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Matériaux de construction : la flambée des prix se poursuit

La hausse des prix va perdurer.
  • Hausse de 15 % à 20 % sur les barres de fer 
  • Construire une maison coûte plus cher 
  • Recul de la demande sur le crédit immobilier 

Augmentation du coût du fret, hausse des matières premières, dépréciation de la roupie. Tous ces facteurs influencent les prix des matériaux de construction. Une tendance qui va perdurer, préviennent les fournisseurs. 

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Dans les quincailleries, le ton est vite donné. Tous les matériaux de construction augmentent ces derniers temps, indique Hemraj Ramphul, directeur de la quincaillerie H. Ramphul. Et la hausse la plus importante enregistrée en ce début d’année est celle de la barre de fer. « Il faut compter aujourd’hui Rs 38 000 la tonne de barres de fer contre Rs 27 500 la tonne avant la Covid-19 », explique Hemraj Ramphul. 

« Les prix des matières premières ont excessivement grimpé depuis fin l’année dernière à aujourd’hui. En ajoutant le coût du fret et les fluctuations du taux de change, les barres de fer atteignent des prix jamais vus dans le passé », fait ressortir Loic Napaul, Head of Sales chez Mesh & Steel Trading Ltd (Ndlr : la compagnie fait partie du groupe Desbro). Comparativement à l’an dernier, poursuit-il, les prix des barres de fer ont grimpé de 15 % à 20 %. « Pour le moment, la tendance reste à la hausse. Nous ne prévoyons pas de baisse dans les semaines ou les mois à venir », prévient-il. 

Chez Gamma Materials, un des principaux fournisseurs de matériaux de construction du pays (Ndlr : la compagnie se spécialise depuis 1987 dans la production et la commercialisation de sable, de macadam, de bloc, de béton prêt à l’emploi, de produits décoratifs en béton et de produits préfabriqués), les mêmes préoccupations dominent. « Gamma Materials requiert des produits importés qui entrent dans la composition de ses produits. Les machines et les pièces de rechange sont également sujettes à l’exportation donc nous dépendons largement de la fluctuation du dollar et de l’euro pour nos importations. C’est ainsi que nos prix d’achat connaissent un constant changement depuis la pandémie de la Covid-19 », explique Frédéric Polenne. 

Pour le directeur général de Gamma Materials, l’impact de la pandémie dans les pays producteurs influera sur les produits à l’importation tels que les barres de fer, le ciment et les adjuvants. « La situation ne retournera pas à la normale de sitôt.  Tout dépendra du cours mondial du dollar, du diesel ou du fret et nous suivons tout cela de près », souligne Frédéric Polenne, qui rappelle que Gamma Materials Ltd a ajusté le prix de ses matériaux en septembre dernier, « tout en optimisant ses coûts de production afin de continuer à offrir un service de qualité au juste prix ».

Cette flambée des prix préoccupe Bhooshan Ramloll, CEO de RBRB Construction Ltd. « Si le fret a un impact significatif sur les matériaux de construction, nous avons appris que le prix du fioul va aussi grimper. Ce qui influencera négativement une nouvelle fois les prix », déplore-t-il. Pour le CEO de RBRB Construction Ltd, l’augmentation en cascade sur les matériaux de base se fait davantage sentir cette année. « Les prix ont commencé à grimper en 2020, mais l’augmentation est plus sensible cette année. À titre d’exemple, le prix des carreaux céramiques de base est passé de Rs 300 le mètre carré à Rs 330 le mètre carré », indique-t-il. Ce qui n’est pas sans conséquence sur les coûts de construction.

Baisse de 15 % des chiffres de ventes de Gamma Materials

La pandémie a eu un impact significatif sur le secteur de la construction et Maurice n’a pas été épargné, souligne Frédéric Polenne, directeur général de Gamma Materials. « Il est vrai que le secteur le plus touché sur l’île a été celui du tourisme, mais la construction a aussi connu une baisse d’activités assez conséquente, avec un impact de 15 % à la baisse sur nos chiffres de ventes en 2020 », indique notre interlocuteur. Une baisse qui serait liée aux trois mois d’arrêt des chantiers pendant le confinement. « Dans l’industrie de la construction, tout ne peut être rattrapé, car il y a des temps de préparation qui ne peuvent être reportés », explique-t-il. Cependant, poursuit-il, les projets qui avaient débuté avant la crise liée à la Covid-19 sont en cours de réalisation. « Par ailleurs, l’État a annoncé d’importants investissements dans ce secteur pour les trois à cinq années à venir », souligne Frédéric Polenne. La direction de la compagnie reste, malgré tout prudente en prenant en compte ses ressources en termes de devises, tout en continuant à suivre l’évolution de la pandémie sur le plan mondial et la situation au niveau de l’ouverture de nos frontières. 

