Nous sommes en alerte climatique de classe 3, estime Vassen Kauppaymuthoo, ingénieur en environnement et océanographe. Comme les scientifiques de plusieurs pays, il est d’avis que nous avons atteint un point de non-retour par rapport au bouleversement climatique et à ses conséquences sur l’ensemble de la planète.
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Vassen Kauppaymuthoo, océanographe et ingénieur en environnement, qui se défend d’être un prophète de malheur ou un oiseau de mauvais augure, tire une nouvelle fois la sonnette d’alarme. Pour lui, les faits sont là : ce qu’il avait pressenti depuis 10 à 15 ans est en train de se réaliser. Il est d’avis que « l’heure n’est plus à l’attentisme ni au constat, mais à l’action », comme l’affirment également de nombreux scientifiques, les Nations unies et l’Organisation mondiale de la météorologie, entre autres.
Selon certaines études scientifiques publiées récemment, on ne fait pas le lien entre les différents phénomènes qui se produisent actuellement. On considère, par exemple, que la météo concerne uniquement l’atmosphère, que l’océanographie concerne uniquement l’océan, que la géologie concerne uniquement la croûte terrestre. Or, tous ces systèmes complexes sont intimement liés, souligne Vassen Kauppaymuthoo, et il est important de prendre en considération ces interactions climatiques pour agir en conséquence. « Il faut sortir de sa spécialisation et avoir une vue globale de ce qui est en train de se passer. »
La température moyenne du globe, dit-il, est de 15 degrés Celsius. Cependant, cette année, elle a atteint 17 °C avec des records qui sont battus un peu partout. « On observe cela, par exemple, dans l’hémisphère Nord, que ce soit en Amérique, en Europe, en Asie, où il y a des records de température et même des vagues de chaleur océanique. La température dans l’Atlantique nord est de 2 °C au-dessus de la normale. C’est une température qui n’a jamais été atteinte depuis le début des relevés », explique l’océanographe.
Deux fois plus vite
Selon lui, la terre chauffe deux fois plus vite que la mer et refroidit deux fois plus vite. En se réchauffant, elle dégage de la chaleur et cela crée des dômes de chaleur. La même chose se produit au niveau des océans, qui ont absorbé jusqu’à 80 % de la chaleur du réchauffement climatique. Les océans sont saturés et en train de rejeter la chaleur qu’ils ont stockée. Cela engendre le fameux phénomène El Niño, qui promet de provoquer un niveau record en termes de changement climatique et de force des cyclones, entre autres.
Vassen Kauppaymuthoo affirme que la situation est beaucoup plus cataclysmique qu’on ne le pensait. « La Terre est en train de devenir invivable. Il y a des endroits sur Terre où il faudra accepter de ne plus pouvoir habiter ou vivre. » Il cite en exemple les zones côtières, les grandes villes bétonnées, les flancs de montagne, les zones déjà chaudes comme les déserts, le sud de l’Europe et principalement les villes balnéaires de la Méditerranée. Il y a aussi des zones plus critiques avec moins d’eau dans certaines régions.
« Maurice étant un petit État insulaire, nous sommes beaucoup plus vulnérables. Le pays figure parmi les 45 pays les plus vulnérables du monde du fait que nous sommes petits, entourés d’eau et que notre République comprend plusieurs îles. Si le niveau de la mer monte, les zones côtières seront grandement affectées », prévient-il. Maurice risque également de connaître une longue période de sécheresse jusqu’à la mi-janvier, ainsi que des cyclones très puissants l’été prochain, car plus d’énergie dans l’atmosphère signifie plus de perturbations et de phénomènes climatiques extrêmes.
Il estime que les pays de l’hémisphère Sud devraient prendre la mesure de ce qui se passe dans l’hémisphère Nord et agir en conséquence. Pour lui, c’est une réalité que Port-Louis risque de devenir une zone inhabitable, tout comme certaines régions côtières de notre île. « Il faut se préparer à faire face à cette réalité. Le plus gros obstacle que nous avons aujourd’hui, que ce soit au niveau politique, chez les citoyens ou dans le secteur privé, c’est qu’on se voile la face et qu’on ne prend pas en considération les avertissements qui sont donnés », déplore le scientifique.
« Il est essentiel que les gens réalisent le niveau auquel nous sommes par rapport au changement climatique et comment cela remet en question l’humanité telle que nous l’avons connue jusqu’à présent. On continue à agir comme avant, alors que cela appelle une remise en question complète de tout ce que nous faisons », conclut-il.
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