Promouvoir Maurice comme une destination estudiantine pour les étudiants internationaux. Dans cette optique, les étudiants étrangers inscrits auprès d’un établissement d’enseignement reconnu à Maurice bénéficieront automatiquement d’un Work Permit de 20 heures par semaine. Comment les spécialistes des ressources humaines accueillent-ils cette mesure ? Quelle sera la contribution de ces étudiants au monde du travail ? Décryptage.
Les étudiants étrangers pourront travailler jusqu’à 20 heures par semaine à Maurice. Le ministre des Finances, Renganaden Padayachy, l’a annoncé dans son Budget 2021-22. Pour Elizabeth Keeve, Managing Partner de Bolt Talent Solutions, cette mesure vise à favoriser et à soutenir la croissance du pays. « Maurice, avec une population vieillissante, a besoin d’un soutien supplémentaire pour aider l’économie à se développer. »
Même son de cloche du côté de Vanessa Flynn, CEO de Bolt Talent Solutions. Les étudiants étrangers et les jeunes professionnels vivant à Maurice, dit-elle, contribueront positivement à la croissance économique du pays. Notamment en dépensant la plupart de leurs allocations/salaires sur l’île, ainsi que leurscontributions fiscales.
Pour sa part, Thierry Goder, Chief Executive Officer d’Alentaris, avance que plusieurs mesures ont été présentées afin de renforcer l’industrie du savoir. De ce fait, cette mesure ne l’étonne pas car plusieurs étudiants étrangers travaillaient déjà dans certains secteurs d’activité, comme le commerce, les supermarchés, food courts, centres commerciaux, entre autres. « Les étudiants seront exposés à de nouvelles méthodes d’apprentissage et d’enseignement mais ils feront aussi face à de nombreux défis dans le monde du travail. »
Face aux craintes que cette mesure puisse d’affecter l’emploi des jeunes Mauriciens, Thierry Goder explique que cette décision ne va pas chambouler le recrutement des Mauriciens. « En fait, ce sont les postes de travail qui ne sont pas remplis par des Mauriciens, donc aucune raison de s’inquiéter, puisque tout le monde a sa place au travail. »
Il reconnaît que l’emploi du temps sera essentiellement consacré à des préoccupations académiques mais les étudiants pourront même faire un stage dans une compagnie mauricienne. Ce qui va leur ouvrir les portes d’une multitude d’opportunités professionnelles dans le pays.
L’autorisation donnée aux étudiants étrangers pour travailler 20 heures par semaine est une mesure positive, dit Aurélie Marie, Head of Recruitment & Communication à Myjob. « Cela leur permet d’avoir une activité professionnelle et une source de revenus. Parallèlement les entreprises, restaurants ou commerces peuvent embaucher une ressource à temps partiel alors que de plus en plus de jeunes Mauriciens recherchent un emploi à temps plein et privilégient les horaires de jour. » Un étudiant qui a des cours en journée est disposé à travailler en soirée et les week-ends.
Sur le journal de l’emploi en ligne Myjob.mu, elle constate une demande des étudiants étrangers fraîchement diplômés principalement pour le secteur des TIC, le domaine légal et le Global Business, pour des postes dans le management. « Nous enregistrons également quelques demandes pour l’hôtellerie, notamment les étudiants ayant suivi une formation à Maurice de niveau bac+3/bac+5 en management hôtelier », soutient-elle.
Parlant du secteur informatique qui intéresse fortement les étudiants étrangers, Aurélie Marie pense que cette mesure répond principalement à la pénurie de main-d’œuvre qualifiée. Elle indique que d’autres secteurs connaîtront une hausse dans la demande d’emploi à la suite de la crise sanitaire. Des diplômés étrangers pourraient ainsi intégrer des emplois qui demandent une plus grande technicité.
Adilla Diouman-Mosafeer, directrice de Talent Lab : « Nous avons suffisamment de matière grise sur l’île »
Adilla Diouman-Mosafeer, directrice de Talent Lab, observe que l’industrie du savoir ne doit pas être une excuse. « Nous avons suffisamment de matière grise sur l’île pour promouvoir les secteurs de l’avenir. Ouvrir la porte à des jeunes étrangers pour 10 ans d’un seul coup n’est pas une stratégie adaptée dans le contexte économique actuel », insiste-t-elle. Cette mesure, estime-t-elle, ne fera qu’exacerber la frustration des jeunes. « Nous sommes en train de reproduire le schéma bangladais. Rien de plus. Nous pourrions instaurer une vraie stratégie de formation pour traiter le problème à sa racine. »
Le saviez-vous ?
Il y a une similarité dans les récentes mesures budgétaires au cours de ces dernières années. Le Post-Study Work Visa a été annoncé dans le Budget 2019-20, visant à permettre aux étudiants étrangers de travailler à Maurice dans divers secteurs d’activité. Initialement, cette mesure a permis aux étudiants étrangers d’obtenir un permis de travail pour une durée maximale de trois ans. Le Post-Study Work Visa leur a donné la possibilité de travailler à Maurice après avoir complété leurs études en biotechnologie, technologie de l’information et de la communication, FinTech et intelligence artificielle.
S’agissant de la récente mesure budgétaire 2021-22, la vision du gouvernement reste la même, c’est-à-dire encourager les étrangers à étudier, travailler, investir et vivre à Maurice. Nouveauté cette année : les étudiants internationaux inscrits dans un établissement d’enseignement reconnu à Maurice bénéficieront automatiquement d’un Work Permit de 20 heures par semaine et d’un Young Professional Occupation Permit d’une durée de 10 ans renouvelable après l’obtention d’un diplôme. Autre mesure phare pour promouvoir le secteur : le Higher Education Desk du ministère de l’Éducation envisage de travailler avec l’Economic Development Board pour promouvoir Maurice comme une destination estudiantine pour les étudiants internationaux.
En chiffres 3 500
C’est le nombre d’étudiants étrangers qui ont étudié à Maurice en 2020. Autre information mentionnée dans le Budget 2021-22 : il y avait quelque 600 étudiants étrangers dix ans de cela.
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