Le 31 mars prochain, un pan de l’histoire de Port-Louis disparaîtra à jamais. Et pour cause, 60 ans après avoir fourni des dizaines de milliers de tasses de thé, de pains fourrés et de ‘gatodelwil’, l’Hôtel Providence mettra définitivement la clef sous le paillasson.
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Un agréable parfum de ‘gatopima’ flotte dans l’air. À quelques pas, des habitués sirotent une bonne tasse de thé en faisant un brin de causette. Dans quatre jours encore, toute cette ambiance ne sera malheureusement qu’un lointain souvenir de l’un des derniers ‘loteldite’ du pays, qui plus est de l’un des plus populaires.
Mais après 60 ans, la force n’y est plus. Et c’est tout simplement pour cette raison que les frères Allykhan ont décidé, bien malgré eux, de fermer boutique, comme nous l’explique Yoonooskhan Allykhan: « Mon frère aîné a 69 ans. Moi, j’en ai 67 ans. Nous avons consacré toute notre vie à cet établissement que notre défunt père a acheté en 1957. Nous aurions bien voulu tenir, sauf que notre âge et notre santé ne nous permet plus de rouler le commence. »
Ajouté à l’âge, il y a l’absence de relève: « Malheureusement, la jeune génération ne veut pas reprendre le flambeau. On comprend les jeunes. Ils ont fait de longues études et c’est très difficile, pour eux, de se réveiller à 3h00 du matin chaque jour pour tenir un établissement jusqu’à 23h30, même si nous nous relayons entre frères pour opérer notre commerce. »
À un certain moment, les frères Allykhan ont même pensé à moderniser leur établissement avant d’abandonner l’idée: « Pendant longtemps nous avons tenu à conserver le cachet de notre établissement parce qu’il permettait à nos clients de prendre leur thé dans l’atmosphère d’un vrai ‘loteldite’ de l’époque. Pour lui donner un nouveau souffle, nous avons voulu investir. Mais après mûre réflexion nous sommes arrivés à la conclusion que cela n’en valait pas la peine, faute de relève », explique Yoonooskhan.
Très réputé pour ses ‘gatobrinzel’ ou encore pour ses ‘gatopima’, l’Hôtel Providence laisse aujourd’hui un vide pour ceux qui veulent manger à prix réduit : « Nos clients sont encore sous le choc. Pour nous les propriétaires c’est ce qui nous chagrine le plus. Des habitués de l’hôtel nous disent qu’ils ne savent pas où ils iront pour se remplir l’estomac pour Rs 40 - un pain, un tantinet de beurre, des gâteaux et une bonne tasse de thé. »
Et les employés dans tout ça ? « Notre établissement n’aurait jamais eu la popularité qu’on lui connaît sans la contribution de nos sept employés, dont l’un d’entre eux travaille pour nous depuis plus de 35 ans. Pour être franc, cela faisait un bout de temps qu’on envisageait de fermer nos portes. Ils étaient déjà préparés à cela. Pour récompenser leur dur labeur nous allons leur offrir une compensation plus que raisonnable », fait ressortir Yoonooskhan.
À quatre jours de la fermeture, Yoonooskan a du mal à imaginer sa vie sans la routine de l’hôtel : « Cela va me faire tout drôle de ne plus me réveiller tôt pour m’occuper de cet établissement où j’ai passé le presque toute ma vie. Cela va être très difficile. Mais il faudra s’y faire. »
Maintenant, les frères Allykhan cherchent à trouver un acquéreur pour vendre l’emplacement : « Nous voulons vendre l’établissement afin de passer à autre chose. C’est désormais la seule chose qu’il nous reste à faire », nous déclare Yoonooskhan d’une voix étranglée par l’émotion.
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