
Le gouvernement britannique fait face à des appels à l’aide pour soutenir les Chagossiens ayant besoin d’un logement temporaire, après une arrivée massive de ressortissants venus faire valoir leur droit à la citoyenneté britannique. C’est ce que rapporte la BBC sur son site Web ce dimanche.
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Le conseil municipal de Hillingdon a indiqué que 152 Chagossiens étaient arrivés à l’aéroport d’Heathrow, situé dans le district, au cours de la semaine - portant le total à plus de 600 depuis juillet dernier.
Le conseil, dirigé par les conservateurs, affirme qu’il s’attend à dépenser 2 millions de livres sterling cette année pour remplir son devoir légal d’assistance envers les Chagossiens sans abri, ce qui exerce une forte pression sur les ressources en logement déjà limitées et « met en péril » ses finances.
Beaucoup de Chagossiens viennent de Maurice, affirmant qu’ils ne s’y sentent plus en sécurité depuis que le gouvernement britannique a conclu un accord prévoyant la rétrocession de l’archipel des Chagos au pays.
Le gouvernement britannique a déclaré que les Chagossiens étaient censés organiser eux-mêmes leur hébergement avant leur voyage, tout en soutenant que l’afflux récent d’arrivants n’avait “aucun lien” avec l’accord sur les îles Chagos conclu avec Maurice.
Les îles Chagos, situées dans l’océan Indien et alors territoire britannique d’outre-mer, ont été transformées en base militaire dans les années 1960, contraignant toute la population à quitter les lieux, principalement vers Maurice et les Seychelles.
En 2002, un nombre limité de Chagossiens ont obtenu le droit à la citoyenneté britannique complète. Plusieurs milliers vivent aujourd’hui au Royaume-Uni, dont environ 3 000 expatriés à Crawley, dans le West Sussex.
Puis, en novembre 2022, le gouvernement a lancé une nouvelle voie d’accès à la nationalité britannique, élargie à toutes les personnes d’origine chagossienne, où qu’elles résident dans le monde, leur permettant d’être reconnues comme citoyens britanniques sans frais.
Les adultes disposent de cinq ans, à partir du 23 novembre 2022, pour réclamer la nationalité britannique. Les enfants nés pendant cette période de cinq ans ont, quant à eux, jusqu’à leurs 23 ans pour en faire la demande.
Cette mesure a été adoptée avant la décision du gouvernement britannique, prise cette année, de signer un accord transférant la souveraineté des îles Chagos à Maurice.
Dans le cadre de cet accord, le Royaume-Uni s’est engagé à verser 101 millions de livres sterling par an pendant 99 ans afin de conserver le contrôle de la base militaire américano-britannique construite sur Diego Garcia, la plus grande des îles.
Cet accord est très mal perçu par de nombreux Chagossiens, qui y voient une trahison. Ils souhaitent que le Royaume-Uni conserve sa souveraineté sur l’archipel afin qu’ils puissent un jour retourner sur leur terre natale.
Certains craignent même d’être poursuivis par les autorités mauriciennes pour avoir exprimé leur soutien à la souveraineté britannique sur les Chagos.
Damien Dursonial, 35 ans, est arrivé mercredi dernier à l’aéroport d’Heathrow avec sa femme et leurs deux enfants âgés de quatre et six ans.
Né à Maurice, où il travaillait comme constable de police, M. Dursonial a économisé pendant deux ans et vendu sa moto pour financer les billets d’avion vers le Royaume-Uni.
« Je suis venu au Royaume-Uni parce que c’est le seul endroit où nous pouvions nous sentir en sécurité, respectés et reconnus comme citoyens britanniques », a-t-il déclaré.
« En tant que Chagossiens à Maurice, nous faisions face à de réelles menaces rien qu’en nous identifiant comme Britanniques ou en soutenant la souveraineté du Royaume-Uni sur les îles Chagos. »
M. Dursonial et sa famille ont été placés en hébergement temporaire par le conseil municipal de Hillingdon, dans l’ouest de Londres.
