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Yogita Babboo : «Je m’attendais à reprendre mon travail en janvier après le 60-0»

La présidente de l’Air Mauritius Cabin Crew Association (AMCCA) exprime ses inquiétudes face à la gestion actuelle de la compagnie aérienne. Selon elle, la priorité doit être donnée aux relations industrielles et à la transparence pour redresser la situation et restaurer la confiance.

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Que pensez-vous des pertes annoncées par la direction d’Air Mauritius (MK) ?
C’est choquant ! Fin octobre 2021, en sortant de l’administration volontaire, les dettes de MK étaient réglées et à peine trois ans après, la compagnie a accumulé des dettes de Rs 10 milliards ! On se demande où est passé l’argent que le gouvernement précédent avait « supposément » injecté dans la compagnie.

Comment les syndicats comptent-ils aider à redresser la situation ?
À ce jour, les syndicats n’ont pas été sollicités pour donner leur avis. On nous a juste informés de ce que le Chairman de MK a l’intention de faire.
J’aimerais préciser que l’AMCCA et Yogita Babboo ne sont pas là pour ternir l’image de MK ou pour faire de la démagogie . Cependant en tant que syndicat, l’association a le devoir de relever les failles dans l’entreprise qui nuisent au bien-être des employés et contribuent à donner une image négative de l’entreprise.

La direction critique certaines décisions passées, comme le passage de Heathrow à Gatwick. Êtes-vous d’accord avec ces critiques ?
Oui. À Londres, l’aéroport de Heathrow est le plus convoité par les compagnies aériennes et par les passagers, vu les connexions et la fréquence des vols. Le pire, c’est que la personne qui a cautionné cette décision est retournée comme un héros pour sauver la compagnie… On a appris, à travers le Chairman dans les médias, que la personne devait comparaître devant un comité disciplinaire car elle était en pourparlers avec Ethiopian Airlines et Airbus sur la régionalisation de MK.

Les comptes financiers ont du retard. Quel impact cela a-t-il sur les employés ?
Les employés ne sont pas rassurés. La compagnie, c’est leur « pie diri ». Ils ont traversé une administration volontaire il n’y a pas longtemps, avec une restructuration qui n’a pas marché. Et là, on voit les mêmes gens qui étaient impliqués dans la première restructuration revenir. 

La compagnie a vendu des avions pour en louer d’autres plus chers. Était-ce une bonne décision selon vous ?
Non, d’ailleurs, le Chairman, dans sa conférence de presse, a donné exactement les mêmes raisons que le syndicat a dénoncées depuis ces cinq dernières années, sur la chute de MK : le mismanagement, la vente de nos avions et l’achat de vieux avions qui coûtent très cher à maintenir.

Une enquête a été annoncée sur la gestion passée d’Air Mauritius…
Le budget 2020-2021 avait déjà alloué Rs 9 milliards à MK, dont Rs 3 milliards ont été utilisées pour rembourser les billets des passagers pendant la COVID-19 et pour couvrir les dépenses de la compagnie. Il faut comprendre pourquoi Airport Holdings Ltd (AHL) a reçu Rs 25 milliards et comment chaque sou a été utilisé, car MK n’aurait empoché que Rs 8 milliards, selon les déclarations du Chairman.

Rs 2,7 milliards ont été injectés dans le plan de pension, ce qui signifie que seulement Rs 2,3 milliards ont été alloués à la compagnie, une somme qui reste très faible pour relancer une compagnie aérienne dont le chiffre d’affaires se situe normalement entre Rs 20 et 30 milliards.

Il est essentiel de comprendre pourquoi MK a rapidement acquis 3 avions A350 après être sortie de l’administration volontaire, sachant que le plan de l’administrateur à l’époque était de réduire la flotte. Il faudrait également se demander si les dettes de MK sont liées à l’acquisition de ces 3 nouveaux avions.

De plus, il est important de savoir pourquoi, pendant l’administration, le top management a continué à percevoir leur salaire chaque mois, tandis que les employés, qui avaient droit au GWAS, n’ont pas reçu leur salaire pendant plusieurs mois.

Les employés craignent-ils de perdre leur emploi ?
Définitivement. Le Chairman n’a pas présenté sa vision pour MK ni le plan pour la compagnie. Il a ouvertement critiqué les employés de plusieurs départements lors de sa conférence de presse. Il a dévoilé des informations confidentielles sur les hôtesses et stewards ; le but était de discréditer le personnel. 

Que demandez-vous à la direction ?
Déjà, de dévoiler leur plan aux employés en toute transparence et de s’assurer que celui-ci prenne en compte tous les employés et non quelques-uns seulement.

Quels sont les plus grands soucis aujourd’hui ?
Il y a un gros problème avec le plan de pension. Les gens travaillent en espérant profiter de la pension à leur retraite, comme le prévoit notre Constitution en tant qu’État-providence, mais l’incertitude plane.

Quelle est votre position sur la gestion actuelle d’Air Mauritius et les choix stratégiques opérés ?
Il y a 20 ans, on avait 12 avions et aujourd’hui, on est au même point… Il faut aider MK à déployer ses ailes. Il faut injecter le montant nécessaire dans la compagnie et la laisser fonctionner librement. British Airways, Air France, Qantas ont tous reçu une aide financière massive des gouvernements et vont bien aujourd’hui car l’aviation est en plein essor. Même Air Seychelles, qui était en administration (pas volontaire), se porte très bien aujourd’hui.

Quelles sont les priorités immédiates pour redresser la situation ?
Il est crucial d’injecter du capital dans la compagnie et de prioriser la résolution des problèmes des employés, car si les travailleurs sont frustrés et démotivés, même le meilleur plan pour MK ne pourra pas aboutir. Il faut commencer par réexaminer les accords collectifs et résoudre les problèmes liés aux relations industrielles, car au cours des cinq dernières années, rien n’a été fait pour régler ces litiges.

Comment évaluez-vous le climat social au sein d’Air Mauritius actuellement ? 
C’est toujours tendu. Il faut redonner confiance aux employés au lieu de les bousculer.

Le dialogue social est-il encore possible ?
Where there is a will, there is a way. Le syndicat est toujours prêt à négocier, pour le bien-être des membres. C’est son rôle, mais le management aussi devra faire des efforts.

Où en êtes-vous avec l’affaire concernant votre licenciement en raison de votre engagement en tant que présidente de l’AMCCA ?
Le cas a été reporté à mai, ce qui est vraiment long, étant donné que j’ai déposé ma plainte en septembre 2023. Je m’attendais à reprendre mon travail en janvier, après le 60-0 lors des élections générales.

Étant donné que le Bureau du travail international est intervenu dans mon dossier de licenciement sous l’ancien gouvernement, et que ceux actuellement au pouvoir m’ont soutenue, reconnaissant la légitimité et la justice de mon combat, j’espère que mon cas sera résolu dans les plus brefs délais.

J’espère que justice sera rendue, car ma vie, ainsi que l’avenir de ma fille, sont en suspens. J’ai été martyrisée en tant que syndicaliste. Je ne comprends pas les attaques personnelles dirigées contre moi par le Chairman de MK, alors que les droits syndicaux sont bel et bien reconnus à Maurice.

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