Bien que les sextoys soient interdits à la commercialisation, leur utilisation est quand même entrée dans les mœurs à Maurice. Ils s’imposent d’ailleurs comme une partie intégrante de la vie sexuelle d’un grand nombre de Mauriciens. La preuve : le grand nombre de magasins en ligne qui proposent ces produits et les jouets érotiques qui sont prisés et se vendent comme des petits pains.
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Si jadis évoquer le mot sextoy était synonyme de regards gênés ou de remarques embarrassées, tel n’est plus le cas. Les sextoys ou jouets érotiques font aujourd’hui partie de la vie sexuelle de nombreuses personnes à travers le monde et Maurice n’échappe pas à la règle. Le sextoy est devenu un allié incontournable des couples comme des célibataires.
C’est une page Facebook où on vend des jouets érotiques qui a attiré notre attention. « N’est-ce pas illégal ? », nous sommes-nous demandé. En regardant les lois, nous constatons qu’effectivement ces produits sont interdits à la vente. Pourtant, il suffit d’une recherche rapide pour voir le grand nombre de personnes qui, sous des prête-noms, s’adonnent au business de sextoys.
Sur une des pages, il y a un numéro. Notre curiosité est aiguisée et voulons avoir plus de détails sur la manière dont ces produits pénètrent le marché et s’il y a une clientèle. Nous composons le numéro. Ça sonne. Après trois sonneries, un monsieur nous répond. « Allô, c’est monsieur J… ? », demandons-nous à la personne au bout du fil. Après un moment de silence, il répond : « hein ? oui oui ! ». C’est là que nous comprenons que ce vendeur opère sous un faux nom.
Nous lui disons que nous sommes intéressés à acheter des sextoys. « Ti p vander. In fini. Capav dans des trois mois pou gagner », lance le dénommé J…. Nous continuons notre search sur Facebook et tombons sur le numéro d’une autre personne qui commercialise ces produits illicites sur le territoire mauricien. Nous l’appelons et cette fois-ci, une personne parlant indien nous répond. Nous essayons de converser dans sa langue et lui demandons s’il a des sextoys disponibles mais il nous raccroche au nez.
C’est de là que nous avons l’idée de créer un faux profil sur Facebook pour entrer en contact avec des vendeurs de jouets érotiques. À peine notre compte activé, nous commençons à chercher des pages et des personnes dans ce circuit. La majorité des vendeurs n’ont pas de numéro de téléphone et demandent aux potentiels acheteurs de les contacter via Messenger. Nous leur envoyons des messages. L’attente sera longue. Certains prendront des heures à nous répondre.
Finalement, un des vendeurs nous répond. Il nous demande de lui envoyer le code du produit qui nous intéresse. Il nous envoie même une fiche avec tous les produits disponibles. En lui donnant le code, il nous donne le prix. « Pas ress bocou. Ou bizin fair vite », nous dit-il. Nous lui demandons s’il n’y aura pas d’autres produits qui seront bientôt disponibles, il nous dit « pas de sitôt. Ban produits in bloquer la douane à cause ban problem corona ».
Un autre nous explique que c’est lors de ces déplacements à l’étranger qu’il rapporte quelques produits. Donc, il n’y a pas beaucoup de produits alors que la demande ne fait qu’augmenter. Précisant que c’est le principe de « first come first serve » qui est appliqué. Il nous envoie des photos de ce qu’il a à vendre ainsi que les prix. « Pa gagne discount ? ». À cette question, il répond par l’affirmative, ajoutant que c’est avec beaucoup de difficultés que ces produits arrivent à Maurice. « B pa pou gagne problem sa ? », demandons-nous au vendeur. « Non non ! Pas illegal sa », lance notre interlocuteur.
Une autre personne qui commercialise des jouets érotiques revient vers nous, toujours par message. Elle nous demande ce que nous souhaitons acheter, si c’est pour un homme ou une femme. « Mo pa trop cone sa ban zafair la. Ki ou conseille moi ? », lui disons-nous. Elle nous propose un godemichet de 20 cm qui est vendu à Rs 2 500. « Si ou pa pren pas asterla ki ou pou regagner. Ou pou bizin atan bocou avant lot cargaison rentrer ». Nous lui posons d’autres questions : y a-t-il de nombreux acheteurs ? Est-ce un side-business ? Sentant qu’il y anguille sous roche, le vendeur arrête de nous répondre.
