Interview

Éric Mangar, directeur du Mouvement pour l’autosuffisance alimentaire : «On perd chaque année 800 hectares de terre»

Le thème de cette année pour la Journée mondiale de l’alimentation, célébrée le lundi 16 octobre, est « Changeons l’avenir des migrations. Investissons dans la sécurité alimentaire et le développement rural ». Cela interpelle, n’est-ce pas ?
C’est  vrai. Même à Maurice, on a connu des migrations internes forcées au cours desquelles la sécurité alimentaire a été affectée. Je vous cite le cas des 77 familles de La Pipe qui ont été déplacées  à Anoushka avec la construction du Midlands Dam. Après leur déplacement, elles se sont retrouvées presque sans nourriture alors qu’elles étaient plus ou moins autosuffisantes car elles plantaient leurs propres légumes et faisaient de l’élevage. Du jour au lendemain, ces gens-là se sont retrouvés dans une misère extrême dans leur nouvel environnement.

Publicité

Heureusement nous avons lancé des projets agricoles à leur intention. Aujourd’hui, ils se sont retrouvés plus ou moins dans leur élément, mais d’autres problèmes subsistent. Tous comme les gens de La Pipe, les Chagossiens étaient aussi autosuffisants. Ils faisaient de l’élevage et produisaient leurs propres légumes.

Contraints de venir à Maurice, ils vivaient éparpillés dans plusieurs régions de Port-Louis. Ils ont beaucoup souffert dans leur nouvel environnement. Comme on le voit, la migration forcée, qu’elle soit sur le plan local ou international, entraîne toujours son lot de misères. En cette Journée mondiale de l’alimentation, j’ai une pensée spéciale pour les réfugiés qui ont fui leur pays à cause de la guerre civile.

On parle aussi du développement rural…
C’est un autre sujet qui interpelle. Je ne suis pas contre le développement et le progrès. Mais comme je ne le cesse de dire, il nous faut un développement planifié. Ce qui n’est pas le cas, à mon avis, à Maurice. Imaginez-vous qu’avec des projets immobiliers qui poussent comme des champignons, on perd, en moyenne, 800 hectares de terre fertile chaque année. Des terres perdues à jamais car elles sont envahies de béton. C’est grave pour un petit pays comme Maurice.

Que recommandez-vous ?
Je ne cesse de dire qu’on doit avoir une banque de terres fertiles à Maurice pour assurer notre sécurité alimentaire. On est toujours dépendant à 75 % des produits importés. Il faut encourager les gens à produire une partie de leur nourriture. Le gouvernement doit aussi encourager davantage de jeunes au travail agricole car avec le vieillissement de la communauté des planteurs, la relève n’est pas assurée.

 

Notre service WhatsApp. Vous êtes témoins d`un événement d`actualité ou d`une scène insolite? Envoyez-nous vos photos ou vidéos sur le 5 259 82 00 !