Le pays est encore en émoi depuis que la policière, Dimple Raghoo, a été tuée de sang-froid, alors qu’elle était en pleine fonction le mardi 24 novembre. Cette jeune femme est devenue le symbole même de la bravoure. Comme elle, nombreuses sont les femmes qui ont choisi un métier à risques, soit par pur hasard de la vie ou par vocation ou déclic. Elles exercent leur métier dans des domaines comportant un certain danger. Dans d’autres secteurs, leur présence demeure encore minoritaire. Pourtant, cela ne les empêche pas de se donner à fond dans leur métier. Cette semaine, nous rendons hommage à ces dames de fer évoluant dans divers secteurs où le danger guette.
Indira Bhugobaun, inspectrice de police : «Être une policière de proximité»
Plus de deux décennies depuis qu’elle se dévoue corps et âme. De constable à inspectrice, Indira Bhugobaun qui est en charge de la Crime Prevention Unit (CPU) a toujours été guidée par son amour pour son pays et son envie de se mettre au service des autres.
En 1996 quand Indira Bhugobaun intégra la force policière, elle prit au dépourvu les membres de sa famille. « Être policier n’est pas un métier comme les autres. J’ai toujours été attirée par l’uniforme et inspirée par le côté social de ce métier », raconte notre interlocutrice.
Cela fait 24 ans qu’elle se dévoue chaque jour à servir le peuple. Petit à petit, elle a gravi les échelons en sus d’avoir fait un passage dans plusieurs postes de police et département de la police. « J’ai travaillé au sein du Central Investigation Division (CID), de l’Anti Drug & Smuggling Unit (Adsu) entre autres. On n’a guère le temps de s’ennuyer avec un tel travail. En ce moment, je suis responsable de la CPU et je sensibilise les personnes, des plus petits aux plus grands sur leur sécurité », indique Indira Bhugobaun.
L’inspectrice avoue qu’avec ses collègues de la gent masculine, c’est avant et surtout l’esprit d’équipe qui prévaut. « Si avant les recrutements étaient strictement masculins, cependant en 1989, on a commencé à recruter des femmes comme officiers de police. Depuis il y a eu beaucoup d’évolutions. Ce n’est pas parce que je suis une femme que mes collègues hommes pensent que je suis inférieure. C’est le ‘Equal pay, Equal rights’ qui prime. »
À la question ‘qu’en est-il des risques qui sont associés au métier ?’, elle répond: « Citez-moi un travail qui ne comporte pas de risques. On a des formations approfondies pour pouvoir gérer différentes situations. Lorsque j’étais affectée à l’Adsu, aucune opération ne se faisait sans préparation. Concernant Dimple Raghoo, je dois dire qu’elle était une battante, sauf que le risque était là. Des fois il y a la malchance qui joue contre nous », fait-elle ressortir.
Indira Bhugobaun soutient que c’est sa dévotion pour ce qu’elle fait qui l’aide à surmonter les obstacles. La formation de base qui est très dure, dit-elle, aide à forger le caractère d’un officier de la force de l’ordre. « Être policier demande que la personne soit forte mentalement et physiquement, car ce n’est pas donné à tous de retirer un corps d’une voiture accidentée ou de faire la sentinelle à la morgue. Mais si on fait ce métier avec le cœur, tout est facile. »
Notre interlocutrice reconnaît que les choses continuent à s’améliorer au sein de la force policière et que les officiers sont aujourd’hui mieux équipés. Aimant passionnément son métier, l’inspectrice Indira Bhugobaun ne compte pas s’arrêter en si bon chemin. Elle dit avoir fait le serment de servir le peuple et à être une policière de proximité.
Sarah Pierre, receveuse : «Il faut être forte dans la tête»
Âgée de 29, Sarah Pierre travaille comme receveuse pour la Corporation nationale de Transport (CNT) depuis neuf ans. Elle voue une véritable passion pour son métier, même s’il comporte des risques. Sarah a déjà victime de vol à l’arraché. Toutefois, cela ne lui a pas découragé.
