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Vijay Coomar Joypaul : le diplomate, le lettré et le beau-frère

La vie et les œuvres de l’ex-ambassadeur Vijay Coomar Joypaul sont désormais reconnues grâce à un livre qui lui est consacré. L’ouvrage, intitulé « Vijay Coomar Joypaul – Loving Humanity » contient des contributions d’un certain nombre de personnalités. Il a été lancé à Ébène le mercredi 16 novembre dernier.

Véritable concert de louanges pour Vijay Coomar Joypaul, ex-ambassadeur, homme de culture, mais aussi beau-frère du Dr Navin Ramgoolam. Les personnalités les plus contrastées – sauf celles apparentées au MSM et ML – ont marqué de leur présence l’évènement : de l’ex-PM, Navin Ramgoolam, le député rouge, Arvin Boolell, son collègue bleu Kushan Lobine, l’ancien ministre et ambassadeur Jean Claude de L’Estrac, à d’ex-présidents de la République, en passant par d’anciens hauts fonctionnaires et journalistes-vedettes, entre autres. 

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C’est dire l’étendue du réseau de Vijay Coomar Joypaul, qui aurait pu se flatter d’avoir côtoyé quelques grands hommes politiques du monde. Lui, le fils d’une modeste famille de Souillac, formé au collège Royal de Curepipe et dont la connaissance de la littérature française lui vaudra la reconnaissance du petit cercle élitiste francophone local. 

Mais, à Souillac, son village natal, Vijay Coomar Joypaul n’avait-il pas tôt montré des dispositions d’ouverture en se rendant au domicile de Robert Edward-Hart, poète d’expression française et féru d’alchimie ? Heureusement, le collège Royal fera de lui un véritable citoyen bilingue, forgeant en lui l’amour et la passion des mots, puisant à la fois chez Baudelaire et Tennyson. À Curepipe, il est studieux et récolte de bonnes notes et pas que chez les deux seuls « dieux » de ce collège, Daniel Koenig et Georgy Espitalier-Noël (dixit Yvan Martial). D’autres instits dans l’ombre et d’autres communautés, à l’instar de Ram Prakash, enseignant de la culture indienne, lui insuffleront le goût de l’effort et de la perfection. Ce qui explique qu’il décrochera une bourse d’études en sociologie à Poona, en Inde. C’est incontestablement cette triple influence culturelle qui fera de lui ce type de diplomate mauricien, déjà si rare, durant les années 80-70, et totalement disparu de nos jours.  

Bureau de ssr

De retour à Maurice, il s’engagera dans la fonction publique au bureau du PM d’alors, sir Seewoosagur Ramgoolam (SSR). À partir de là, il connaîtra une véritable ascension dans l’administration et la diplomatie, après son passage au ministère des Affaires étrangères, du Tourisme et de l’Émigration. Une période que l’ex-ambassadeur Vijay Makhan résume dans sa contribution au livre. « Vijay s’était bien familiarisé avec l’administration et était très à l’aise avec la nature bureaucratiquement de nos affectations (…). Ses talents en communication et comme un officier de liaison fiable étaient reconnus et pris en considération par les supérieurs d’alors. Après tout, il savait analyser et commenter sur la radio nationale les récentes élections en Grande-Bretagne… ».

Un pur exalté grâce à la littérature, son parcours éducatif, jusqu’à ses études en diplomatie en Angleterre, mais aussi pour avoir été au centre du pouvoir à Maurice et dans le secret des dieux en géopolitique, Vijay Coomar Joypaul a, pourtant, refusé toute idée d’écrire ses mémoires, car il lui aurait fallu déballer des secrets d’État, des négociations de coulisses. Il en livre un très mince exemple dans les pages où il décrit la personnalité de sir Seewoosagur Ramgoolam, sa naissance, son engagement, ses combats et les élections. Il réfute ainsi un passage contenu dans le livre « CIA - Guerres secrètes 1981-1987 », du journaliste Bob Woodward (ce dernier et Carl Bernstein, tous deux du Washington Post sont à l’origine de l’Affaire Watergate qui poussa le président américain Richard Nixon à démissionner en août 1974).

Selon Bob Woodward, « les services secrets américains ont donné un coup de pouce à ce qu’il appelle « le pro-western leader of Mauritius » (NDLR : Sir Seewoosagur Ramgoolam) dans sa campagne électorale ». Le journaliste américain, cité par Vijay Coomar Joypaul, écrit à ce propos : « A few dollars could win, or buy, the election. » Pour attester du contraire, Vijay Coomar Joypaul raconte qu’en 1981, quelques jours avant les élections générales à Maurice, SSR est reçu à la Maison-Blanche par le président Ronald Reagan, en présence, entre autres, du général Haig et de l’ambassadeur Jesseramsing.  Vijay Coomar Joypaul rapporte la conversation suivante : « ‘What can we do for you ?’ lui demande le Président américain. SSR lui répond : ’You know Mauritius well. I am not here to ask anything’ ». 

Selon Vijay Coomar Joypaul, durant les 25 minutes de conversation entre SSR et Ronald Reagan, il n’aurait été question que du « problème soudanais, de la nécessité d’une stabilité et d’une unité nationale et du problème de la famine en Éthiopie. Ce qui lui tenait à cœur, ce n’était pas sa réélection, mais le sort d’un pays africain du tiers-monde en mal de stabilité ; la cause pour laquelle il plaidait, ce n’était pas celle du pouvoir par tous les moyens, même les plus dédaigneux, mais celle des milliers de vies humaines, qu’il fallait sauver ». 

Sans doute méconnu du grand public – la seule personnalité publique connue associée à son nom est son frère, le journaliste Jugdish Joypaul –, Vijay Coomar Joypaul, avant sa maladie, était aussi un bon vivant, aimant les bons plats avec un penchant pour les « drinks » et se plaisait en la compagnie des gens cultivés. Boulimique de la lecture et des connaissances générales, il était sans doute un des derniers « spécimens » de cette génération d’une île Maurice qui se cherchait durant les années de la Guerre froide, cette période où notre pays marchait sur la corde raide face à ses enjeux économiques et son appartenance aux pays non-alignés.

« Vijay Coomar Joypaul: Loving Humanity » Imprimée par Tee-Printers

 

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