Qui est cette personne qui a été en communication avec Peroomal Veeren en 177 occasions ? Cette même personne a aussi appelé Nawaz Ibrahim, l’ex-Clerk Manager de Me Rex Stephen. Cet ex-employé de l’avocat, qui a déposé devant la commission d’enquête sur la drogue le jeudi 27 juillet, s’explique sur la somme de Rs 1,5 million reçue en avril.
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Le nom de Yacoob Ally a été cité pour la première fois devant la commission d’enquête sur la drogue, le jeudi 27 juillet. Durant cette audition, l’ex-Clerk Manager Sheik Nawaz Hassen Aboobaker Ibrahim a été sommé de s’expliquer sur la somme de Rs 1, 5 million reçue en avril dernier au bureau de l’avocat Rex Stephen et ses appels échangés avec le prisonnier Peroomal Veeren.
Selon les données de la commission, la carte SIM utilisée pour entrer en communication avec le trafiquant Peroomal Veeren en 177 occasions est enregistrée au nom d’un dénommé Yacoob Ally. Il s’agit d’un Bangladais qui était à Maurice. Mais Nawaz Ibrahim affirme qu’il ne connaît pas Yacoob Ally et qu’il n’a jamais été en communication avec lui. « Il se peut qu’une autre personne utilise cette carte SIM », a répondu l’ancien Clerk Manager.
Extrait de l’audition
Paul Lam Shang Leen (PLSL) : Vous êtes devenu l’ex-Clerk Manager de Me Rex Stephen après votre arrestation par l’Independent Commission against Corruption (Icac) ?
Nawaz Ibrahim (NI) : Je n’ai pas été arrêté. L’Icac m’avait seulement interrogé.
PLSL : Pour quelles raisons ?
NI : C’est mon patron qui doit le savoir.
PLSL : L’Icac vous avait interrogé sur la somme de Rs 700 000 en cash. D’où provenait cet argent ?
NI : C’est l’argent récolté pour les cas traités par notre bureau.
PLSL : Quel était votre rôle dans ce bureau ?
NI : Je faisais le suivi des dossiers. Je répondais à des appels. Je gérais l’agenda et l’administration du bureau.
PLSL : Qui était le chef ?
NI : Me Rex Stephen.
PLSL : Les Juniors ?
NI : Mes Ashvin Ramdhian, Anekha Punchoo et José Moirt, entre autres.
PLSL : Et Me Marie ?
NI : Il était chez nous de 2005 à 2010. Puis il est parti.
PLSL : Vous étiez le Clerk Manager. Vous donniez des conseils à des clients ?
NI : Certaines fois.
PLSL : Et les honoraires ?
NI : Certaines fois.
PLSL : Comment ça « certaines fois » ?
NI : Vous savez, nous avons appliqué un système anglais au bureau pour mieux gérer les affaires.
PLSL : Qui fixait les prix ?
NI : Le patron.
PLSL : Donniez-vous des instructions aux Juniors pour qu’ils se rendent à la prison ?
NI : Non. Les instructions ne venaient pas de moi. J’en discutais d’abord avec le patron. Il ne se déplace pas pour des cas mineurs. Par la suite, j’évoquais l’affaire avec les Juniors. S’ils étaient intéressés et qu’il n’y avait pas de conflit d’intérêts, ils pouvaient partir.
PLSL : Nous avons récemment recueilli le témoignage de Me Ashvin Ramdhian. Il nous a dit que c’était vous qui lui aviez donné des instructions pour qu’il se rende à la prison.
NI : Oui, je l’ai appris dans la presse. Ce n’est pas correct. Nous exposons les problèmes des détenus. Les Juniors auraient pu refuser s’ils le voulaient.
PLSL : Votre bureau a-t-il un client au nom de Peroomal Veeren ?
NI : Le bureau n’est pas à moi (lâche-t-il en sourire).
PLSL : Je n’ai pas dit cela. Le bureau où vous travailliez. Connaissez-vous Peroomal Veeren ?
NI : En tant que client, oui. Je lui ai déjà vu en Cour. Plusieurs de ces cas sont toujours en attente.
PLSL : Où se trouve Peroomal Veeren ?
NI : Maintenant ? Il est en prison.
(Rires dans la salle d’audience)
PLSL : Maintenant ? Vous étiez employé pendant quatre ans chez un avoué et 17 ans chez un avocat. Vous devez savoir qu’en Cour, il faut utiliser les mots exacts.
NI : Pardon Monsieur. Cela fait plusieurs semaines que j’ai perdu mon emploi. Cela me stresse.
PLSL : Comment Peroomal Veeren sollicitait-il vos services ?
NI : Il est un client du bureau. Sa mère était venue nous rencontrer. Après la mort de cette dernière, d’autres personnes, des parents à lui et des proches, sont venus. Ils avaient tous le numéro du patron et même le mien.
PLSL : Revenons-en à la descente de l’Icac au bureau. Y avait-il seulement Rs 700 000 ou y avait-il bien plus ?
NI : Rs 700 000 en cash. Je ne sais pas si je dois en parler ici. Il y a l’enquête de l’Icac qui est toujours en cours.
PLSL : Bien sûr que vous pouvez en parler. C’est l’une des raisons de votre convocation ici.