Finalement nous tombons sur un vendeur qui est beaucoup plus ouvert que les autres et qui ignore que nous lui posons des questions pour notre article. « Ou coner ban dimoun zordi envi realise zot ban fantasme. Kuma mo pou dir ou, sa ban zafair la aide ou pimente ou la vie couple. De nos zour pena zis costume ek fouette. Ena lot zafair », explique ce dernier.
Ajoutant qu’aujourd’hui, la vente des sextoys a grimpé étant donné que de nombreux Mauriciens sont intéressés par ces produits. « Les Mauriciens en sont friands. Ils sont plus épanouis sexuellement. Toutefois, ces produits restent difficilement accessibles. Nous, les vendeurs, essayons de vous aider en prenant des risques pour que vous ayez ce que vous cherchez », indique-t-il.
D’ailleurs, il n’y a qu’à faire un tour sur les différents comptes et pages où des sextoys sont proposés pour réaliser que nombreux sont les Mauriciens qui achètent ces jouets ou qui leur montrent un vif intérêt. Les commentaires sont multiples. Nombreux sont ceux qui remercient ces vendeurs pour les produits qui leur ont été vendus et qui les aident.
Plusieurs de ces vendeurs sont pressés d’écouler leurs produits. Ils nous donnent rendez-vous le même jour ou le jour d’après, dans la région que nous souhaitons. Toutefois, nous les avons tous décommandés parce que nous savons que c’est illégal.
Vijay Ramanjooloo, psychologue : «Cela ne doit pas affecter la relation»
« Je pense que cela vient nourrir certains fanstasmes et surtout épicer la vie du couplé. Cela peut aider la plupart du temps à déclencher l’orgasme, même si une personne sent une excitation mais qui ne peut pas dépasser un certain seuil, là, cela lui permet de dépasser ce seuil. L’erreur, c’est que, quelquefois, elle croit l’utiliser de manière systématique et exclusive car je tiens à souligner quil faut veiller à ce que cela ne devienne pas le seul mode d'excitation des zones érogènes... au risque d’affecter la vraie relation à deux dans la réalité. »
Les préférés
- Godemichet
- Vibromasseur
- Pompe pour pénis
- Plug anal
- Boules de geishas
- Gode ceinture
- Menottes
À partir de Rs 500…
Si vous voulez investir dans un sextoy, il faut savoir que ces produits se vendent à des prix exorbitants contrairement à d’autres pays où ils sont en vente libre ou même en ligne. Cela est dû aux risques que prennent les vendeurs pour faire venir des sextoys. Voici quelques prix sur le marché.
- Godemichet : Rs 2 000 à 3 000 (selon la longueur)
- Mini vibromasseur : Rs 900 à Rs 1000
- Anneaux en silicone : Rs 500 (2 pièces)
- Menottes : Rs 1 000
- Boules de geishas : Rs 750 à Rs 1 000
- Pompe pour les seins (mamelons) : Rs 2 000 à Rs 2 500
La douane sur le pied de guerre
Au niveau de la douane, on indique que c’est un délit sous la Section 86(1) du Criminal Code (Supplementary) Act, d’importer, transporter ou exporter toute chose obscène. « La loi prévoit des sanctions en cas d’infraction », souligne-t-on. On fait aussi ressortir qu’outre les contrôles aux frontières, la douane applique les lois sur le marché local.
Amende de Rs 100 000
Toute personne reconnue coupable de vente de sextoys risque une peine d’emprisonnement (sous une charge de Dealing with obscene matters), n’excédant pas 10 ans, ou d’une amende n’excédant pas Rs 100 000. Par ailleurs, la douane et la police se réservent le droit d’interroger tout individu qui importe (ou qui commercialise) des jouets pour adultes à Maurice. Si ce dernier ne peut fournir des explications, l’objet sera confisqué, analysé et ensuite détruit. Par ailleurs, les Consumer Protection (Control of Imports) Regulations de 2017 du ministère du Commerce interdisent aussi l’importation et l’exportation de sextoys.
Les ruses des importateurs
La commercialisation de ces produits est interdite par la loi. Cependant, selon nos recoupements, les commerçants de sextoys sont souvent des importateurs d’autres objets. Ils en profitent donc pour dissimuler « quelques jouets » dans leurs cargaisons. Les soupçons se tournent vers la dissimulation de ces jouets parmi d’autres. La source souligne que certains importateurs cachent des objets illicites, dont des sextoys, dans des cargaisons de jouets ou d’équipements et ils passent inaperçus.
