les Hollandais au XVIIe siècle », explique-t-il. Les chasseurs étrangers profitent des paysages magnifiques du pays pour faire des randonnées dans la nature. « Ces clients sont principalement des touristes haut de gamme, séjournant dans des hôtels cinq étoiles. Ils optent pour des forfaits en demi-pension et déjeunent dans les restaurants locaux. Aussi, ils dépensent beaucoup en shopping », ajoute l’intervenant. En effet, il précise qu’un chasseur étranger dépense seulement 15 % de son budget pour la chasse, et 85 % dans d'autres activités économiques, affirmant ainsi que la chasse touristique a un effet positif en cascade sur l’économie mauricienne. Cependant, Jean François de Rosnay soutient que si la chasse n'était pas possible à Maurice, ces touristes iraient ailleurs.

Appel à la promotion

Selon les deux directeurs, la chasse touristique est une activité à fort potentiel qui pourrait être davantage développée à Maurice. Cependant, ils déplorent que ce créneau ne soit pas reconnu comme une activité touristique par les autorités. « Nous comprenons que les autorités hésitent à promouvoir cette activité de peur d'être blacklistées par les associations anti-chasse à l'échelle internationale », avance Lionel Berthault. Il demande toutefois que les démarches pour obtenir les permis et les autorisations annuelles de chasse soient facilitées, et que son activité soit reconnue par le gouvernement, même avec une patente annuelle à payer. 

Jean François de Rosnay est du même d’avis. « Nous participons souvent à nos frais à des foires internationales pour promouvoir non seulement la chasse mais aussi la destination mauricienne dans son ensemble. Il faut compter au moins Rs 700 000 pour participer à de tels événements », indique-t-il. Le directeur demande que les autorités facilitent ces procédures. 

Jean François de Comarmond, un chasseur mauricien, soutient également qu'il y a un intérêt croissant des étrangers pour la chasse à Maurice, avec de nombreux professionnels mauriciens participant à des salons internationaux. « Il faudrait encourager les entreprises mauriciennes dans ce domaine à participer à plus de salons d'expositions et à les soutenir », suggère-t-il.

Un touriste chasseur dépense entre 10 000 et 15 000 euros par séjour

 Lionel Berthault indique qu’une partie de chasse commence à partir de 350 euros et qu’un touriste dépense en moyenne 3 000 euros pour cette activité. « En ajoutant à cela quatre billets d'avion pour un total de 4 000 euros, un séjour à l'hôtel à 5 000 euros, des excursions en mer, la pêche et des visites avec des taxis locaux pour 1 000 euros, on peut estimer qu’un chasseur étranger dépense environ 13 000 euros par séjour », précise le directeur. Il ajoute que certains reviennent plusieurs fois et achètent même des villas dans les grands ensembles immobiliers. 

Jean François de Rosnay confirme ces chiffres. « En moyenne, un chasseur étranger dépense entre 10 000 et 15 000 euros pour un séjour de sept jours à Maurice », affirme-t-il. Cependant, il mentionne que certaines catégories de touristes, notamment les Russes, peuvent dépenser entre 5 000 et 6 000 euros uniquement pour la chasse.

Lindsay Morvan, directeur du Tourism Authority : « La chasse n’est pas officiellement enregistrée comme un pôle d’activité touristique »

Le directeur de la Tourism Authority affirme que la chasse n’est pas officiellement enregistrée comme un pôle d’activité touristique à Maurice. « D’ailleurs, jusqu’à présent, il n’y a aucun permis qui a été délivré aux opérateurs pour pratiquer le tourisme de chasse dans le pays », souligne-t-il. 

Cependant, il concède qu’il y a des touristes qui viennent à Maurice pour profiter des vacances en famille et participent en même temps à des parties de chasse. « L’organisation des chasses pour les touristes se fait entre les propriétaires des chasses et les tour-opérateurs ou les hôteliers », avance-t-il. 

Toutefois, cette activité n’est pas illégale car les propriétaires de domaines de chasse ont les permis requis pour organiser des parties de chasse. « Cependant, ils doivent s’assurer que toutes les normes et réglementations soient rigoureusement respectées », explique Lindsay Morvan. Par ailleurs, il fait comprendre que jusqu’à présent, la Tourism Authority n’a reçu aucune demande officielle pour obtenir un permis de tourisme de chasse.

En chiffres

  • 5 sociétés sont spécialisées dans l’organisation de chasses pour les touristes à Maurice. 
  • 300 chasseurs étrangers viennent à Maurice en moyenne chaque année. 
  • 10 000 à 15 000 euros (Rs 507 000 à Rs 760 000) : c’est la fourchette du montant dépensé par un chasseur étranger lors d’un séjour de 7 jours à Maurice.
  • 3 à 4,5 millions d’euros (Rs 152 millions à Rs 228 millions) : c’est le revenu généré par le tourisme de chasse à Maurice par an.

Les procédures à suivre

Les touristes souhaitant chasser à Maurice doivent fournir une copie de leur passeport, une copie de leur permis de chasse, et remplir et signer un formulaire. Ce formulaire permettra au propriétaire de la zone de chasse de faire une demande accompagnée d'un affidavit d'un membre de la compagnie de la zone de chasse, à remettre aux Casernes centrales. L’autorisation est délivrée dans un délai de 15 jours. 

Lionel Berthault indique qu’autrefois, les permis étaient délivrés en 48 heures. « Maintenant, si un client venant à Maurice m’envoie son permis le 1er juin et repart le 12 juin, il ne pourra pas chasser », déplore-t-il. Par ailleurs, chaque permis est nominatif et limité à une zone spécifique. Ainsi, un client qui chasse dans une zone doit obtenir un autre permis pour chasser dans une autre zone. « Imaginons que la zone n'ait pas le gibier escompté, il n'est pas légalement autorisé à chasser ailleurs. Pourquoi ne pas instaurer un permis national comme en France, qui permettrait une liberté de mouvement entre les différentes zones privées ? », suggère l’intervenant.

 

 

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