Monde

USA : premier procès sur de possibles effets cancérigènes du RoundUp

Une bouteille de désherbant RoundUp dans une jardinerie de Lille le 15 juin 2015

Le premier procès autour de possibles effets cancérigènes du RoundUp, l'herbicide controversé de Monsanto contenant du glyphosate, qui s'est ouvert cette semaine aux Etats-Unis, pourrait avoir des conséquences sur des centaines, voire des milliers, de procédures judiciaires en cours. L'enjeu est donc crucial pour le géant de l'agrochimie, qui pourrait avoir à payer d'énormes sommes en dommages et intérêts.
A 46 ans, Dewayne Johnson, père de deux enfants, est atteint d'un cancer en phase terminale. Pour lui, c'est à cause du RoundUp, qu'il a répandu à partir de 2012 pour désherber des terrains appartenant au district scolaire de Benicia, au nord-est de San Francisco, explique à l'AFP son avocat Timothy Litzenburg, qui représente des centaines de personnes s'estimant également victimes du glyphosate, une substance qui fait l'objet d'études contradictoires quant à sa dangerosité.
Selon des médias américains, il existe des milliers de procédures en cours contre Monsanto aux Etats-Unis, à divers degrés d'avancement. "Une grosse partie de son travail consistait à répandre du RoundUp et du Ranger Pro (un autre désherbant au glyphosate) 20 à 40 fois par an, parfois des centaines de gallons (3,8 litres) à la fois", précise Me Litzenburg. En 2014, M. Johnson a été diagnostiqué d'un lymphome, un cancer qui atteint les globules blancs, et "nous ne pensions pas qu'il vivrait assez longtemps" pour être présent au procès, poursuit-il.
Des images diffusées par la télévision américaine ont montré M. Johnson au tribunal lundi, visiblement affaibli et marqué par de nombreuses lésions cutanées. En 2016, M. Johnson, qui n'est plus en état de travailler aujourd'hui, a déposé plainte contre Monsanto qu'il accuse d'avoir caché la dangerosité de son produit. Si le procès s'est officiellement ouvert lundi avec la désignation d'un juge, les débats eux-mêmes ne devraient pas débuter avant le milieu de la semaine prochaine, après une série d'audiences techniques et la sélection du jury, selon les deux parties interrogées par l'AFP.
Très utilisé dans le monde entier, le glyphosate a suscité une vive controverse scientifique. Elle s'appuie sur l'étude du Centre international de recherche sur le cancer, un organe de l'OMS, qui l'a classé "cancérogène probable" en 2015, contrairement aux agences européennes, l'Efsa (sécurité des aliments) et l'Echa (produits chimiques). Le glyphosate est particulièrement controversé en Europe. 
Après la décision de l'Union européenne en novembre de renouveler la licence de l'herbicide pour cinq ans, le gouvernement français s'est récemment engagé à cesser d'utiliser cette substance d'ici 2021, sans pour autant inscrire l'interdiction dans la loi. Monsanto, qui vient d'être racheté par l'allemand Bayer, a toujours nié tout lien entre maladie et glyphosate, une substance classée comme cancérigène par la Californie. 
"Plus de 800 études scientifiques, l'agence américaine pour la protection de l'environnement, des instituts chargés de la santé publique et des régulateurs dans le monde entier ont conclu que le glyphosate est sans danger d'utilisation et ne provoque pas de cancer", a fait valoir le groupe dans une déclaration écrite à l'AFP. "Nous avons de l'empathie pour toutes les personnes atteintes d'un cancer mais les preuves scientifiques montrent clairement que le glyphosate n'en est pas la cause. 
Nous sommes impatients de présenter ces preuves devant le tribunal", a poursuivi Monsanto. La défense de M. Johnson n'a pas encore fixé le montant des sommes qu'elle compte demander à Monsanto, également connu pour ses semences OGM, elles aussi très controversées. "La seule chose que nous pouvons faire, en tant qu'avocat (dans une procédure civile), c'est de prendre de l'argent à Monsanto et le donner à M. Johnson", a expliqué Timothy Litzenburg. 
La plainte de M. Johnson est la première du genre à arriver jusqu'au procès, ont expliqué les deux parties, ainsi que l'ONG anti-pesticides "Pesticide Action Network North America", en raison de l'état de santé du plaignant. La loi californienne permet en effet une procédure accélérée en cas de décès imminent. "Monsanto a volontairement trompé le public à propos de la (dangerosité) du RoundUp depuis des décennies", a estimé auprès de l'AFP une membre de cette ONG, Linda Wells. "Si M. Johnson gagne ce procès, ce sera un énorme coup porté à l'industrie des pesticides toute entière", a-t-elle ajouté.

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AFP / Photo : Philippe HUGUEN

 

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