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Vishnu Lutchmeenaraidoo: pas de démission à ce stade

Pravind Jugnauth quittant le domicile de Vishnu Lutchmeenaraidoo à Beau-Bassin vendredi après-midi.
Le ministre des Finances, qui a rencontré Pravind Jugnauth vendredi après-midi, restera au gouvernement, selon toute probabilité. Mais son maroquin aux Finances demeure toujours sujet aux spéculations. Accalmie. Alors que le gouvernement de sir Anerood Jugnauth était sur le point de perdre son ministre des Finances, Vishnu Lutchmeenaraidoo serait rentré dans les rangs. Sa démission ne serait plus d’actualité. Du moins, pas pour le moment. Tout a été mis en œuvre par le gouvernement pour qu’il ne claque pas la porte. Pravind Jugnauth l’a rencontré vendredi en fin d’après-midi dans le but de trouver un terrain d’entente. Le leader du Mouvement Socialiste Militant (MSM) s’est rendu au domicile de Vishnu Lutchmeenaraidoo, à Balfour, Beau-Bassin, où ce dernier se remet d’une bronchite aiguë.  C’était le second rendez-vous entre les deux hommes depuis mercredi. Pour l’heure, la question qui se pose est : conservera-t-il le portefeuille des Finances ou occupera-t-il d’autres responsabilités ministérielles. Le ministère des Finances pourrait éventuellement être récupéré par le Bureau du Premier ministre. Si cette dernière option se concrétise, Vishnu Lutchmeenaraidoo héritera d’un autre ministère important et qui lui permettra de rester dans son domaine de prédilection. Phase de silence La rencontre d’environ une heure et demie avec Pravind Jugnauth aurait cependant eu une grande importance et aurait permis d’éclaircir bien des choses. Le leader du MSM est cependant resté muet par rapport à ce tête-à-tête. Depuis le début de cette guerre des nerfs, Pravind Jugnauth s’est d’ailleurs muré dans le silence. Le ministre des Finances, lui non plus, ne pipe mot, laissant juste passer le message qu’il est dans une « phase de silence ». Plus tôt dans la journée, Vishnu Lutchmeenaraidoo avait posté un poème lourd de sens de Rudyard Kipling sur sa page Facebook. Nous apprenons cependant, de diverses sources, qu’une rencontre entre le ministre des Finances et le Premier ministre, sir Anerood Jugnauth, la semaine prochaine est une quasi certitude. Ces derniers jours, les spéculations vont bon train. À un moment, il était question que Vishnu Lutchmeenaraidoo démissionne de son poste de ministre des Finances dimanche. Soit après le départ du président malgache, Hery Rajaonarimampianina, invité de l’État aux célébrations du 48e anniversaire de l’accession de Maurice à l’Indépendance. « Soit il demeure aux Finances, soit il part. Il a été élu par la population pour être le Grand argentier. C’est une question d’amour-propre. Accepter d’être ministre des Affaires étrangères, c’est accepter d’être humilié davan-tage », glissait un de ses plus proches collaborateurs, vendredi matin. Au sein de la majorité, l’on rejette de manière catégorique tout départ du ministre des Finances. Ceux qui ont été au plus près des négociations, jeudi et vendredi, afin que Vishnu Lutchmeenaraidoo n’abandonne pas l’Alliance Lepep soutiennent que le ministre aurait accepté de remplacer Étienne Sinatambou aux Affaires étrangères. Seule ombre au tableau : le refus de dernière minute de Pravind Jugnauth de confier le portefeuille des Tic à Étienne Sinatambou – qui n’a pas laissé de bons souvenirs au sein de ce ministère que Pravind Jugnauth a laissé à Roshi Bhadain après avoir démissionné en juillet dernier. En cas de départ, soulignent les proches de Vishnu Lutchmeenaraidoo, le ministre pourrait invoquer son âge et ses soucis de santé pour justifier sa démission. Il se remet d’ailleurs de sa bronchite qui l’a empêché de se rendre aux quatre dernières réunions du Conseil des ministres.
 