Habitant Cité Vallijee, Sarah Pierre est affectée au dépôt de la CNT à La Tour Koenig. « Mon papa travaille comme chauffeur et quand je voyais les femmes et hommes exercer le métier de receveur, je me suis dit que je voulais faire ce même travail, car j’ai toujours aimé le contact humain », raconte cette mère de famille.
Elle concède toutefois que ses débuts n’ont pas été faciles. « Alors que l’autobus roule ce n’est pas évident d’être debout et de pianoter sur l’appareil, de donner son ticket au passager et de prendre son argent et lui tendre la monnaie s’il le faut. Avec le temps, on finit par s’adapter. Il faut être fort dans la tête et surtout aimer ce travail pour pouvoir le faire », poursuit Sarah Pierre.
La receveuse explique que les risques sont multiples. Elle fait ainsi allusion aux personnes qui ont un mauvais comportement dans l’autobus. « Il y a aussi le risque d’attouchement. Pas que cela. En janvier de cette année, j’ai été victime de vol à l’arraché. Des individus m’ont attaqué alors que je sortais des toilettes à la gare de Port-Louis. On m’a volé ma sacoche qui contenait ma recette du jour. Je n’ai pas pu travailler pendant deux semaines après cette attaque. »
Si Sarah a été traumatisée et blessée au cou lors de cet incident, cependant elle a repris le poil de la bête. Elle compte sur le soutien de ses collègues, notamment le chauffeur avec qui elle est en équipe. « C’est au final un travail d’équipe. On s’entraide. Je dois préciser que jamais mes collègues masculins se sont considérés supérieurs parce que je suis une femme », précise-t-elle.
Nazimah Jhuboo, receveuse : «Formée pour toutes situations de crise»
Neuf ans depuis qu’elle travaille comme receveuse pour la compagnie Rose-Hill Transport. Nazimah Jhuboo, 49 ans, bossait auparavant dans une usine. Elle ne regrette pas sa reconversion dans ce domaine dominé par la gent masculine. Bien au contraire, elle se sent à l’aise. « Quand je travaillais à l’usine, j’étais fatiguée avec les longues heures de travail. Je songeais à changer de métier. Quand j’ai vu des dames exercer le métier de receveuse, j’ai été tentée de m’y lancer. Je ne regrette pas mon choix », relate notre interlocutrice.
Cette habitante de Beau-Bassin affirme que son adaptation n’a pas été difficile. « J’ai la chance de travailler dans un autobus climatisé sur une ligne Express, donc j’ai affaire à des personnes vraiment courtoises. Je n’ai jamais eu de problèmes. Puis, la compagnie nous donne souvent des formations pour gérer les différentes situations, dont les situations de crises. » Avec l’installation des caméras dans les autobus, Nazimah Jhuboo se sent en sécurité. De plus, elle peut toujours compter sur son binôme chauffeur. « N’importe qui peut faire ce métier. Même s’il y a des risques, je le fais avec amour et passion. Je gagne bien ma vie et je suis moins fatiguée. »
Pehrine Bannoo, sapeur-pompier : «Ma priorité est de sauver des vies»
Jeune, elle caressait le rêve de devenir pompier. Grâce au soutien indéfectible de ses parents, Pehrine Bannoo compte aujourd’hui cinq ans de métier au sein du Mauritius Fire and Rescue Service (MFRS).
Guidée par le travail social qui lui tient à cœur, Pehrine Bannoo voulait se dévouer pour les autres dès son plus jeune âge. « Je voulais devenir sapeur-pompier, car pour moi c’est un métier noble. Mes parents m’ont beaucoup soutenu même si certains disaient que c’est un domaine qui n’est pas fait pour une femme », se souvient notre interlocutrice.
