Actualités

Vigiles après la retraite : des proies faciles pour malfrats de tout acabit

Ce septuagénaire a passé quatre jours à l’hôpital après avoir été agressé sur son lieu de travail.

Nombreux sont ces retraités qui prennent de l’emploi comme vigile, de nuit ou de jour, au péril de leur vie pour joindre les deux bouts. Ils se font souvent attaquer par des individus sans vergogne, parfois pour pas grand-chose. Ce genre de délits est en hausse.

Publicité

Ils sont présents sur les chantiers de construction, dans les grandes surfaces ou dans les bâtiments publics et privés pour assurer la sécurité. Nous les voyons, parfois en uniforme, souvent en civil, assis sur une chaise ou dans une guérite de fortune avec pour seul compagnon un petit récepteur radio.

Contre vents et marées, ces « vieux » vigiles sont fidèles au poste, 7 sur 7, au lieu de profiter d’une retraite pleinement méritée. « Bisin travay parski lavi difisil. Tou kiksoz inn ogmante e ti kass pansion la pa ase pou lalimyer, rasion e delo plis lezot depans », laisse entendre un de ces retraités embauchés comme veilleurs de nuit. Mais qui assure leur sécurité à eux ? Si c’est dans un lieu fréquenté, « ça va », dit-il. Mais si c’est dans un coin retiré, « pa kapav fer nanie, bizin gete e sonn lapolis. E prie ki zot pa fer ou nanie », dit Michel*, âgé de 66 ans. Il ne cache pas que leurs conditions de travail sont difficiles et que les dangers sont bel et bien réels dans « sa sosiete kinn vir ambalao-la ».

Depuis le début du mois, deux agressions sur ces vigiles ont été rapportées à la police. Samedi dernier, un gardien de nuit a été agressé sur son lieu de travail à Pamplemousses, alors que le 10 février, un autre s’est fait attaquer dans les basses Plaines-Wilhems. « Nou pena swa. Nou kone li riske sa job la, me ki pou fer kan ou bizin larzan pou nouri ou fami », poursuit notre interlocuteur.

Samedi 18 février, Boomeshwar B., bientôt 70 ans, se pointe sur son lieu de travail à Grande-Rosalie, Pamplemousses. Cela fait cinq mois que cet ancien laboureur exerce le métier de vigile. « J’étais aussi ‘salesman’, mais à la suite d’une maladie, j’ai dû cesser de travailler. Monn pran sa travay la parski bisin roul lakwizinn e mo ti impe plin dan lakaz », dit-il.

Oeil au beurre noir

Mais ce soir-là, les choses ne se passeront pas comme prévu. L’habitant de Piton, qui est seul sur son lieu de travail, se fera attaquer par deux individus. « Vers 22 heures, j’ai entendu siffler. Deux jeunes se sont présentés. Zot dir zot pe rod tang. Zot inn atak mwa par sirpriz. Monn defan mwa, me zot inn ras mo tors e agres mwa. Mo ti per zot tap mwa dan mo latet parski monn fer enn loperasion », dit-il. Les deux malfrats lui ont volé son cellulaire et son porte-monnaie qui contenait Rs 800. Le vieil homme a passé quatre jours à l’hôpital du Nord. Il a pu rentrer chez lui mardi.

Le visage boursoufflé, arborant un œil au beurre noir, Boomeshwar B. ne cache pas qu’il a eu peur pour sa vie. La police, alertée, est à la recherche des suspects.

Le 10 février, c’est à Réduit qu’un vigile s’est fait attaquer par des voleurs. Ce gardien de 64 ans, affecté à une station-service, nous fait le récit de cette soirée. « Je ne fais que le service de nuit, dit Pravesh*. J’etais à mon poste quand quatre individus m’ont surpris. Zot met tors lor mo figir pou mo pa trouvé. Zot inn zour mwa. Zot dir mwa pa bouze. Zot inn atas mo lame ek mo lipie. Zot ti pe rod kof. » Mais ils n’ont pu aller au bout de leur méfait, car, selon le sexagénaire, une patrouille de la compagnie Brinks s’est pointée. Cela les a fait fuir.

Ce père de famille nous fait part qu’il travaille pour financer les études de son fils. « Il est au collège. Sa mère travaille dans des champs, et moi, je suis à la retraite. Sa kas pansion la pa ase. Mo travay 12 ertan par zour », explique-t-il. Après l’attaque, un second vigile l’a rejoint comme renfort.


Michel : «Je touche Rs 8 000 par mois»

Michel*, un Portlouisien de 66 ans, travaille comme vigile depuis un an. Ce veuf explique que sa journée de travail ne commence que le soir venu. « Je rentre à 18 heures pour terminer à 6 heures le lendemain. Je travaille sur un site dans le Nord » nous dit-il. Le sexagénaire travaille tous les jours. « Je me dois de le faire, car ma pension seule ne me permet pas tenir le mois. Avec ce travail, je touche environ Rs 8 000 par mois ». S’il soutient n’avoir pas rencontré de problème sur son site de travail, il dit néanmoins que si cela devait survenir, « Pa pou kapav fer nanie. Bizin les ale. »

« S’il arrive que des voleurs nous surprennent, nous ne pourrons rien faire pour nous défendre, si ce n’est qu’appeler la police ou les laisser partir », lâche le retraité. Pour ce vigile, ce sont les employeurs qui s’en tirent à bon compte en embauchant des retraités. « Nous ne payons pas l’autobus. Certains sont alors postés sur des sites éloignés de leur domicile. Les employeurs n’ont donc pas à nous rembourser le coût du ticket », nous dit-il.

Guy*, 77 ans, est du même avis. Voilà un an et demi qu’il travaille dans la capitale. « Il n’y a pas de congé. Nous travaillons 7 jours sur 7. Nous ne percevons pas d’heures sypplémentaire. Toute absence est déduite du salaire. Et s’il se passe quelque chose de travers, vous êtes mis à la porte », dit-il. « À mon age, que puis-je faire ? J’ai des provisions à faire. Un loyer à payer… Il me faut ce travail », ajoute-t-il. Quid d’une couverture médicale ? « Je ne sais pas trop comment cela se passe. Me tan ki mo kapav travay mo pou trase », lâche-t-il.

Le gérant d’une compagnie de gardiennage : «Ces personnes sont engagées sous contrat»

Le gérant d’une compagnie de gardiennage, explique, sous le couvert de l’anonymat, que la pratique d’avoir recours aux retraités est très fréquente. « Il y a la Private Security Licence qui est rigoureusement contrôlée par la Police Act 2006. Il y a des critères à respecter. Le postulant doit avoir un certificat de moralité, être âgé entre 45 et 50 ans pour pouvoir exercer comme agent de sécurité. Mais pour ceux qui est d’être gardien de nuit, c’est différent. Ce n’est pas aussi strict. C’est pourquoi beaucoup de compagnies font appel aux retraités. Il n’y a pas de transport à rembourser. Ils sont pris sur la base de contrat ».

Me Vikash Rampoortab : «C’est à la personne de décider si elle peut travailler»

« La  loi dit qu’une personne peut travailler jusqu’à ses 65 ans. Passé cet âge, c’est à elle de décider si elle peut toujours travailler dans le secteur privé. Il n’y a aucune loi qui l’en empêche. L’accord se fait entre l’employeur et elle en ce qui concerne les conditions de travail. »

 

Notre service WhatsApp. Vous êtes témoins d`un événement d`actualité ou d`une scène insolite? Envoyez-nous vos photos ou vidéos sur le 5 259 82 00 !