Jugdis Bundhoo est longtemps resté dans l’ombre alors que l’industrie sucrière était confrontée à des transformations de fond. Le nouveau CEO de la Mauritius Cane Industry Authority est appelé à jouer une part active, alors que les derniers filets de protection de la stabilité des prix du sucre mauricien disparaissent.
À Réduit, son bureau ne paie pas de mine. Fonctionnel à souhait et mobilier sobre, le décor traduit bien l’environnement qui sied à cet homme qui, depuis plus d’une trentaine d’années, connaît tous les soubresauts d’une industrie sucrière qui a façonné notre histoire économique, sociale et culturelle.
Deuxième fils d’un fonctionnaire de Vacoas, Jugdis Bundhoo a fait ses études au collège Saint Andrews avant de mettre le cap sur l’Angleterre, comme de nombreux Mauriciens, en 1974, pour exercer comme infirmier. Ensuite, il s’inscrira à l’université de Salford pour étudier avec succès la chimie et la physiologie, avant de passer une maîtrise en Soil Chemistry à l’université de Reading.
En 1983, il rentre à Maurice, part enseigner la chimie dans un collège durant six mois, avant de prendre de l’emploi à la Mauritius Sugar Authority, dont la mise sur pied est recommandée par la Commission Abrahamovic. En 1986, il part à Londres pour faire une maîtrise en Information Science, dans le cadre d’un British Technical Assistance Scheme. « Ces études permettaient, entre autres, de recueillir et de compiler des données dans le domaine sucrier pour la formulation des projets et l’adoption des décisions. Il fallait comprendre l’industrie sucrière dans tous ses aspects, de la finance à la gestion en passant par ses moindres postes », explique Jugdis Bundhoo.
À l’époque, Maurice bénéficiait déjà des avantages issus du Protocole sucre, lui garantissant, entre autres, un prix stable et un quota fixe de 500 000 tonnes de sucre vers la CEE. « On ne se préoccupait pas de la concurrence », explique notre interlocuteur, qui pour mieux comprendre les rapports dans le monde du travail, entreprendra des études de ressources humaines. Le milieu sucrier, avec ses transformations et mutations, lui offre un terrain fertile pour vérifier ses réflexions.
« Depuis 1984, jusqu’à la fin de la centralisation, 17 usines ont mis la clé sous le paillasson, avec des départs volontaires à la retraite. Entre-temps, l’industrie sucrière est devenue l’industrie cannière, une appellation correspondant à sa nouvelle vocation. Cette nouvelle identité, issue de la centralisation, impose de repenser l’avenir de cette industrie en tenant compte de la fin de nos acquis en 2017. C’est un défi auquel elle s’est déjà préparée, avec le soutien de l’État. En fait, ce dernier a toujours accompagné l’industrie sucrière dans ses phases de transition historiques », souligne-t-il.
L’idée de reconvertir les champs de canne en cultures vivrières afin de garantir la sécurité alimentaire de Maurice, ne séduit pas beaucoup Jugdis Bundhoo. « Ni notre sol, ni notre climat ne sont appropriés pour ces cultures et nous n’avons pas de marché pour ces produits. Il convient aussi de souligner que la canne à sucre fonctionne comme un filtre qui empêche l’érosion. Imaginons une seconde quel serait l’état de nos plages s’il n’existait pas la canne. La transformation de l’industrie sucrière a aussi été un succès, car elle a généré d’autres activités rémunératrices, dont la production d’énergie propre et les sous produits de la bagasse », argue celui qui préside la Mauritius Cane Industry Authority (MCIA) depuis ce mois-ci.
Lorsqu’il regarde dans le rétroviseur de la vie, Jugdis Bundhoo ne peut que se réjouir de la confiance que ses parents avaient placée en lui. « J’ai sans doute réussi. Mes parents voulaient que je possède un diplôme. J’ai fait mieux. Ici, au MCIA, il y a quelque 450 salariés avec lesquels je dois composer et l’industrie sucrière, c’est une grosse partie de ma vie. C’est une vraie famille », lâche-t-il.
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