Concernant son adaptation, Pehrine Bannoo avance que cela n’a été ni facile ni difficile. « Quand j’ai intégré le service, mes collègues n’étaient pas trop habitués à travailler avec des femmes. Sauf qu’on a vite créé un esprit d’équipe. Aujourd’hui, nous sommes à 22 femmes femmes sapeurs-pompiers. »
Consciente des risques qui sont associés à son métier, Pehrine Bannoo trouve son réconfort dans le travail d’équipe sur le terrain. Faisant partie d’une unité spécialisée, soit le ‘swift water rescue’, elle est formée pour intervenir durant les inondations. « Que ce soit dans un incendie ou une calamité naturelle, notre priorité est de sauver des vies. On a peur des fois en voyant la scène, mais une fois qu’on commence à travailler, on ne pense qu’à cela », lance cette dernière.
Fière de son métier, Pehrine Bannoo remémore d’un cas qui lui a marqué à jamais. « Une dame souffrait d’une obésité morbide. Elle pesait 215 kilos. Elle était dans sa salle de bains lorsqu’elle s’est fracturé le pied. Cela a été un combat de titan pour pouvoir la tirer de sa maison au premier étage, afin que les services de santé puissent prendre la relève, mais elle est décédée quelques jours après », se désole notre interlocutrice.
Rashida, policière : «Il faut avoir un mental d’acier»
Rashida (nom modifié), âgée d’une trentaine d’années, est policière depuis une quinzaine d’années. À peine ses études terminées, elle a postulé pour intégrer la force policière et y a été recrutée. Elle est rarement sur le terrain, mais plus à la station ou elle effectue le ‘station orderly’. Elle avoue que des fois elle a affaire à des criminels dangereux. C’est son revolver qui est sa protection.
« Souvent des fois, des personnes se permettent de hausser plus la voix avec une policière qu’un policier. Certains essayent de vous intimider. Sauf que moi je ne me laisse pas marcher sur les pieds. Pour faire ce métier, il faut avoir un mental d’acier et avoir du caractère », lâche cette mère de famille.
Entre les propos malveillants ou indécents, elle déclare que ce n’est pas toujours facile. « Chaque jour, je dois mettre l’entrée des personnes qui sont sorties sous caution pour des délits de vols, viols, meurtres et autres. Certaines sont dangereuses, d’autres insignifiantes qui vous balancent des propos déplacés. Heureusement, que je peux faire des entrées pour me protéger. Sinon, j’ai un revolver avec cinq balles que je peux utiliser pour me défendre si le besoin se fait sentir », confie Rashida.
Sur le terrain, c’est une autre paire de manche. Elle doit toujours être équipée de son bâton et de sa radio pour alerter ses collègues en cas de dangers. « Avant tout, on est formé pour pouvoir gérer toutes sortes de situations », indique la policière.
Rani, policière : «Un accusé voulait rouler sur moi avec sa voiture»
Si on pense que la vie d’une policière est un fleuve tranquille, tel n’est pas le cas. Ce n’est pas Rani (nom modifié) qui dira le contraire. En sus des intimidations, elle a même failli y laisser sa vie.
Rani compte une dizaine d’années de service. Elle raconte que « mes sœurs sont enseignantes et j’ai grandi avec ma mère. J’étais un peu le garçon raté, je voulais exercer un métier, car cela forge le caractère ».
Elle déclare que pour donner porter leur plainte, nombreuses sont les femmes victimes qui sont plus à l’aise avec une policière à la place d’un policier. Rani se dit fière de ce métier, car en parlant aux gens cela les aide à trouver une solution à leur problème.
Cependant, elle avoue que les risques sont réels. « Une fois, un accusé de violence domestique voulait me rouler dessus alors que je travaillais sur un passage clouté pour aider les gens à traverser. J’ai pu esquiver sa voiture sinon je ne pense pas que je serais aujourd’hui en vie. J’ai eu beaucoup de chance ce jour-là », se souvient-elle. Elle ajoute que ses collègues ne voulaient pas la croire, ce qui l’avait blessé profondément.
Toutefois, c’est par amour et avec le soutien de son époux et proches que Rani continue à travailler, même si comme lors des dernières élections villageoises, elle a été sur le terrain jusqu’à 3h du matin.
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