Interview

Aryaduth Seesunkur: «La pauvreté absolue n’existe plus à Maurice»

Aryaduth Seesunkur, président de la NEF
Le nouveau président de la National Empowerment Foundation ne souhaite pas favoriser l’assistanat. Il annonce une réorganisation complète de l’organisme.
Quelle est votre définition de la pauvreté ? Un manque de ressources, matérielles et financières, est considéré comme de la pauvreté. Le manque des nécessités de base, comme la nourriture et les vêtements ainsi que l’absence d’un toit constituent la pauvreté absolue. Toutefois, selon les paramètres du Millenium Development Goals (MDG), la pauvreté absolue n’existe plus à Maurice. Donc, pas de travail pour la NEF ? D’après les Sustainable Development Goals (SDG), nous sommes là pour éradiquer la pauvreté. C’est ce que nous faisons à travers nos différents projets. Je dois reconnaître toutefois que nous faisons pour le moment du « firefighting ».
[panel contents="Agé de 52 ans, Aryaduth Seesunkur détient un diplôme en Business Management et en gestion des ressources humaines. Il est actuellement Public Relations & Monitoring Coordinator dans une compagnie privée. Sa nomination à la présidence du conseil d’administration de la National Empowerment Foundation a pris effet à partir du 14 août." label="Un professionnel des relations publiques " style="info" custom_class=""]
Comment cela ? Avec le départ de l’ancien président, il y a eu comme un vide. Depuis ma nomination en août, je me suis attelé à rattraper le temps perdu. Plusieurs décisions sont restées en suspens. Il ne faut pas oublier que la NEF est une « non-profit organisation » et la NEF, le bras exécutif du ministère de l’Intégration sociale et de l’Autonomisation économique, a une grande responsabilité. Après un état des lieux, il faut maintenant privilégier les décisions stratégiques. Quelles sont ces décisions ? En priorité, la réorganisation de la NEF. Notez bien que je ne parle pas de restructuration car cela fait peur. En l’absence du ministre, j’ai présidé cette semaine une réunion avec les responsables du ministère de la Sécurité sociale pour justement revoir certains aspects du fonctionnement de la NEF. Il faut aussi renforcer le Top Management pour mieux encadrer les officiers et soutenir les initiatives. Une autre priorité est la distribution de matériels scolaires. L’échéance approche et nous devons faire vite pour enclencher les procédures d’appels d’offres. Peut-on s’attendre à d’importants changements ? Pas du tout. Il y a des problèmes ponctuels qui requièrent une attention urgente. Par exemple,  j’ai constaté que le suivi des demandes et plaintes des bénéficiaires n’est pas effectué de manière satisfaisante. Pour y remédier, j’ai recommandé la création d’un département de « Customer Care » à la NEF. Cette unité, qui travaille en collaboration avec le « Help Desk », introduit par le ministère de l’Intégration sociale et de l’Autonomisation économique, est une réussite car les dossiers en suspens sont mieux gérés. Quels sont les autres actions que vous avez prises ? Avec le ministre de tutelle, des Private Parliamentatry Secretaries, des députés et des membres du conseil d’administration de la NEF, nous avons effectué plusieurs  « site visits » dans des poches de pauvreté. Des représentants des organisations non-gouvernementales nous accompagnaient. Nous nous sommes rendus à Cité Anoska (Forest-Side), à Cité EDC (Rivière-Noire), à Panchavati (Rivière-du-Rempart) et à « Amba la rivière » (Roche-Bois). Nous avons aussi été à Roches-Noires, Moka, Ste-Catherine, et Vuillemin. Au cours de ces visites, l’équipe d’experts du Programme des Nations unies pour le développement (PNUD) était aussi présente. Nous sommes très touchés par la souffrance des gens. Tous les problèmes notés ne relèvent pas de la NEF, mais nous avons quand même été à l’écoute. N’est-on pas en train de transformer les pauvres en « assistés » ? Ce n’est pas la mission de la NEF d’encourager l’assistanat. Et encore moins le rôle de l’État de le favoriser. Notre appellation, elle-même, veut tout dire. On est la National Empowerment Foundation. On n’assiste pas, on aide à l’autonomisation des bénéficiaires. En tout cas, c’est cela notre mission. Dans nos programmes, il y a un module qui concerne « l’Adult Life Skills Training », à travers lequel nous  donnons aux bénéficiaires les outils nécessaires leur permettant de sortir de leurs conditions précaires. Pouvez-vous placer vos bénéficiaires en entreprises ? Bien sûr. Nous avons le « Placement and Training Programme ». Nous travaillons beaucoup avec les socités privées pour placer les demandeurs d’emploi. Est-ce un programme qui marche ? Je dois reconnaître qu’il y a un problème. Quand nous mettons des demandeurs en contact avec un employeur potentiel, certains sont plus préoccupés par le sort de leur aide sociale que par le travail. C’est navrant, mais c’est comme cela. On a beau leur expliquer qu’on ne pourra pas les soutenir à vie, que notre objectif est de leur permettre de devenir indépendants financièrement. Rien n’y fait. Par contre, il y en a qui sont très sérieux et veulent vraiment sortir de leurs conditions précaires. Pour ceux-là, on ne s’épargne aucun effort. Il faudrait pourtant trouver une solution à ce problème... Effectivement. J’en profite pour lancer un appel à ceux concernés pour qu’ils revoient leur position. Nous allons faire de la sensibilisation pour expliquer le pourquoi et les avantages de ce programme. Il faudrait une campagne tous azimuts sur le sujet pour qu’à la fin, nous en arrivons au but recherché. Quand le plan Marshall sur la pauvreté sera-t-il rendu public ? On attend un rapport préliminaire à la mi-novembre et le rapport final en décembre. L’équipe du PNUD a eu un programme très chargé et a effectué plusieurs visites dans les poches de pauvreté, dont à Cité Anoska et à Panchavati. On s’attend que le rapport aille aussi dans le sens d’une réorganisation  des services offerts par la NEF. J’ai moi même constaté que la NEF fait beaucoup d’activités, mais on n’a aucun moyen de mesurer son impact sur la vie des gens. Il est important pour nous de savoir jusqu’à quel point les différents programmes ont été des succès et ont eu un impact positif sur la vie des bénéficiaires. Un représentant du PNUD nous fera un suivi et une évaluation. Définitivement, des changements sont en vue. Il faudra s’y adapter.
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