Interview

Vidur Ramdin, directeur marketing au FSA : «Il faut partir en Afrique avec un état d’esprit différent»

Est-ce que les Mauriciens connaissent l’état des relations avec l’Afrique et les opportunités de travail qui y existent ? Les PME pourront-elles trouver des débouchés sur le continent africain ? Pour répondre à ces questions, il convient de cerner au plus près les réalités de ce continent. Vidur Ramdin compte parmi ces Mauriciens qui peuvent répondre à ces questions, grâce à ses fonctions de responsable de communication et directeur marketing au sein du Fonds de solidarité Africain.

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En quelques mots, quelles sont les fonctions du Fonds de solidarité Africain (FSA) ?
Ce qu’il convient de savoir, avant tout, c’est l’appartenance de Maurice à ce fonds, dont de la réelle possibilité de notre pays de bénéficier de son soutien financier.  Maurice est membre du Fonds depuis sa création il y a plus de 40 ans. La FSA n’est pas une banque, mais  une institution financière multilatérale de garanti pérenne disposant de plus de 40 ans dans la mobilisation des ressources et le financement des entreprises, et reconnue par la Banque de Maurice. Nous disposons d’un capital autorisé d’environ 229 millions d’euros, ce qui reflète  l’ambition des États-membres qui ont consenti à apporter des ressources et liquides à hauteur de 80 milliards de francs CFA additionnels pour appuyer les activités du FSA.

Est-ce que Maurice tire-t-elle bien avantage de sa contribution à ce fonds ?
Oui,  le Fonds a financé le Bulk Sugar Terminal à Port-Louis en 1982 et des projets de la NHDC en 2002. Cette année, vers fin juillet 2017, nous organisons un road show à Maurice et à Rodrigues afin de mieux faire connaître nos offres. Notre direction-générale veut s’assurer que nous sommes proches des secteurs public et privé dans l’accompagnement des PME.

Quels sont les types de demande de financement que le FSA reçoit de Maurice ?
Il faut citer la bonification de taux d’intérêt, qui est sous forme de subvention par laquelle le FSA prend en charge une partie des intérêts supportés par le bénéficiaire du prêt – allègement de la charge financière supportée par l’emprunteur ). Elle concerne l’État et ses démembrements.

Quels sont les objectifs de ce fonds ?
Il s’agit de faciliter le financement des projets d’investissement et participer à la lutte contre la pauvreté dans les États membres, promouvoir le financement des investissements publics et privés dans ses États membres, en sécurisant les crédits octroyés ; faciliter la mobilisation de l’épargne pour le financement de l’investissement, en sécurisant les opérations de levée de ressources sur les marchés financiers ; contribuer à l’émergence et au renforcement des fonds de garantie nationaux dans les États membres, pour l’appui notamment aux PME.

Comment Maurice est-elle perçue en Afrique ? Sommes-nous un État qui est toujours en situation de ‘miraculé’ ?
Il faut reconnaître que notre économie ne peut plus honorer les objectifs contenus dans la Mission Statement ainsi que celui du ministre des Finances dans le Budget 2016 visant une croissance de 5,5 % et la création de 100 000 emplois pour les jeunes ainsi qu’une croissance exponentielle dans le secteur du textile et l’économie bleue, sans oublier notre objectif d’atteindre un PIB par d’habitant supérieur à USD 13,500 en 2018, Toutefois, il faut préciser que l’état de l’économie mondiale ne s’y prête pas, avec la crise dans la zone euro, le Brexit, la dépréciation de la roupie vis-à-vis du dollar, entre autres. Même les pays comme le Rwanda et l’Ouganda éprouvent des difficultés de croissance.

Toutefois, dans la région africaine, en 2017, Maurice peut se prévaloir de bénéficier d’excellentes notations dont celle de la facilité à faire des affaires, un climat propice aux affaires, un haut niveau de liberté économique, une faible fiscalité, et un secteur financier stable, bien développé et profitable. Notre politique macro-économique est orientée vers le marché, notre économie est relativement diversifiée et plutôt résiliente envers les chocs extérieurs. Ce sont autant d’atouts qui devraient attirer les investissements étrangers et favoriser notre secteur des PME. Il faut que nous créons les conditions nécessaires pour avoir un pied en Afrique.

Mais est-ce que les entrepreneurs connaissent  bien les réalités du continent africain ?
Je n’ai pas encore ce sentiment. Il le faudrait pourtant, car avec une croissance impressionnante de plus de 6 %, une nouvelle classe de consommateurs composée de la petite bourgeoisie, des ressources en minerais quasi inexploitées et de vastes étendues de terres, on peut penser que l’Afrique demeure le continent le plus convoité. Les retours sur investissements sont plus hauts qu’ailleurs, mais le business n’est pas pour les timides et les stratégies d’investissements en Afrique ne doivent pas être conçues comme on le ferait en Occident. Il faut partir en Afrique avec un état d’esprit différent.

Y a-t-il de véritables perspectives d’ouverture d’affaires pour les PME mauriciennes ?
Absolument et dans de nombreux secteurs. Nous disposons de quatre atouts pour aborder positivement le marché africain : (1) notre expérience en affaires (2) notre niveau d’éducation (3) notre bilinguisme et (4) notre culture de persévérance au travail. En ce moment, l’Afrique est en pleine croissance, avec un marché d’environ un milliard d’individus. Les opportunités dans l’industrie alimentaire existent, entre autres, dans la transformation du maïs, le tournesol, le soja, le poisson et les fruits de mer, des jus de fruits, le secteur des boissons alcoolisées, des thés spéciaux et l’industrie du fertilisant. Je citerai aussi la possibilité de partenariats et de consortiums dans le secteur énergétique avec la fabrication de panneaux photovoltaïques et celle du bioéthanol et du bio-carburant, le secteur du tourisme, les Tics, les services financiers et légaux, la santé et l’assurance.

Qu’en est-il des conditions pour l’aboutissement de tels projets ?
C’est vrai que par moments, ce qu’on désigne comme The Rising Africa Story peut apparaître à portée de main, mais l’eldorado africain peut aussi être un cauchemar pour les investisseurs qui ne s’y sont pas préparés et peuvent rencontrer déceptions et défis. Je ne suis pas de ceux qui affirment que ces réalités sont loin derrière nous. Le plus gros obstacle que peuvent rencontrer en Afrique nos PME est l’accès aux marchés pour lesquels il y a une insuffisance d’informations. Certes nous possédons l’expertise nécessaire, mais il faut bien que quelqu’un soit chargé de la faire connaître des pays émergents. L’intervention du gouvernement mauricien est déterminante, comme le sont les gouvernements indien et chinois, qui sont présents en Afrique comme ils ne l’ont jamais été auparavant.

 

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