Baromètre économique de PluriConseil: lourd climat de pessimisme au milieu de turbulences politiques

Attentisme et pessimisme accrus noircissent le climat des affaires alors que la majorité des analystes s’attendent à une croissance de pas plus de 3,5% cette année.

1 La confiance n’est pas là

Comment réagit la communauté des affaires face aux secousses au sein de la majorité gouvernementale ? La crise au sein du gouvernement fait que la communauté des affaires n’a pas confiance en ce moment. C’est ce qu’observent quasiment tous les répondants. Pour 63% d’analystes, l’attentisme s’accroît, et un tiers des sondés sentent une mauvaise humeur chez les opérateurs économiques. Comme le souligne des économistes, « political stability is very important for business ». Mais « the current political situation is contributing to exacerbate the uncertainty levels within the economy, and this might degenerate should the issues not be tackled swiftly. This does not augur well for the country when efforts, time and resources should have been devoted to the objective of reigniting economic growth. »

2 Progression sensible du pessimisme

Sur les perspectives de l’économie mauricienne d’ici à la fin de l’année 2016, êtes-vous... En janvier dernier, ils étaient 53 % à être pessimistes sur l’économie mauricienne pour l’année 2016. Trois mois plus tard, le pessimisme gagne 77 % des analystes. Cette progression de 24 points de pourcentage s’explique par le sentiment que rien n’a bougé sur le plan économique durant le premier trimestre, marqué par l’effacement de l’ancien ministre des Finances, par l’absence de décisions économiques du gouvernement et par le rapport accablant du Fonds monétaire international sur Maurice. Et puis, fait ressortir un économiste, « the difficult global environment coupled with ongoing politicial stresses seem to be denting the business mood with a serious concern being the absence of a dedicated Minister of Finance two months from the National Budget presentation ».

3 La croissance ne dépassera pas 3,5 %

Quelle est votre prévision du taux de croissance pour l’année 2016 ?

Statistics Mauritius prévoit un taux de croissance de 3,9 % pour 2016. Mais presque tous ceux interrogés sont d’avis qu’il sera moindre. Trois analystes sur cinq pensent même qu’il ne dépassera pas les 3,5 %. Pour une économiste, « all ingredients are present to depress the economy and discourage businesses ». Malgré les assurances données, « the economy does not seem to be the priority of the government », ce dernier étant plus intéressé à jouer le rôle de nettoyeur et de gendarme. Or « cleaning is not going to create wealth, and without wealth creation, the economy moves backwards ». De plus, « policing involves a cost, and the benefit may be negligible ».

4 Le chômage à 8,0 % ou plus

Quelle est votre prévision du taux de chômage pour l’année 2016 ?

Statistics Mauritius a révisé légèrement à la baisse le taux de chômage de 2015 à 7,9 %. Toutefois, un analyste sur deux croit qu’il repassera la barre psychologique de 8,0 % en 2016, des « licenciements supplémentaires » étant à prévoir au cours de cette année. D’aucuns estiment que « le taux réel du chômage est beaucoup plus élevé » que ce qu’indiquent les chiffres officiels, fondés sur « a sample-driven method ». D’ailleurs, dira une économiste, « the rate at which employment is being created is much slower than the rate at which people are losing jobs if we consider both the formal and informal sectors ».

5 La productivité ne suit pas

Au regard de la situation économique actuelle, le coût annuel du rapport PRB 2016 vous paraît... Le coût annuel du rapport 2016 du Pay Research Bureau, que les autorités estiment à Rs 3 milliards, semble raisonnable, voire modéré, selon 60 % des sondés. Pour les autres, la situation actuelle de notre économie ne peut pas soutenir une telle hausse de la masse monétaire, car le secteur public est déjà « too close to the debt ceiling ». Reste l’éternelle question de la productivité qui ne s’améliore pas. Il n’y a aucune indication que les fonctionnaires seront plus performants et plus dévoués à leur travail. Or « an enabling civil service which makes things happen, shortens the waiting time and queues, and decreases the hassle inflicted on the applicant citizen is a huge boon to the economy and can add some decimal points to growth ».

6 Pour un ministre des Finances à plein temps

Selon vous, faut-il un ministre des Finances à plein temps pour préparer et présenter le prochain budget ?

Quatre analystes sur cinq clament qu’il faut définitivement un ministre des Finances à plein temps pour piloter la préparation du prochain budget national. C’est un travail qui exige « une maîtrise des dossiers pour discerner les calculs derrière les recommandations des uns et des autres », faute de quoi l’économie en sortira perdante. C’est pourquoi « there is certainly a need for a dedicated Minister of Finance to move forward with the economic agenda in a forceful manner. For all the respect he commands, the Prime Minister has more than enough on his plate to carry on having this ministry under his aegis. » Et d’ailleurs, « there should be someone to focus on and ensure achievement of the objectives set by the budget ».

7 Le secret bancaire mis en question

Comment évaluez-vous le niveau de confidentialité bancaire à Maurice ? Le niveau de confidentialité bancaire à Maurice est perçu par 77 % des répondants comme étant peu rassurant, voire inquiétant. « It was fine up till now », note une économiste, mais à la suite de la divulgation du prêt de la State Bank of Mauritius à Vishnu Lutchmeenaraidoo, « the trust in banks is decreasing ». D’autant que « Mauritius is an island where there is no secrecy as people love to talk ». Un banquier rassure que ce cas particulier est isolé et que « confidentiality in the Mauritian banking sector is high, but there will always be some black sheeps in any institution ». Mais tout dépend du type d’institution. Un analyste observe que « government-owned institutions are being instrumentalised ».

8 Le cours de SBMH en chute libre

Selon vous, jusqu’où peut descendre le cours boursier de State Bank of Mauritius Holdings d’ici à la fin de 2016 ?

A la bourse de Port Louis, le cours de State Bank of Mauritius Holdings (SBMH) clôturait la semaine dernière à 65 sous. Deux analystes sur cinq sont confiants qu’il ne baissera pas davantage d’ici à la fin de l’année 2016. Un sondé sur deux table, en revanche, sur une chute du titre bancaire jusqu’à 60 sous. Du point de vue haussier, « all the bad news have been out, and provisions already made ». Quant à l’opinion baissière, « poor corporate governance and lower profitability are likely to impact negatively on the share price ». Comme on peut s’attendre à d’autres développements importants qui détermineront les tendances futures, « it seems the end of the tunnel is not for soon ».  

Enquête réalisée par PluriConseil du 4 au 6 avril 2016 auprès d’un échantillon représentatif de 30 analystes économiques et financiers.