Sur Facebook : le « If » de Kipling

Des mots pour résumer les maux. C’est ainsi qu’on pourrait interpréter ce que Vishnu Lutchmeenaraidoo a posté sur sa page Facebook depuis la semaine dernière. Après son désormais célèbre « Si je peux offrir mon dos comme un pont pour que passe la génération nouvelle, j’aurai rempli mon contrat », il est passé dans les allusions vendredi avec le fameux poème « If » de Rudyard Kipling. Écrit en 1910, ce poème célèbre le stoïcisme sous l’ère victorienne. Époque où il fallait retenir ses émotions et dominer ses passions, celle où distinction était faite entre l’homme fort et endurci face à l’homme faible, esclave de ses sentiments. Dans le contexte actuel, c’est la sensibilité qui est en jeu. Celle où l’on exprime ses émotions et ses peines. Le poème en appelle au courage de celui qui traverse une épreuve. Les premières lignes de ce texte en disent long sur les pensées du Grand argentier : « If you can keep your head when all about you are losing theirs and blaming it on you. If you can trust yourself when all men doubt you. But make allowance for their doubting too, If you can wait and not be tired by waiting. Or being lied about, don’t deal in lies. Or being hated, don’t give way to hating. And yet don’t look too good, nor talk too wise ».
 

SAJ - Lutchmeenaraidoo: le duo gagnant

Si l’Alliance Lepep a été plébiscitée aux dernières élections législatives, c’est en grande partie grâce au tandem sir Anerood Jugnauth-Vishnu Lutchmeenaraidoo, ajouté au rejet de l’alliance conclue entre le PTr et le MMM. Le Premier ministre et le ministre des Finances parlaient d’un deuxième miracle économique, comme celui qu’ils ont accompli durant les années 80. Ce qui avait sorti Maurice de l’ornière. Le rapprochement entre les deux hommes a été quelque peu surprenant. Après avoir faussé compagnie à Paul Bérenger - après que ce dernier se soit rapproché de Navin Ramgoolam, Vishnu Lutchmeenaraidoo avait annoncé sa «retraite politique». Elle a été de courte durée, car il a vite officialisé sa candidature sous la bannière de l’Alliance Lepep aux côtés de sir Anerood Jugnauth et Ravi Rutnah dans la circonscription n° 7 le 10 octobre 2014. La suite, on la connaît. Électron libre au sein de l’Alliance Lepep, ce n’est que le mois dernier que Vishnu Lutchmeenaraidoo a intégré le MSM.
 

Collendavelloo ne s’attend pas à une démission

Le ministre des Services publics, qui était l’invité d’honneur du Curepipe College à l’occasion des célébrations nationales de l’Indépendance, a brièvement répondu aux journalistes concernant la situation de Vishnu Lutchmeenaraidoo au sein du gouvernement. « Je lis ce que je vois dans les journaux. Je ne suis pas très concerné. J’attends de voir les développements », a-t-il déclaré. Interrogé sur le fait s’il s’attend à une démission du Grand argentier dans les prochains jours, Ivan Collendavelloo dira simplement : « Je ne vois pas pourquoi je devrais m’attendre à une démission. » Il a auparavant salué le parcours du Curepipe College qui a, selon lui, réalisé de grands progrès ces dernières décennies.
 

