Interview

Père Jean-Claude Véder : «Il faut construire des ponts et non des murs»

Père Jean-Claude Véder

Dans son message qu’il a adressé aux Mauriciens avant de quitter Rome, pour entamer son 31e voyage apostolique au Mozambique, à Madagascar et à Maurice, le pape François a fait état de la diversité culturelle de Maurice qu’il considère comme une richesse. C’est un sujet qu’il ne manquera pas d’aborder estime le père Jean-Claude Véder, responsable de la messe au Monument Marie, Reine-de-la-Paix.

Publicité

Le pape François arrive à Maurice ce lundi 9 septembre. Qu’est-ce que ce voyage peut apporter au pays ?
Dans son message qu’il a adressé aux Mauriciens, avant d’entamer son voyage, il a parlé du vivre-ensemble. Je crois qu’il a quelque chose à apporter en tant que défenseur de la question du combat contre la discrimination. J’espère qu’il touche un mot aux autorités pour qu’il y ait plus de justice sociale et que nous soyons tous reconnus dans ce pays pour ce que nous sommes.

Ce qu’il va dire dans son homélie, lors de la messe au Monument Marie, Reine-de-la-Paix, va-t-il être différent du discours qu’il va tenir à la State House ?
Il a une grande liberté de parole dans le bon sens du terme. Il vient comme un sage. Sa sagesse est basée sur ce qu’il est lui-même dans son humanité et sa foi. Quand il va parler, il ne va pas dire ce que vous devez faire, mais délivrer un message que chacun peut accueillir à sa façon. 

Je crois qu’il a pour chacun, que ce soit au Monument Marie, Reine-de-la-Paix ou à la State House, une parole qui sera comme une petite graine qui sera mise en terre et qui va germer dans le cœur de tout un chacun. 

Le pape n’est pas un surhomme ou plus petit qu’un dieu»

Le souverain pontife ne va passer que quelques heures à Maurice. Qu’est-ce qui est prévu après sa visite ?
Depuis le début de son pontificat en 2013, le pape François a donné une orientation que l’Église a commencé à prendre. L’humanité a emboîté le pas également comme sur la question de l’écologie qui est la maison commune. Il y a aussi la question des migrants, du dialogue avec les autres, la paix. Comme les autres papes avant lui, il continue dans la même lignée. 

Il souhaite que l’Église soit missionnaire et non renfermée. Il n’arrête pas de dire cela. Quand le pape François va venir, il va confirmer tout ce qu’il dit par exemple pour les jeunes. Et là, on va l’entendre à Maurice dans le contexte du pays. 

Au Mozambique, il a dit aux jeunes : « vous êtes le présent et non pas l’avenir ». Il leur a fait comprendre qu’ils ont la possibilité aujourd’hui de vraiment changer les choses. C’est une parole forte et je pense que c’est ce qu’il va faire à Maurice et qu’il y aura aussi un après-pape. 

Il va nous dire des choses qui vont nous confirmer dans ce que nous faisons. J’espère qu’il va nous bousculer sur ce que nous ne faisons pas assez. Il y a des choses qui sont peut-être difficiles à mettre en pratique.

C’est-à-dire ?
Le pape François parle beaucoup du vivre ensemble par exemple. On peut s’interpeller, est-ce qu’il y a un véritable vivre-ensemble dans notre pays ou est-ce simplement une cohabitation qu’on présente sur une carte postale comme un modèle de cohabitation pacifique ? Est-ce que c’est vraiment le cas ? Le pape peut nous demander si nous vivons comme il faut ce que nous considérons être un vivre-ensemble.

Il parle aussi de la proximité. Est-ce que nous vivons un vivre-ensemble proche ? Trop souvent, on se côtoie sans véritablement se rencontrer. Comme les couleurs de l’arc-en-ciel, on ne se mélange pas. Est-ce qu’il y a vraiment ce pas pour rencontrer et connaître l’autre, apprécier sa culture et faire route ensemble ?

Le vivre-ensemble ce n’est pas cela selon le pape François. Il dit qu’il ne faut pas construire des murs, mais des ponts. À Maurice, est-ce qu’on construit des ponts ou y a-t-il des murs ? Dans notre pays, on construit de plus ne plus de murs dans les morcellements, par exemple, et on se barricade. Il y a une interpellation que le pape va nous proposer et il faut être disponible pour l’accueillir. 

Certains ne comprennent pas les mesures de sécurité mises en place pour ce qu’ils considèrent n’être qu’un homme d’Église, alors qu’il est aussi un chef d’État. Pouvez-vous nous expliquer ce double statut ?
Le Vatican est un État où se trouve le siège de l’Église catholique. Le pape représente les catholiques, il est donc un homme important. Il se situe dans la lignée des successeurs de Pierre qui a reçu la mission du Christ. 

Aujourd’hui avec le contexte nouveau, dans lequel nous nous trouvons, des mesures de sécurité sont nécessaires. Avec sa visite, il faut donc assurer sa sécurité ainsi que celui de son entourage. Son message est proprement universel et je pense que c’est ce qui fait qu’il est un homme aussi protégé. Partout où il va, c’est pour délivrer un message authentique. Peu de personnes sont capables de cela. C’est ce qui dérange aussi.

Au-delà de tout cela, il y a un côté qui me frappe chez le pape François, c’est sa simplicité. Il peut avoir beaucoup de sécurité autour de lui, mais l’homme reste humain et simple. Il se dit pécheur et il peut s’arrêter dans la foule auprès d’un enfant, un malade et dire une parole qui va toucher. Je crois que c’est cela qui fait qu’il y a aussi tout cela autour de lui.

Il y a également un engouement autour de lui pour recevoir sa bénédiction. Il représente ce que le Christ a voulu apporter sur la Terre. C’est ça qu’il faut prendre en considération. Il se situe dans la lignée d’un messager du Christ. Le pape n’est pas un surhomme ou plus petit qu’un dieu. Il n’aime pas ça, mais veut montrer une proximité que Dieu est avec nous.

 

Notre service WhatsApp. Vous êtes témoins d`un événement d`actualité ou d`une scène insolite? Envoyez-nous vos photos ou vidéos sur le 5 259 82 00 !