
L’ex-juge Bhushan Domah et ses assesseurs, sur le dossier Britam, pointent du doigt directement cinq personnes et une compagnie, à savoir l’ex-ministre des Services financiers et de la bonne gouvernance, Roshi Bhadain, son ancien conseiller Akhilesh Deerpalsing, Afsar Ebrahim, Sandeep Khapre et Yacoob Ramtoola, ainsi que la firme d’experts-comptables BDO. La commission recommande l’ouverture d’une enquête au criminel contre eux.
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Contre Roshi Bhadain, Akhilesh Deerpalsing, Afsar Ebrahim, Sandeep Khapre et BDO, la commission recommande une enquête pour faux et usage de faux. Car, selon la commission, « il peut y avoir eu des délits de falsification ou d’usage d’un faux document sous le code criminel et/ou de fausses preuves fournies devant la commission ».
Contre Afsar Ebrahim (à l’époque Special Administrator de l’ex-BAI), Yacoob Ramtoola (à l’époque partenaire d’Afsar Ebrahim au sein de BDO) et BDO, la commission indique qu’il peut y avoir non-respect des sections 109 et 215 de l’Insolvency Act concernant « de possibles conflits d’intérêts et/ou de fausses preuves fournies à la commission ».
Sandeep Khapre et sa firme, BDO (Kenya), ont indiqué, dans un communiqué émis mercredi, qu’ils sont étonnés par les « loops and whorls » dans le rapport « caractérisé par des inexactitudes ahurissantes » et ont annoncé qu’ils demanderont une « judicial review ». Idem pour Yacoob Ramtoola, Group Managing Partner de BDO (Mauritius), qui parle « d’omissions et d’inexactitudes flagrantes ». Roshi Bhadain rejette les conclusions du rapport et cherchera réparation en justice.
Afsar Ebrahim a, pour sa part, fait savoir qu’il était toujours en train d’étudier le rapport et qu’il ne le commenterait pas pour le moment.
La commission reproche aux fonctionnaires de ne pas avoir joué leur rôle pleinement et de s’être laissé mettre sur le banc de touche tout au long de cette affaire. Elle reproche aussi à l’ex-ministre Bhadain d’avoir marginalisé les fonctionnaires, alors que ces derniers sont censés travailler avec les ministres, sans pour autant être leurs serviteurs. Selon l’ex-juge Domah et ses assesseurs, Roshi Bhadain aurait utilisé des professionnels comme des façades. Ceux-ci n’auraient également pas été à la hauteur de leurs responsabilités, selon le trio : « M. Ramtoola a tout vu. Il a vu l’emprise du ministre sur la FSC. Il a vu ses gens à la NPFL. Tout ce qu’il avait à faire était de donner son nom par rapport à ce qui était en train de se faire. Et c’est effectivement ce qu’il a fait. C’était trop attendre de M. Ramtoola de ne pas suivre les consignes de l’ancien ministre. À partir de là, c’était l’ex-ministre et son équipe, qui avaient un contrôle progressif sur le processus de vente des avoirs de Britam, par une procédure trompeuse, une loi trompeuse et sur les faits. »
Y a-t-il eu un manque à gagner de Rs 1,9 milliard ?
C’est la question centrale et même la raison d’être de la commission. Y a-t-il eu une meilleure offre que les Rs 2,4 milliards et est-ce que tout a été mis en œuvre pour permettre d’engranger le maximum ? À cela, la commission répond qu’il y avait de meilleures opportunités et que tout n’a peut-être pas été mis en œuvre pour les saisir.
La commission note que MMI Holdings, d’Afrique du Sud, qui voulait acheter les actions à Rs 4,3 milliards, était très sérieuse et que plusieurs échanges avaient eu lieu en vue d’un accord ferme. Des rencontres avaient même eu lieu pour sceller un accord, mais rien n’a abouti au final. « Concernant l’offre de MMI Holdings, la seule conclusion à laquelle on peut arriver est que c’est au détriment des Mauriciens que cette offre ne s’est pas concrétisée », écrivent les rédacteurs du rapport. Ils notent également que la Barclays Bank avait aussi fait une offre qui « bizarrement » était la même que celle faite par MMI Holdings. Cette proposition n’a aussi pas abouti. Car, les actionnaires kényans, et même le gouvernement kényan, voulaient « une solution kényane à un problème kényan ». Chose qui arrangeait Peter Munga.
La commission fait aussi ressortir qu’à l’époque de la proposition de MMI Holdings, Peter Munga, homme d’affaires kényan alors déjà un gros actionnaire de Britam Kenya, était d’accord pour acheter les actions à Rs 4,3 milliards, mais qu’au final, la transaction s’est faite à Rs 2,4 milliards.
Les différentes valeurs des actions jusqu‘au moment de la vente en 2016
Date | Détails | (Rs) |
---|---|---|
31 décembre 2013 | Valeurs par la BAI | 2,3 milliards |
30 juillet 2015 | évaluation de Yacoob Ramtoola | 3,4 milliards |
11 septembre 2015 | Offre de Barclays Bank | 4,3 milliards |
10 juin 2016 | Vente à Plum LLP | 2,4 milliards |
Les différentes offres
Date | Offres | Prix proposés | Prix des actions sur la bourse |
---|---|---|---|
11 septembre 2015 | Barclays Bank | Rs 4,3 milliards | 12,1 shillings kényans |
14 octobre 2015 | MMI | Rs 4,3 milliards | 14,95 shillings kényans |
18 novembre 2015 | Peter Munga | Rs 4,3 milliards | - |
11 mars 2016 | Peter Munga | Rs 2,4 milliards | 11,75 shillings kényans |
10 juin 2016 | Plum LLP | Rs 2,4 milliards | 14 shillings kényans |
Mieux comprendre la polémique
En juin 2016, le gouvernement mauricien vend 23,34 % d’actions de Britam Holdings Ltd (Kenya), une compagnie d’assurance au Kenya, à Plum LLP. Cette dernière appartient à l’homme d’affaires kenyan Peter Munga, qui était déjà un actionnaire important de Britam Holdings Ltd (Kenya). Le montant de la transaction est de Rs 2,4 milliards. Cette somme sera reversée dans la NPFL, compagnie nouvellement créée et appartenant entièrement au gouvernement mauricien, pour rembourser les victimes de Super Cash Back Gold.
Ces actions appartenaient au départ à la BAI Co (Mauritius), qui avait implosé après la révocation de la licence bancaire de la Bramer Bank en avril 2015. La BAI Co (Mauritius) avait acquis ces 23,34 % d’actions dans Britam Holdings Ltd (Kenya), le 8 septembre 2011, à travers sa filiale British American (Kenya) Holdings Limited.
Le fond de l’affaire concerne la vente de ces actions par le gouvernement mauricien à Plum LLP pour Rs 2,4 milliards, alors que quelques mois plus tôt, il y avait eu des offres à Rs 4,3 milliards de la part d’autres compagnies.
Le 8 avril 2017, quelques mois après la démission de Roshi Bhadain du poste de ministre des Services financiers et de la bonne gouvernance (23 janvier 2017), le gouvernement décide de mettre sur pied une commission d’enquête pour faire la lumière sur les faits et circonstances autour de cette vente et pour savoir si toutes les procédures légales ont été suivies.
L’ex-juge de la Cour suprême, Bhushan Domah, sera nommé à la tête de la commission et aura comme assesseurs l’expert-comptable Sattar Hajee Abdoula et l’analyste financier et comptable Imrith Ramtohul.

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