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55 ans d’indépendance de Maurice : regard sur l’avenir 

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L’île Maurice célèbre ce dimanche 12 mars ses 55 ans d’indépendance. L’occasion de faire une perspective des secteurs clés. Tour d’horizon.


Géopolitique - Avinaash Munohur : « C’est à nous de nous adapter » 

avinaash munohurAvinaash Munohur, politologue et consultant en stratégies politiques, pense qu’il est clair que notre pays approche un tournant historique. La pandémie de COVID-19, la crise de la globalisation qui s’en est suivie et la guerre en Ukraine ont ouvert une séquence historique qui dictera un certain nombre de bouleversements dans les rapports économiques et géopolitiques de la globalisation. 

Maurice sera, selon lui, directement impacté par ces bouleversements au vu de sa très grande connexion à l’économie globale. Avinaash Munohur estime qu’on ne peut pas comprendre les phénomènes locaux de manière sérieuse sans tenir compte de ce qui se passe dans le monde. « De ce point de vue, Maurice n’est pas du tout insulaire. Ce n’est pas une île isolée du reste du monde. À partir de là, lorsqu’on s’interroge sur l’avenir de Maurice, il me semble évident qu’il sera conditionné par un certain nombre de tendances mondiales », explique-t-il. 

Le consultant avance que sur le plan géopolitique, nous voyons émerger un bloc mené par la Chine qui constitue aujourd’hui une alternative de plus en plus crédible au modèle de la globalisation portée par les États-Unis. Selon lui, un nombre croissant de pays font, depuis quelques années, le choix de la coopération avec les institutions chinoises, notamment dans le cadre de la Belt and Road Initiative (projet majeur initié par la Chine pour accroître la connectivité et la coopération de la région eurasiatique ; NdlR). 

« Ceci aura des répercussions directes sur des pays non alignés comme Maurice puisque nous serons en face de la possibilité de travailler avec d’autres puissances pour nos projets de développement. L’avantage de Maurice, dans ce contexte, est que nous avons le choix de faire notre shopping auprès de plusieurs acteurs sans jamais mettre tous nos œufs dans le même panier », dit-il. 

Avinaash Munohur souligne que cette stratégie du non-alignement a toujours très bien fonctionné pour Maurice. Pour lui, il n’y a aucune raison de sortir de ce cadre. Cependant, il pense que ces coopérations auront une incidence directe sur notre économie et sur la sécurité de notre région. 

Il indique que c’est facile de constater que les coopérations avec les partenaires économiques historiques de Maurice – notamment la France et le Royaume-Uni – sont en recul. « Nous constatons une présence moins dominante de ces pays au profit de vastes projets avec l’Inde, la Chine et le Japon notamment. Ceci se traduit par des accords commerciaux et des pactes sécuritaires, la négociation pour le retour de l’archipel des Chagos pouvant également nous ancrer dans les intérêts sécuritaires états-uniens si elle aboutit », indique le politologue. 

Opportunités 

Il ajoute que tout ceci contribue à faire de Maurice un point hautement stratégique pour la région, notamment pour les flux de marchandises, de personnes et de capitaux allant du continent asiatique vers le continent africain et vice versa. « C’est exactement là que se situe en réalité notre avenir : comme le point de passage obligé de ces flux. Ces flux transformeront notre économie mais aussi la société mauricienne. Plus ils s’intensifieront, plus il y aura d’opportunités à saisir pour Maurice », précise Avinaash Munohur. 

Il estime que pour pouvoir les intensifier, il faut investir dans de vastes projets d’infrastructure, dans tous les sens de ce terme. « Le développement portuaire, la numérisation de l’économie ainsi que le développement de l’intelligence artificielle et des télécommunications constituent des priorités tout aussi cruciales que les développements en matière d’infrastructures routières et énergétiques », dit-il. 