« Business as usual » au trésor public

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/div> Malgré l’absence de Vishnu Lutchmeenaraidoo, au ministère des Finances, c’est « business as usual », explique-t-on. À trois mois de la présentation du Budget 2015/16, c’est le Secrétaire financier Dev Manraj qui est à la baguette, jonglant avec les différents comités qui continuent à se réunir malgré l’absence du ministre. Ce dernier a également raté le Business Forum vendredi. Cet événement a été organisé à l’hôtel Maritim à l’intention de la délégation malgache présente à Maurice dans le cadre des célébrations de l’Indépendance. C’est Étienne Sinatambou, ministre des Affaires étrangères, qui y a remplacé Vishnu Lutchmeenaraidoo. Si la routine est de mise au trésor public, le flou persistant sur le devenir de Vishnu Lutchmeenaraidoo reste cependant dans un coin de la tête de nombreux responsables politiques. Si d’un côté, on est persuadé que le ministre des Finances restera afin de respecter la promesse d’un renouveau économique, de l’autre, on affirme que la situation risque de dégénérer si le Premier ministre n’intervient pas pour déterminer les responsabilités de chacun. Le dernier contentieux en date est le dossier du traité fiscal indo-mauricien. L’intransigeance de Vishnu Lutchmeenaraidoo, notamment sur l’article 13 (taxe sur la plus value) lors de la dernière réunion mixte à Maurice, n’a pas été au goût de tout le monde, dont le ministre des Services financiers Roshi Bhadain. « Le ministre des Finances et celui des Services financiers ne semblent pas être sur la même longueur d’onde sur cette question. C’est Roshi Bhadain qui s’occupe du secteur financier, mais comme il s’agit de la fiscalité, c’est le ministre Vishnu Lutchmeenaraidoo qui devra signer le traité. Roshi Bhadain l’aurait certainement déjà signé s’il était ministre des Finances », explique une source au sein du gouvernement. En relançant son antenne de promotion de la juridiction mauricienne, la Financial Services Promotion Agency (FSPA), la semaine dernière, le ministre des Services financiers a souligné « qu’en tant que gouvernement responsable, nous regardons au-delà du traité ». La FSPA est pour le ministère des Services financiers, ce que le Board of Investment est pour le ministère des Finances. Si le BoI scrute des Investissements Directs Étrangers (IDE) variés, la FSPA, (dont le Chief Executive Officer est Harvesh Seegolam, un ancien du BoI), est exclusivement concentrée sur la promotion du centre financier mauricien.
 

Ces dossiers qui ont mis le feu aux poudres

Trois dossiers précis ont mis à mal les relations entre Vishnu Lutchmeenaraidoo et Roshi Bhadain. Il y a le projet de Yihai Garden que le ministre des Finances a transformé en Smart City de Pailles. Au départ, la SIC veut vendre le Domaine Les Pailles. La société chinoise Yihai est sélectionnée à l’issue d’un appel d’offres international et entend acheter les 96 arpents du domaine pour Rs 541 millions. Quand l’Alliance Lepep arrive au pouvoir, Vishnu Lutchmeenaraidoo conseille à la SIC de devenir actionnaire de la Yihai International Investment Management Ltd à hauteur de 30 % au lieu de revendre ces terres à la société chinoise. La SIC n’allait pas injecter la moindre roupie dans le projet, mais aurait récolté la somme garantie de Rs 500 millions par an. Le hic, c’est que le ministère de la Bonne gouvernance et des Services financiers soupçonne qu’il y a des anomalies autour du projet, que des commissions auraient été versées. La semaine dernière, le dossier est envoyé à l’Icac à la demande du Conseil des ministres. Pour Vishnu Lutchmeenaraidoo, c’est une atteinte à sa crédibilité. Le ministre des Finances n’apprécierait pas non plus les incursions de son collègue de la Bonne gouvernance et des Services financiers dans son pré carré. Outre le fait d’être toujours flanqué de son Financial Secretary Dev Manraj, Roshi Bhadain a renégocié le traité de non-double imposition avec l’Inde. Ce dernier semble aussi lui faire de la compétition avec le projet d’Heritage City alors qu’il a lui-même annoncé la construction de plusieurs Smart Cities à travers l’île.
 

Discours à la nation: manœuvre d’apaisement

Le message qu’adressera le Premier ministre, sir Anerood Jugnauth, ce samedi, à la nation à l’occasion des célébrations du 12-Mars sera suivi de près et devrait donner des indications claires concernant la situation au sein du gouvernement. Le discours de SAJ s’inscrit dans un contexte très particulier au vu du malaise qui règne au sein du gouvernement, qui prête à Vishnu Lutchmeenaraidoo l’intention de démissionner. Cela devrait également être la toute première sortie publique du chef du gouvernement depuis le début de cette controverse. Si au bâtiment du Trésor, le service de communication du Premier ministre refuse de donner la moindre indication sur la teneur du discours, il nous revient cependant que SAJ devrait profiter de l’occasion pour tenter d’apaiser la situation. Une manière pour lui de manifester son soutien à son Grand argentier, malgré la situation de crise. « Il ne faut pas oublier que Vishnu Lutchmeenaraidoo et le Premier ministre ont été les moteurs de l’Alliance Lepep aux dernières élections. SAJ compte toujours sur son ministre des Finances », laisse-t-on entendre. Ainsi, selon cette même source, en ce faisant, le Premier ministre voudra démontrer à la population qu’il maîtrise parfaitement la situation et que son leadership reste incontestable.
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