Les défis de l’approvisionnement 

Quelle est la situation actuelle au niveau de l’approvisionnement ? Le confinement dans plusieurs pays producteurs n’arrange pas la situation, explique Frédéric Polenne. Du coup, certains pays n’ouvrent pas leur frontière à l’exportation, forçant les importateurs à trouver d’autres marchés d’approvisionnement avec d’autres prix d’importations. « Des ralentissements au niveau des trajets par bateau et avions se font aussi fortement ressentir. Les fournisseurs mauriciens peinent à trouver de la place sur les cargos à cause de la pandémie qui a perturbé le trafic aérien et maritime », fait ressortir notre interlocuteur. Cela dit, explique-t-il, depuis le confinement et à ce jour, Gamma Materials a pu fournir les chantiers d’envergure et répondre à la demande des petits contracteurs et des individus.  

Autre tendance observée : certains fournisseurs importent moins qu’avant. « Nous importons moins de matériaux en attendant une stabilisation, voire une baisse des prix. Nous ne vendons que le peu que nous importons », indique Loic Napaul, Head of Sales chez Mesh & Steel Trading Ltd. 
Hemraj Ramphul, directeur de la quincaillerie H.Ramphul, observe, d’ailleurs, un manque des barres de fer sur le marché. « Pour ce qui est du ciment, la situation est gérable », explique-t-il, tout en soulignant que le problème de retard au niveau de l’approvisionnement des matériaux de construction reste d’actualité. « Il y a définitivement un problème de disponibilité. À titre d’exemple, les importations de Chine prennent plus de temps avant d’arriver au port », renchérit Bhooshan Ramloll, CEO de RBRB Construction Ltd.


L’inquiétude des constructeurs 

Bhooshan Ramloll, CEO de RBRB Construction Ltd : « Il faut enlever la TVA sur la construction des maisons » 

Bhooshan Ramloll, CEO de RBRB Construction Ltd, tire la sonnette d’alarme.  Le secteur résidentiel est en berne, soutient-il. « Les gens ne veulent pas construire en raison de la précarité de l’emploi dans le contexte actuel. Par ailleurs, les banques font attention avant de prêter de l’argent. À titre d’exemple, un employé d’Air Mauritius n’obtiendra jamais de prêt. Cette situation touche plusieurs personnes. Et l’augmentation des prix des matériaux aura tôt ou tard un impact sur le secteur qui tourne déjà au ralenti », prévient-il. D’où sa demande pour que le gouvernement considère l’abolition de la TVA sur la construction des maisons, comme c’était le cas dans le passé. « Cela permettra de booster le secteur résidentiel », souligne-t-il. 

Gérard Uckoor, vice-président de l’Association of Small Contractors : « Le coût de la main-d’œuvre a aussi grimpé » 

Les prix des matériaux ont grimpé, mais aussi le coût de la main-d’œuvre, explique Gérard Uckoor, vice-président de l’Association of Small Contractors. Et c’est loin d’être sa seule source d’inquiétude. « Le ralentissement perdure. Nous avons quelques particuliers qui veulent construire, car ils n’ont pas vraiment le choix, mais d’autres attendent de voir l’évolution de la situation avant de se jeter à l’eau », soutient-il. Ce n’est que d’ici juin, soit après le Budget, avance-t-il, qu’on saura si le secteur connaîtra une relance. 

Dev Bhundun, Managing Director de RB Construction Ltd : « La situation est grave »

De décembre à février, les activités dans l’industrie du bâtiment ont significativement baissé, souligne Dev Bhundun, Managing Director de RB Construction Ltd. « La situation est grave », souligne-t-il. Non seulement, poursuit-il, les Mauriciens attendent avant d’aller de l’avant avec des projets de construction de maison, mais il en est de même pour les bungalows et les campements au bord de mer.


construction

 

Le budget pour la construction d’une maison revu à la hausse 

Avec la majoration des prix des matériaux de construction, ceux qui construisent une maison doivent revoir leur budget. Ainsi, pour une maison de 1 000 pieds carrés, il faut prévoir un budget actuel de Rs 800 000 à Rs 900 000 pour le gris, alors qu’avant la Covid-19, il fallait débourser environ Rs 750 000, indique Gérard Uckoor, vice-président de l’Association of Small Contractors. Pour une maison clé en main de 1 000 pieds carrés, le budget à prévoir est passé de Rs 1,4 million/Rs 1,5 million avant la crise à Rs 1,7 million/Rs 1,8 million actuellement. 