Au final, le politologue est d’avis que nous devons relever ce pari, car la globalisation est en marche et elle ne nous attendra pas. « C’est à nous de nous adapter afin de saisir les opportunités qui seront les nôtres. »


Politique : Jack Bizlall : « La deuxième République est cruciale » 

jack bizlallAvant de se pencher sur l’avenir, il faut regarder dans le rétroviseur. C’est que pense l’observateur Jack Bizlall. « L’indépendance n’était pas réclamée par l’ensemble de la population en 1968. Tout s’est joué lors des élections de 1967. Un parti politique, le PMSD, a menti à la masse alors que l’Angleterre n’avait pas offert une intégration quelconque. 44 % de la population a voté pour l’intégration. 56 % pour le PTr-CAM-IFB et encore une fois basé sur un mensonge. Ce n’est pas l’Angleterre qui a donné l’indépendance. Ce sont les États-Unis qui ont forcé l’Angleterre pour une séparation des îles, en particulier les Chagos », raconte le syndicaliste. 

Il ajoute qu’en 1967, il était étudiant au Teachers’ Training College. En 1968, à l’heure de l’indépendance, il était enseignant. « J’ai suivi tous ces événements. Je peux dire qu’en tant qu’enseignant, j’étais peu enclin à chanter l’hymne national et à porter le drapeau mauricien », se souvient-il. 

Jack Bizlall avance qu’il y avait trois raisons particulières à cela. La première, dit, est qu’« on a eu l’indépendance sur le dos des Chagossiens qui ont été délogés de leur pays ». Il ajoute que leurs animaux domestiques ont été massacrés. « On les a forcés à venir à Maurice où ils ont vécu pendant des années dans une situation précaire. » 

En tant que député de la circonscription n° 1 (Port-Louis Ouest-GRNO), il a côtoyé bon nombre de Chagossiens déracinés de leur île natale. Jusqu’aujourd’hui, il avoue ne pas digérer le sort de ces derniers. 
La deuxième raison qu’il évoque est que Maurice a obtenu son indépendance mais il n’est pas passé République. « On a eu une monarchie constitutionnelle négociée avec l’Angleterre et non avec les Mauriciens de l’époque. On nous a donné une Constitution qui n’a pas changé. Bien qu’elle ait subi des amendements, elle n’a jamais été réécrite. C’est d’ailleurs mon combat pour la 2e République et une nouvelle Constitution », indique-t-il. 

Période très difficile 

La troisième raison qu’il avance est la situation économique drastique. « On a vécu une période très difficile », se souvient-il. C’est cela qui l’a incité à se joindre à la lutte du Mouvement militant mauricien (MMM) en 1972, et ce bien que sa famille fût une fervente travailliste. Il confie avoir été très vite « déçu » car le parti avait dévié de son programme. 

Il a quitté le MMM en 1980. Il a siégé en indépendant. « Depuis, je ne me mêle pas des partis politiques traditionnels. Je suis resté un révolutionnaire. Cependant, l’indépendance m’a permis de me construire en tant que syndicaliste et d’intervenir pour améliorer les conditions de travail et le niveau de vie. Nous avons remporté pas mal de batailles. J’attends toujours que les étudiants d’aujourd’hui se réveillent », espère-t-il. 

Jack Bizlall revient sur sa décision de soutenir trois choses : une nouvelle Constitution, une deuxième République et la sortie d’un système éducatif d’insertion à l’assertion. « Une deuxième République est cruciale et indispensable accompagnée d’une nouvelle Constitution votée par le peuple. Cela mettra fin à la dictature, à l’oligarchie et à la dynastie sur nos têtes », déclare-t-il. 

Pour lui, il est impérieux de venir avec un programme où l’économie se trouverait au service du social. « J’ai 76 ans. J’espère qu’on pourra faire avancer les choses », ose-t-il espérer.


Éducation - Jacques Malié : « Il faut éliminer la disparité criarde » 

La scolarisation est obligatoire jusqu'à l'âge de 16 ans.
La scolarisation est obligatoire jusqu'à l'âge de 16 ans.