NI : Il y a plusieurs cas de Peroomal Veeren qui sont en attente et d’autres qui ont été déjà complétés. Les Juniors réclamaient leurs honoraires. Nous avons essayé de parler aux parents de Veeren pour être payés. Et un beau jour, nous avons reçu un appel nous informant que le paiement serait effectué aujourd’hui. Une personne s’est présentée au bureau et elle nous a remis la somme de Rs 1,5 million. J’en ai informé Me Rex Stephen. Nous avons tenté d’appeler la personne qui nous avait contactés plus tôt pour connaître la raison de ce montant, mais sans réponse. Finalement nous avons décidé de garder l’argent car il y avait plusieurs dossiers à traiter.
PLSL : Vous prenez Rs 1,5 million sans demander d’explications sur la provenance de cet argent ? Vous ne saviez pas, après 21 ans de carrière, qu’il ne fallait pas accepter une telle somme en cash ?
NI : C’est après que j’ai appris.
PLSL : Comment la personne se prénommait-elle ?
NI : Elle nous a dit qu’elle s’appelait Shirley Bibi. Puis elle est partie.
PLSL : Peroomal Veeren est un vieux client chez vous ?
NI : Oui, c’est un client depuis assez longtemps mais il n’est pas vieux (rires…) Il n’a que 41 ans.
PLSL : Combien de fois vous a-t-il appelé ?
NI : Je reçois plusieurs appels des clients. Lorsque j’aperçois des missed calls, je les rappelle. Je ne peux rien vous dire car l’Icac a saisi mon cellulaire.
PLSL : Le numéro 5739xxxx vous dit-il quelque chose ?
NI : Non. Comme je vous ai dit, j’ai un problème de mémorisation.
PLSL : Depuis 2014, il était en contact avec vous.
NI : C’est possible.
PLSL : Comment c’est possible ? Ce numéro appartient à Peroomal Veeren. Il y a également le numéro 5854xxxx. Il a échangé des appels avec vous qui ont duré trois à quatre minutes.
NI : Je dois vérifier. Peroomal Veeren appelle notamment pour ses problèmes administratifs, quand il n’est pas satisfait de ses médicaments ou encore lorsqu’il veut savoir la date de son procès.
PLSL : Et le numéro 5428xxxx ?
NI : Non, je dois vérifier. C’est quelle prison ?
PLSL : Qui vous a dit que c’était un prisonnier ? D’après nos renseignements, ce numéro est enregistré au nom de Yacoob Ally. Et ce numéro vous avait contacté.
NI : Non, je ne connais pas Yacoob Ally. Peut-être qu’une personne a utilisé son téléphone.
PLSL : N’est-ce pas lui qui vous avait appelé pour déposer la somme Rs 1,5 million ?
NI : Non, je ne sais pas.
PLSL : Yacoob Ally était à plusieurs reprises en communication avec Peroomal Veeren (177 appels échangés au total ). Ce même Yacoob Ally vous avait appelé sur votre portable.
NI : Je n’en ai aucune idée.
PLSL : Votre patron travaillait-il en collaboration avec un autre avocat ?
NI : À ma connaissance, je ne crois pas.
PLSL : Nous avons des renseignements selon lesquels il travaille en relation avec Me Raouf Gulbul. Ce dernier lui référait certains cas.
NI : Je ne sais pas.
PLSL : Parce que c’est votre cabinet qui avait rendu visite à Aminah Bibi Noordally, la belle-mère de Peroomal Veeren, en prison.
NI : Je ne sais pas. Il faut savoir le motif exact de cette visite.
Sam Lauthan (SL) : Pourquoi avez-vous été licencié ?
NI : Le patron nous a dit qu’il compte fermer le bureau et qu’il n’exercera plus comme avocat. Il compte se retirer et il n’aura plus besoin de nos services.
SL : N’est-ce pas à cause des Rs 1,5 million ?
NI : Peut-être.
SL : Vous avez été en communication avec Peroomal Veeren en 14 occasions. Sur ces 14 appels échangés, vous l’avez appelé cinq fois.
NI : (silence…)
SL : D’après nos données, Yacoob Ally est un Bangladais et il se pourrait qu’il réside à Vallée-des-Prêtres. Peut-être qu’il a déjà quitté Maurice mais sa carte SIM est toujours active.
NI : Vallée-des-Prêtres est tellement grand…
SL : Le numéro de Yacoob Ally a appelé Peroomal Veeren en 177 occasions. La majorité des appels ont été passés à Mont-Roches.
NI : Cela fait beaucoup d’appels. Peut-être que ce sont ses beaux-parents qui ont utilisé ce numéro. Ce sont eux qui habitent à Vallée-des-Prêtres mais… Mont-Roches je ne sais pas.
SL : Pourtant le numéro de Yacoob Ally était également en communication avec vous…
NI : (silence) Donnez-moi la date et je pourrai vérifier.
Me Deveena Deonaran interrogée sur ses appels passés à Lina Gentil
Me Deveena Deonaran (photo) s’est rarement déplacée à la prison pour visiter les prisonniers. Mais la commission dit ne pas comprendre pourquoi l’avocate était en contact, de mai à septembre 2015, avec Lina Gentil, qui serait la maîtresse de Polocco. Certains appels ont duré plus de six minutes. L’avocate a plaidé l’ignorance. Elle a un délai de 15 jours pour donner ses explications à la commission. Son compte bancaire a aussi été passé au crible. Paul Lam Shang Leen a noté qu’un montant de plus de Rs 700 000 a été versé sur son compte en 2009. L’avocate a répondu qu’elle a beaucoup travaillé pro bono en 2009.
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