« En général, le coût pour la construction d’une maison à gris de 2 500 pieds carrés se situe entre Rs 800 et Rs 850 le pied carré. Aujourd’hui, le prix a grimpé de Rs 875 à Rs 900 le pied carré en raison de la hausse des coûts des matériaux », ajoute Bhooshan Ramloll, CEO de RBRB Construction Ltd. Dev Bhundun a lui aussi fait ses calculs. « Pour une maison de 2 000 pieds carrés, il faut compter aujourd’hui entre Rs 1 800 à Rs 2 000 le pied carré (le gris) et Rs 2 500 à Rs 3 000 le pied carré (maison clé en main), soit Rs 300 à Rs 500 de plus sur le pied carré comparativement à la même période l’an dernier. Ce qui est un facteur démotivant pour ceux qui envisagent de construire », conclut-il.


Prêts logements : une baisse dans la demande 

abraham jean

La pandémie de Covid-19 a-t-elle influé sur la demande du crédit immobilier ? Éléments de réponses avec Abraham Rawat, Head of Retail de la MCB et Jean Hugues Yagapen, Retail Product and Portfolio Manager - Retail Banking chez Bank One.

Est-ce que la demande pour les prêts logements a baissé depuis la pandémie de Covid-19 ? Et quelles en sont les raisons ?
Abraham Rawat : « Il y a effectivement une baisse des demandes de prêts logements depuis la Covid-19. Nous sommes toujours dans une période d’incertitudes et les clients préfèrent mettre leurs projets en suspens temporairement, en attendant que la situation revienne à la normale. Il y a aussi les clients qui sont directement impactés au niveau de leurs revenus et qui sont dans l’incapacité d’aller de l’avant avec leurs projets.  Pour notre part et en tant que banque responsable, nous essayons autant que possible de conseiller les clients dans leurs choix ».

Jean Hugues Yagapen : « Chez Bank One, nous n’avons pas noté de repli significatif concernant nos prêts logements, mais une légère contraction. Ce qui est normal vu les circonstances exceptionnelles. Cette résilience peut s’expliquer par le fait que le projet immobilier demeure toujours une priorité pour les Mauriciens ».

Abraham Rawat : « La Covid-19 a impacté négativement les revenus de beaucoup de nos clients »

Les entrepreneurs en bâtiment déplorent le fait que les demandes de prêts de plusieurs ménages soient rejetées par les banques. Qu’en est-il au juste ? La Covid-19 y est-elle pour quelque chose ? 
Jean Hugues Yagapen : « La pandémie a malheureusement touché de nombreux ménages. Mais, afin de protéger les déposants et préserver une stabilité économique, les banques doivent faire preuve de prudence et valider les demandes de prêts des personnes qu’ils jugent aptes à rembourser les mensualités et cela est basé sur des critères bien définis. Ce qui peut expliquer les rejets que vous avez mentionnés. Cependant, au-delà de ces principes généraux, chaque banque a sa propre politique et une approche différente concernant l’évaluation des risques liés aux demandes de prêts. Chez Bank One, malgré un environnement économique plein de défis, nos différentes équipes soutiennent les demandeurs de prêts dans la concrétisation de leur projet immobilier, que ce soit pour une construction ou l’achat d’un bien. Une personne ayant satisfait nos critères relatifs n’a aucune raison de voir sa demande de prêt rejetée ».

Abraham Rawat : « Un des critères principaux pour obtenir un prêt est la capacité de remboursement du client. Or, la Covid-19 a impacté négativement les revenus de beaucoup de nos clients et certains se retrouvent aussi dans une situation précaire par rapport à leurs emplois. Bien avant que les clients ne fassent leurs demandes de prêts, nous discutons avec eux et nous les conseillons par rapport à leurs projets ».

Jean Hugues Yagapen : « Le projet immobilier demeure toujours une priorité pour les Mauriciens »

Il y avait une forte concurrence au niveau des banques en termes des prêts logements. Est-ce toujours le cas ? 
Abraham Rawat : « Un projet immobilier est une étape importante dans la vie d’un client et nous faisons notre maximum pour que son expérience par rapport à sa demande de prêt logement soit mémorable. Nous venons de lancer notre application en ligne permet au client de faire sa demande de chez lui.  Il existe une concurrence forte par rapport aux prêts logements et nous jugeons qu’elle est essentielle, car c’est le client qui en sort gagnant ».

Jean Hugues Yagapen : « Effectivement, avec une dizaine d’opérateurs, ce marché reste très compétitif et en constante évolution. Malgré la concurrence, nous notons une demande soutenue des prêts logements chez Bank One. Nos clients apprécient beaucoup la flexibilité de  la durée de remboursement qui peut aller jusqu’à 35 ans, des taux très compétitifs qui peuvent descendre sous les 4 % par an et une variété d’offres annexes ».

 

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