Au fil du temps, l’éducation est demeurée une priorité et une préoccupation constante pour tous les acteurs du domaine à Maurice. Ce sont là les propos du pédagogue Jacques Malié. « Nos décideurs ont dès le départ compris la nécessité d’investir dans les ressources humaines. Nous avons ainsi pu bénéficier de l’éducation gratuite, du transport gratuit et des livres de classe. Il y a une multitude d’écoles d’État, d’écoles confessionnelles, d’institutions privées et autres. La scolarisation est obligatoire jusqu’à l’âge de 16 ans », énumère-t-il. 

Il avance que le développement s’est étendu au secteur tertiaire avec des universités locales qui sont très demandées et qui offrent des cours variés gratuitement. Le pédagogue cite l’exemple de l’Open University of Mauritius qui dispense des cours à distance, permettant en même temps aux bénéficiaires d’être employés. « L’idée de centraliser toutes les universités en un seul et même lieu, dans un ‘educational hub’ à Côte d’Or afin de décongestionner Réduit, est à retenir », recommande Jacques Malié. 

Il poursuit que les réformes se sont succédé, en donnant parfois lieu à des controverses. Ce qui, dit-il, est normal en matière d’éducation. « Néanmoins, nous devons impérativement combler des lacunes encore trop évidentes. Déjà, il faut éliminer la disparité criarde au niveau de nos institutions. C’est faux de dire que toutes se valent. S’il y a l’accès à l’éducation, tous les élèves ne bénéficient pas de l’égalité des chances, que ce soit au niveau primaire ou secondaire. L’éducation inclusive n’existe pas », se désole le pédagogue, qui précise que cela se reflète dans les résultats. 

Il se pose d’innombrables questions. Primo, comment faire pour que le plus grand nombre réussisse sans pour autant baisser le pourcentage de « pass mark » au niveau des examens du Primary School Achievement Certificate ? Secundo, comment expliquer la chute drastique du pourcentage à la fin du cycle primaire et celui de réussite au niveau des examens de Cambridge ? « Les chiffres sont éloquents. » Il pose une autre question pertinente : « Où sont passés les deux tiers des élèves qui n’arrivent pas à terminer le cycle secondaire ? »  

Jacques Malié évoque un autre souci majeur : comment rendre l’école attrayante ? « Là aussi la différence ne réside pas seulement dans les infrastructures et les aménités à pourvoir. L’entretien devient un vrai casse-tête pour les responsables des établissements scolaires et les moyens sont limités », s’attriste-t-il. 

Le pédagogue est également d’avis qu’au-delà de l’aspect physique et l’accueil, il y a aussi le rôle même de l’école. « Les derniers événements en matière de comportement et de discipline chez nos jeunes démontrent que l’accent est davantage mis sur l’aspect académique que sur l’instruction. L’éducation de l’élève, au sens le plus large, laisse beaucoup à désirer », avance Jacques Malié. 

Il estime qu’il est plus que temps d’apprendre à l’élève à se discipliner et à lui inculquer le sens des valeurs. Il pense aussi qu’il faut faire de l’école un lieu où on prend plaisir à aller, où on se sent accueilli et où il fait bon vivre. « Ce qui ne sous-entend pas seulement le bon déroulement des classes mais aussi une bonne participation active à de nombreuses activités extrascolaires, sportives ou récréatives. Cela permettra l’épanouissement et le développement intégral des élèves », plaide le pédagogue. 

 


TIC - Charles Cartier : « Nous avons le potentiel de devenir le premier pilier de l’économie »

charles cartier 1Le Vice-Président de l’Outsourcing and Telecommunications Association of Mauritius (OTAM), Charles Cartier avance que l’indépendance revêt une très grande importance. « L’industrie des technologies de l'information et de la communication (TIC) est l’une des rares à être née sous l’île Maurice indépendante. Nous avons connu une croissance très importante depuis l’an 2000. Aujourd’hui, nous sommes le troisième pilier de l’économie. Pendant le confinement, nous étions le deuxième pilier et un des apporteurs de devises étrangères du pays », explique-t-il. 