L’autre façon d’introduire ces jouets, est de les mettre tout simplement dans les valises. Ils peuvent passer pour des tubes de parfum ou des brosses à cheveux et ils ne sont pas détectés par les chiens renifleurs. Mais les douaniers veillent au grain et il est beaucoup plus difficile d’importer des sextoys par voie postale car ils inspectent chaque colis avant qu’il soit livré et le passent aussi par un scanner.
40 sextoys saisis en 2019
D’avril 2017 à septembre 2019, 61 sextoys ont été saisis. En 2017, 21 sextoys avaient été saisis dans le port. Par contre, en 2018 aucune saisie n’avait été enregistrée. L’année dernière, d’avril 2019 à septembre, pas moins de 40 sextoys ont été appréhendés par la douane. Ces objets étaient arrivés dans des colis par la poste.
Date | Lieu | Quantité |
---|---|---|
18.04.17 | Le port | 21 |
22.04.19 | Bureau de Poste (Section: Colis) | 6 |
22.05.19 | Bureau de Poste (Section: Colis) | 4 |
31.05.19 | Bureau de Poste (Section: Colis) | 3 |
05.07.19 | Bureau de Poste (Section: Colis) | 5 |
26.07.19 | Bureau de Poste (Section: Colis) | 3 |
02.08.19 | Bureau de Poste (Section: Colis) | 5 |
09.08.19 | Bureau de Poste (Section: Colis) | 1 |
22.08.19 | Bureau de Poste (Section: Colis) | 8 |
11.09.19 | Bureau de Poste (Section: Colis) | 5 |
Total | 61 |
Témoignages
Anastasie, 27 ans : «Jamais sans mon Jackie»
« Après une déception amoureuse, il y a quelques mois, je suis sortie meurtrie de ma relation. Je ne fais plus confiance aux hommes. J’ai peur de devoir revivre ces moments douloureux qui sont maintenant derrière moi. Une collègue qui est aussi ma confidente était en voyage récemment. Elle m’a donné un coffret en cadeau. Quand je l’ai ouvert, surprise ! C’était des sextoys. Elle voulait que je me change les idées et que j’apprenne à m’aimer et me faire plaisir moi-même. Au début j’étais réticente mais finalement, je me suis prêtée au jeu. Il y a un pénis artificiel qui est devenu mon préféré. Je l’ai surnommé Jackie. Étant waterproof, je l’utilise dans la baignoire ou même ailleurs. Depuis que j’ai connu ce plaisir, je ne suis jamais sans mon Jackie. Il m’arrive de porter des boules de geishas quand je travaille. J’aime de temps en temps concilier plaisir et travail ».
Peter, 60 ans : «Pour le plaisir de ma femme»
« Je ne suis plus aussi jeune. J’éprouve encore du désir pour ma femme. Sauf que l’âge fait défaut et j’ai des fois des soucis de libido. Ma femme a un grand appétit sexuel étant encore jeune. Donc, pour la satisfaire, j’ai profité de quelques voyages pour nous procurer des sextoys. J’étais en Afrique du Sud récemment où j’ai acheté un pénis artificiel et d’autres gadgets qui sont en vente libre. Je veux satisfaire ma femme car pour rien au monde, je ne voudrais qu’elle aille chercher du plaisir dans les bras de quelqu’un d’autre ».
Javed, 32 ans : «Cela aident à pimenter notre vie sexuelle»
« Je ne vais pas cacher le fait que je suis un grand amateur de films pornographiques. Je n’aime pas juste avoir des relations sexuelles avec ma copine. Je suis le genre de personne à vouloir prolonger le plaisir aussi bien qu’essayer de nouvelles choses comme les menottes entre autres. J’aime de plus quand mon partenaire porte un masque et qu’on se prête à des jeux sexuels. C’est si excitant. Les sextoys aident à pimenter notre vie sexuelle. Ce qui est un grand avantage car j’arrive à toujours impressionner ma copine qui ne s’ennuie jamais au lit »
Des points névralgiques pour la livraison
Quand une personne commande un sextoy à un vendeur et confirme la commande, la date et l’heure de la livraison sont fixées. Si certains vendeurs proposent du porte à porte, d’autres préfèrent donner rendez-vous à l’acheteur dans à des lieux spécifiques.
Les régions privilégiées sont :
Curepipe, Port-Louis, Quatre-Bornes, Ébène et Rose-Hill .
Les pays d’origine
Ceux qui commercialisent ces produits les amènent ou les importent de divers pays, notamment : La Malaisie, la Chine, la France, l’Inde et l’Allemagne.
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