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Logements sociaux : une priorité absolue

Les logements sociaux restent un épineux dossier pour les autorités.

Cela fait des années que les gouvernements successifs se penchent sur un dossier jugé prioritaire : les logements pour les plus démunis de la société. Pourtant malgré les effets d’annonces, la situation est critique. En 2021, quelles doivent être les priorités ? Le point.

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Jean-Claude de L’Estrac : « Il faut opter pour la discrimination positive : donner plus à ceux qui ont moins  »

jeanJean-Claude de L’Estrac, observateur et auteur d’un livre sur les terres, donne son avis sur le logement social. 

« Année après année, depuis 1960, le problème de logement pour les plus pauvres de notre société reste insoluble. Pourtant, il y a eu plusieurs annonces répétées de chaque gouvernement qui est venu au pouvoir. Ce n’est donc pas faute de volonté politique. De plus, il y a eu plusieurs organismes qui ont été créés, en commençant par la Central Housing Authority, après le passage du cyclone Carol, puis la Mauritius Housing Company, le Housing Development Trust ou encore la National Housing Development Company. D’autres initiatives ont été mises en place, comme la souscription aux comptes PEL ainsi que le Voluntary Retirement Scheme qui a boosté la construction de logements. Actuellement, plus de 80 % de Mauriciens ont une maison, mais pourquoi plus de 20 000 familles attendre toujours d’avoir un logement décent ?

Discrimination positive

Selon moi, il y a plusieurs raisons qui expliquent cette situation. La principale réside dans le fait que tous les programmes gouvernementaux de soutien à la construction de maison sont calqués sur le modèle de prêt-logement à des locataires-propriétaires. Ainsi, les prêts sont octroyés aux personnes aptes à démontrer qu’elles ont des revenus fixes et qu’elles sont en mesure de rembourser. Or, il existe une catégorie de citoyens, comme des chômeurs, ceux qui ont un emploi précaire, ceux qui sont historiquement exclus de la propriété terrienne ou encore ceux qui sont dans l’incapacité de prendre ce genre d’engagement ou de souscrire à un compte. C’est pour cette catégorie de personnes que l’État doit construire des logements sociaux, loués à des sommes très modiques, sans attente de profitabilité. Il n’y a pas d’autres solutions.

La difficulté politique pour les gouvernements, c’est le discours communalo-politique des bien-installés qui s’offusquent que l’État puisse envisager d’accorder de tels bénéfices à une catégorie de nos compatriotes, alors qu’eux-mêmes ont consenti à des sacrifices pour finalement pouvoir se loger. Ce n’est pas faux. Mais c’est aussi méconnaitre que certains de nos compatriotes, porteurs d’un fardeau imposé par l’histoire et dont ils ont toujours du mal à se débarrasser, n’y arriveront pas sans une forme de discrimination positive. C’est-à-dire la pratique de donner plus à ceux qui ont moins. C’est une inégalité qui promeut l’égalité. C’est cela aussi une nation, un devoir de solidarité.

Il reste le problème des terres, mais là aussi c’est un faux problème. L’État devrait être en mesure de récupérer des terres auprès de ceux qui en ont, et même trop, au point de les abandonner. Voilà ce que devrait être le programme 2021 d’un ministre du Logement ! »

Père Gérard Mongelard : « Offrir un toit à un pauvre est une question de justice sociale »

gerardGérard Mongelard, prêtre et observateur ayant à cœur le dossier logement, partage son avis sur la question.

« Il y a beaucoup de misère et on ne peut pas continuer d’avoir autant de pauvreté. Ce n’est pas possible. Je concède, toutefois, qu’on avance sur le dossier de logements sociaux. N’empêche qu’il y a encore beaucoup de travail à abattre. Je cite le pape François qui avait dit qu’il y a trois aspects à prendre en considération : les trois t - toit, travail et terre. Quand une personne a un toit, elle a une dignité. On a vu comment ceux qui n’ont pas un travail et de toit ne sont pas respectés. Force est de constater que cela fait plus d’une vingtaine d’années que les gouvernements successifs n’ont pas fait du dossier logement, une priorité. On est vraiment en retard et il est impératif de se rattraper. 

Pendant le confinement, quand on a détruit les taudis des squatters, cela a mis en exergue la pauvreté qui existe. Le gouvernement a annoncé la construction de 12 000 logements sociaux, dont 1 800 pour ceux au bas de l’échelle, mais ce nombre n’est guère suffisant. En 2021, les plus pauvres doivent être la priorité. Ce n’est pas normal qu’une vingtaine de personnes habitent une seule chambre. 

Justice sociale

Offrir un toit à un pauvre n’est pas une question de charité, mais de justice sociale. Toutefois, cela ne s’arrête pas là. On doit pouvoir accompagner et autonomiser ces personnes. Un changement de mentalité est aussi de mise. Les pauvres sont souvent considérés comme des paresseux qui ne veulent pas faire d’efforts. On doit encourager ces personnes à sortir de leur misère. À Maurice, il y a plusieurs poches de pauvreté. On doit faire un travail méticuleux et mener une enquête pour savoir qui sont ceux qui ont besoin d’un logement en priorité. Les Mauriciens sont connus pour leur solidarité et j’espère que cet esprit va les animer à aider ceux dans le besoin. 

Je crois, par ailleurs, que tous les acteurs concernés et les institutions qui s’occupent des logements peuvent faire de belles choses s’il y a un esprit d’équipe. Ensemble, on peut faire des miracles. On doit également intégrer ceux qui ont besoin d’un toit dans les projets de construction, car parmi, on trouve des maçons, des charpentiers, etc. Ainsi, ils se sentiront responsables et valorisés si on leur accorde des responsabilités. Il est vraiment grand temps de changer de formule.

On comprend, de plus, que la construction de 12 000 logements ne peut se faire du jour au lendemain. Il y a des personnes qui attendent une maison depuis 25 ans et c’est une situation qui ne peut pas perdurer en 2021. On doit pouvoir leur proposer un logement temporaire en attendant que les logements qui leur seront alloués soient prêts ».

 

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