Pour lui, le secteur a un rôle important à jouer aujourd’hui, comme à l’avenir. « C’est la vitrine de l’innovation du pays. C’est le moyen pour nous de développer les industries de demain. Notre souhait pour l’indépendance est que nous continuons à grandir à Maurice », ajoute-t-il. Cependant, affirme-t-il, il y a des problèmes à régler pour y arriver, dont le manque de talents. « Il faut plus de talents et une réinvention. C’est cela qui va permettre à l’industrie des TIC de s’accroître et devenir encore plus importante. De surcroit, il faut pouvoir s’appuyer également sur la région et le continent africain dans ce sillage », précise notre interlocuteur. 

Charles Cartier est convaincu que cette industrie a le potentiel de devenir le premier pilier de notre économie. Pour cela, il soutient que nous devons réaliser ce potentiel en nous appuyant sur une masse de talent plus importante. Il souligne de plus qu’il existe de nombreuses opportunités pour nos jeunes. 

« Nous avons la chance d’avoir un secteur tertiaire qui joue un grand rôle dans la formation des jeunes pour qu’ils puissent rejoindre nos entreprises. Les possibilités au niveau des TIC sont très variées. Il y a des débouchés pour ceux qui ont étudié l’informatique, mais également pour ceux qui ont des profils scientifiques, notamment statisticiens ou encore ingénieurs », avance-t-il.

Charles Cartier poursuit quel que soit la formation ou l’expérience des personnes, les opportunités sont là pour tous, des extrêmement diplômés à ceux qui détiennent un HSC. « Le secteur des TIC a un impact sur la société mauricienne, en particulier sur tous les couches et niveaux de compétences », conclut notre intervenant. 


Industrie - François de Grivel : « La main-d’œuvre demeure une grande faiblesse » 

L'industrie sucrière n'a plus le même poids dans l'économie,
L'industrie sucrière n'a plus le même poids dans l'économie, 

François de GrivelL’industriel François de Grivel concède qu’un long chemin a été parcouru depuis l’indépendance. Il rappelle qu’on comptait un seul secteur d’activité, soit l’industrie sucrière, qui était à son top dans les années’ 75-85. Cependant, le secteur a été obligé de ralentir le rythme avec la baisse des prix et les nouveaux contrats qui n’avaient aucun intérêt financier pour les planteurs et les sucriers. 

« L’industrie sucrière a perdu son importance. De nouveaux secteurs ont émergé : manufacturier, hôtellerie et financier. Cela a énormément aidé à développer le pays en créant des emplois et des services. Cela a été un plus ces 30 dernières années, en sus d’être un gros avantage pour l’économie du pays », déclare François de Grivel. 

Il ajoute qu’il y a eu d’autres activités, comme l’investissement dans des biens immobiliers par des étrangers. Ce qui a rapporté beaucoup de devises. « Nous avons eu une activité complémentaire. Cependant, il y a des difficultés. La main-d’œuvre demeure une grande faiblesse. Elle est insuffisante dans divers domaines. Nous n’arrivons pas à assurer les productions et les services », estime l’industriel, qui estime qu’il faut miser sur la main-d’œuvre étrangère. 

François de Grivel se dit néanmoins satisfait qu’au niveau macro-économique, il y a eu des améliorations ces 55 dernières années sous tous les gouvernements qui se sont succédé. « Nous devons cependant être terre à terre. La réalité en 2023 n’est pas la même qu’en 2005. Les défis sont différents. Il y a de l’ordre à mettre. La démocratie, par exemple, est remise en question par des institutions internationales. Il faut redorer l’image de Maurice. L’Union européenne nous a rappelés à l’ordre pour que le pays ne soit pas classé comme paradis fiscal. Cela a duré deux ans », fait-il ressortir. 