Mais il ajoute :
« Ce travail aurait dû être pris en charge par le gouvernement, car tout repose aujourd’hui sur une collectivité locale.
Le conseil a dû dépenser environ 1,2 million de livres sterling, alors que les ministres offrent à Maurice à la fois l’archipel des Chagos et l’argent du contribuable britannique. »
Le conseil municipal de Hillingdon affirme qu’il risque la faillite et a déposé une demande d’aide financière exceptionnelle auprès du gouvernement britannique.
Il cherche à réduire ses dépenses de 38 millions de livres sterling cette année — le plus important plan d’économies jamais entrepris par la collectivité.
« Cela est en train de briser le conseil », a déclaré Steve Tuckwell, membre du cabinet chargé de l’urbanisme, du logement et de la croissance, au sein du conseil dirigé par les conservateurs, dans une interview à la BBC.
« Cela prive les services essentiels de l’argent durement gagné par les contribuables. »
M. Tuckwell, ancien député conservateur, a indiqué que le conseil avait écrit aux ministres pour demander des fonds destinés à soutenir les Chagossiens, mais n’a reçu aucune réponse.
« J’en appelle au gouvernement pour qu’il fasse ce qu’il faut », a-t-il ajouté.
« Il faut cesser de faire peser ce fardeau sur les contribuables de Hillingdon. Le compte en banque est presque à sec. »
Les îles Chagos sont sous contrôle britannique depuis 1814 et ont été officiellement érigées en territoire britannique d’outre-mer après que Londres eut racheté l’archipel à Maurice en 1965.
Les habitants ont été expulsés entre 1967 et 1973 afin de permettre la création d’une base militaire conjointe américano-britannique sur Diego Garcia.
On estime aujourd’hui la population mondiale des Chagossiens à environ 10 000 personnes, dont beaucoup vivent à Maurice, aux Seychelles ou au Royaume-Uni.
Vanessa Mandarin Calu, membre de l’organisation Biot Citizen, explique que de nombreux Britanno-Chagossiens s’installent temporairement au Royaume-Uni en attendant de pouvoir rentrer sur leur terre natale.
« Notre patrie est un territoire britannique d’outre-mer - le gouvernement devrait établir une voie claire pour les Britanno-Chagossiens au lieu de céder notre territoire à un autre pays sans nous consulter », a déclaré Mme Mandarin Calu.
Le conseil municipal de Hillingdon a ouvert cette semaine un centre temporaire de traitement dans le borough afin de gérer l’afflux de Chagossiens arrivant au Royaume-Uni.
Les autorités locales ont le devoir légal d’aider les personnes éligibles qui se retrouvent sans domicile et de fournir un logement temporaire aux familles avec enfants à charge.
En tant que citoyens britanniques, les personnes d’ascendance chagossienne ont droit au même soutien que n’importe quelle autre personne sans-abri possédant un passeport britannique.
Le conseil indique qu’il rencontre déjà des difficultés pour soutenir les demandeurs d’asile placés dans le borough par le Home Office.
Un porte-parole du gouvernement a déclaré :
« Les Chagossiens voyageant vers le Royaume-Uni doivent prévoir leur propre logement avant leur arrivée.
Le conseil de Hillingdon a reçu des fonds pour apporter un soutien dans les cas où des pressions locales immédiates se présentent et ne peuvent être résolues par les mesures de contingence standard, le soutien à l’ensemble des autorités locales étant continuellement réévalué.
Cela n’a absolument aucun lien avec l’accord sur la base militaire de Diego Garcia signé avec Maurice.
En novembre 2022, le précédent gouvernement avait lancé une procédure de citoyenneté britannique pour les descendants des personnes nées dans l’archipel des Chagos. L’accord de Diego Garcia n’a aucun impact sur cette procédure ».

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