L’industriel est toutefois d’avis que nous avons les compétences nécessaires qui permettront à Maurice d’aller vers des activités à valeur ajoutée. « Nous ne devons pas nous endormir. Il y a encore des efforts à faire. Nous avons la compétence et la possibilité de le faire. Cela s’applique à chaque individu. Nous ne devons pas choisir la facilité comme la vente de la drogue. Certes, entrer dans un secteur d’activité qui rapporte des finances au pays est compliqué, mais il ne faut pas tomber dans la facilité », conseille-t-il. 

François de Grivel plaide aussi pour que les institutions soient « rigoureuses ». « Que ce soit le système judiciaire, la police ou autre, il faut être extrêmement rigoureux. Il ne faut pas de subjectivité dans les analyses qui sont faites. Il n’y a pas de solutions immédiates, mais nous pouvons tous réfléchir et apporter des solutions concrètes et positives », conclut-il. 


Exportation - Lilowtee Rajmun-Jooseery : « Le secteur a acquis une résilience »

Le secteur de l'exportation est fort et diversifié.
Le secteur de l'exportation est fort et diversifié. 

lilowtee rajmun jooseery

La directrice de la Mauritius Export Association (Mexa), Lilowtee Rajmun-Jooseery, se réjouit que l’export dans sa globalité (textile, seafood, etc.) soit un des plus anciens piliers de l’économie. « Ce secteur a été actif pendant les cinq dernières décennies. Certes, il y a eu des hauts et des bas, mais il a toujours contribué à l’économie mauricienne. Durant la période de la Covid-19, on a continué à approvisionner le pays en devises étrangères. Et en 2022, nous enregistrons une performance historique, avec des exportations qui se chiffrent à Rs 50 milliards », déclare-t-elle. 

Elle se dit heureuse de l’importance qui est accordée au secteur de l’export. « On réalise que c’est un secteur fort et diversifié. Il y aura toujours des défis, vu que nous sommes à la merci des caprices internationaux. Cependant, nous sommes confiants, car le secteur a acquis une résilience et peut maintenant surfer sur n’importe quelle vague », poursuit notre interlocutrice. 

Lilowtee Rajmun-Jooseery pense qu’il faut diversifier encore plus pour amener davantage de valeur ajoutée à notre économie. Maurice, dit-elle, dispose d’un panier d’exportation de 10 produits clés, qui doit être étoffé. Toutefois, elle se désole d’un manque de visibilité. « Très peu de personnes connaissent Maurice pour l’exportation. Pourtant, nous fournissons de grands clients. Comparé à l’hôtellerie, on n’a pas assez de visibilité alors qu’on génère autant de revenus. »

La directrice de la Mexa souligne qu’on se concentre sur les marchés européen, américain et africain, alors que Maurice a des accords commerciaux avec d’autres pays et régions. Elle estime qu’il faut désormais explorer ces autres horizons.

La performance du secteur, ajoute-t-elle, est également freinée par la complexité des procédures de recrutement de la main-d’œuvre étrangère, et le coût de celle-ci. « Le système de permis de travail aux expatriés demeure obscur, opaque et long. En outre, le coût de la main-d’œuvre qui augmente affecte notre compétitivité. Les ‘policy makers’ doivent réaliser qu’il est impératif de préserver la compétitivité à tout prix », conclut-elle.


Santé - Dr Dawood Oaris : « Le privé est devenu un allié du public »

Maurice a un taux élévé de comorbidités chez les personnes élévées.
Maurice a un taux élévé de comorbidités chez les personnes élévées. 

dr dawood oarisLe président de l’association des cliniques privées, Dr Dawood Oaris, estime qu’il y a eu d’énormes progrès sur le plan de la santé ces 55 dernières années. « Le secteur public a commencé en 1968. Avant cela, l’État sucrier avait des dispensaires et des hôpitaux un peu partout. Avec le temps, ils ont fermé. Il ne reste que trois ou quatre dispensaires opérationnels que pour le out-patient », raconte notre interlocuteur. 

Il souligne que les types de maladies ont aussi évolué. Le Dr Dawood Oaris avance que, jadis, il y avait plus de maladies infectieuses avec des soldats et autres personnes qui venaient travailler à Maurice de l’étranger. « Après l’Indépendance, les mouvements ont diminué, réduisant par la même occasion les maladies infectieuses. Il y a aussi eu des traitements et des vaccins contre la malaria, la léproserie, la rougeole et autres. Il y a eu tant de progrès au niveau pharmacologie. Aujourd’hui, on a plus de comorbidités dont le diabète, l’hypertension, les maladies cardiovasculaires », rappelle ce dernier. 

Le Dr Dawood Oaris poursuit qu’on a également évolué sur le plan chirurgical. Avant c’étaient des simples chirurgies, alors qu’aujourd’hui, elles sont plus poussées et sophistiquées. « On est dans la sur-spécialisation avec des traitements contre le cancer. Tout a changé et s’est modernisé avec l’utilisation de la technologie. Des transplantations rénales sont pour bientôt. Des chirurgies complexes du cœur sont effectuées en sus des opérations congénitales ou encore l’implant cochléaire pour des bébés qui sont sourds. Il y a eu tant de progrès », met-il en exergue. 

Il fait aussi ressortir que le secteur public et le secteur privé collaborent. « Le privé a signé des accords avec le ministère de la Santé. Des malades qui ne peuvent être opérés dans le public, le sont dans le privé. Des emprunts sans intérêt sont offerts pour se faire traiter dans le privé. Il y a la formation du personnel soignant, dont les infirmiers. Le privé a aidé avec la vaccination contre la Covid-19. Le privé et le public sont des alliés », pense notre interlocuteur.


Art - Nirveda Alleck : « Rien n’a changé »

nirveda alleckL’artiste Nirveda Alleck ne fait pas dans la dentelle. Selon elle, depuis qu’elle est retournée au pays après ses études à aujourd’hui, rien n’a changé. « Il n’y a rien qui se fait au niveau du gouvernement, mais seulement suite aux initiatives des artistes. On n’espère rien des autorités. Moi je ne m’attends pas à ce que les choses bougent, si ce n’est pour nous proposer des projets irréfléchis. Par exemple, en marge de l’indépendance, on invite les artistes à venir peindre sur le waterfront, une activité pour les peintres du dimanche ! Or, pour des artistes qui ont fait des études poussées comme moi, il n’y a rien », s’indigne-t-elle.

Nirveda Alleck affirme que plusieurs propositions ont été faites pour que la situation s’améliore, mais en vain. « L’artiste n’attend pas que tout lui soit donné sur un plateau. Depuis le début de notre carrière, on apporte chacun notre pierre à l’édifice. Le mieux est de ne rien attendre des autorités pour ne pas être déçu. Firoz Ghanty s’est bagarré toute sa vie pour la cause des artistes. Il n’est plus de ce monde. Rien n’a changé ».

Elle avoue qu’il y a des collectionneurs mauriciens qui comprennent vraiment la signification réelle de l’art et investissent. De même, qu’elle s’est fait un renom à l’international à travers ses expositions et ses contacts. « Il est vrai que dans un passé lointain, j’ai reçu de l’aide du ministère des Arts et de la Culture, sauf qu’à cette époque, on croyait dans le talent mauricien. Certes, il y a des artistes qui bénéficient du National Arts Fund, mais on me l’a refusé à deux reprises. C’est le Mali qui a financé un de mes projets, un pays qui devient le centre d’art de l’Afrique de l’Ouest. Le gouvernement du Mali croit dans le pouvoir de l’art alors qu’à Maurice, on ne valorise pas les artistes », se désole notre interlocutrice.  

Nirveda Alleck, convaincue qu’on aurait pu tirer bénéfice de l’art, déclare en guise de conclusion : « Ici, tout se résume à la célébration culturelle et l’indépendance. L’art aurait pu être utilisé pour créer une cohésion sociale, mais pour cela, il faut de la volonté. Il faut réfléchir et penser à rendre notre société plus vivable et inclusive ».

 

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