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Une jeunesse qui veut sauver son océan

Divyasheel Sukhari est une étudiante en Master de science marine et océanographie. Divyasheel Sukhari est une étudiante en Master de science marine et océanographie.

Plongeurs, entrepreneurs, étudiants : à l’approche des Assises de l’océan, de jeunes Mauriciens témoignent de leur engagement pour préserver la mer qui les a vus grandir.

Chaque matin, avant même d’acheter son pain, Lionel Athion contemple la mer. Ce rituel quotidien suffit à illuminer sa journée. « Mo enn zenfan lakot, mo konn linportans lamer. La vie, c’est la mer, et la vie vient de la mer », affirme ce Mahébourgeois de 37 ans, directeur de Mahébourg Eco Aventures. Fils d’un garde-côte qui lui a appris à nager dans les eaux du Sud-Est, il incarne une génération de jeunes Mauriciens pour qui l’océan n’est pas seulement un décor : c’est un enjeu vital.

Maneesh Lungar est un instructeur de plongée âgé de 23 ans.
Maneesh Lungar est un instructeur de plongée âgé de 23 ans.

À l’approche des Assises de l’océan prévues l’année prochaine, leurs voix résonnent avec une urgence particulière. Car si la mer a façonné leurs vies, leurs métiers et leurs rêves, elle porte aujourd’hui les stigmates d’une dégradation préoccupante. Divyasheel Sukhari s’en souvient précisément. Adolescente, cette étudiante de 25 ans en Master de science marine et océanographie passait des heures à plonger dans le lagon de la côte est. C’est là qu’elle a pris conscience d’un changement inquiétant : les poissons se raréfiaient, les coraux perdaient leurs couleurs, la mer semblait soudain silencieuse. « J’ai compris qu’il fallait agir », affirme-t-elle aujourd’hui.

Le plongeur dénonce la pollution plastique sous l’eau.
Le plongeur dénonce la pollution plastique sous l’eau.

Le constat de Maneesh Lungar, instructeur de plongée de 23 ans établi à Grand-Baie, n’est guère plus réjouissant. Lui qui a découvert le monde sous-marin à sept ans, guidé par son père et son grand-père, tous deux plongeurs, s’émerveille encore des couleurs de l’océan. « Il y a tant de couleurs, qu’il fasse chaud ou froid », confie-t-il. Mais sous la surface chatoyante, une réalité moins idyllique s’impose : « Sous l’eau, on trouve des bouteilles en plastique, des canettes… Tous les déchets qu’on voit dans les rues, il y en a aussi dans l’océan. »

Replanter les coraux, éduquer les touristes

Lionel Athion est le directeur de Mahébourg Eco Aventures.
Lionel Athion est le directeur de Mahébourg Eco Aventures.

Face à ce déclin, ces jeunes Mauriciens ne se contentent pas de constats alarmistes. Lionel Athion a fait de ses balades en pirogue un outil pédagogique. Dans une île où les arrivées touristiques augmentent d’année en année, il estime essentiel d’éduquer la population locale et les visiteurs sur les manières de vivre durablement de la mer. En observant de près les récifs coralliens, il a appris à comprendre leur fragilité.

Lionel Athion est convaincu que protéger la mer est un devoir envers les générations futures.
Lionel Athion est convaincu que protéger la mer est un devoir envers les générations futures.

« Comme dans les forêts terrestres, le corail est un écosystème. Parey kouma nou pran boutir plant nou pike li bourzone, koray ousi parey », explique-t-il. Avec des habitants et plusieurs ONG, il participe désormais au replantage de coraux dans les lagons autour de Mahébourg.

Maneesh, de son côté, transforme chaque initiation à la plongée en moment de sensibilisation. Il raconte ces personnes qui n’avaient jamais vu la mer ou qui pensaient ne jamais pouvoir plonger. « Leur réaction en découvrant la vie sous-marine me touche beaucoup. Cela change complètement leur vision de la mer », dit-il. Selon lui, les récifs du Nord devraient bénéficier de zones marines protégées, à l’image du parc marin de Blue-Bay, reconnu pour la richesse de sa faune et de sa flore.

Malgré la gravité de la situation, l’optimisme domine. Divyasheel Sukhari refuse le fatalisme. Certes, l’océan est épuisé par la pollution, la surpêche et le réchauffement climatique. Mais elle a vu des signes encourageants. « J’ai vu des récifs renaître, des mangroves protéger nos côtes. L’océan peut guérir si nous prenons soin d’elle », assure-t-elle.

La jeune femme se dit alarmée par la raréfaction des poissons dans la mer.
La jeune femme se dit alarmée par la raréfaction des poissons dans la mer.
Divyasheel mise sur la réduction du plastique et les campagnes de nettoyage.
Divyasheel mise sur la réduction du plastique et les campagnes de nettoyage.

Les solutions, estiment ces jeunes, passent d’abord par des gestes simples. Divyasheel mise sur la réduction du plastique et les campagnes de nettoyage. « Chaque action compte », dit-elle. Maneesh insiste sur la responsabilité individuelle : « Ne polluez pas la plage. Les vagues et le vent entraînent tout dans l’océan. Évitez aussi de jeter vos mégots quand vous êtes en bateau. »

Lionel Athion, lui, invite à regarder vers le passé pour imaginer l’avenir : « Autrefois, nos grands-parents utilisaient le raphia. Aujourd’hui, nous faisons face à la pollution plastique. Nous utilisons des bateaux à moteur, alors que les pirogues ne produisent pas d’émissions. C’est la mer et le vent qui les portent. »

Pour cet entrepreneur convaincu que protéger la mer est un devoir envers les générations futures, l’enjeu dépasse la seule dimension environnementale : « Bien que nous soyons une petite île, notre territoire marin est immense. Notre avenir et notre économie se trouvent dans la mer. »

Un message que porte avec force cette génération de jeunes Mauriciens, qui rappelle que protéger la mer, c’est protéger leur avenir. Leur engagement témoigne qu’une jeunesse est prête à agir pour que Maurice continue de vivre en harmonie avec son océan – cet océan qui, comme le dit simplement Maneesh Lungar, chanceux d’avoir pu faire de sa passion son métier, reste un émerveillement quotidien.

Aqua’librium

Notre exploration du monde marin ne fait que commencer ! Plongez dans notre nouvelle rubrique Aqua’librium et au fil des prochaines semaines, notre journaliste Jenna Ramoo vous emmènera à la rencontre de ces créatures souvent invisibles, mais essentielles, qui façonnent l’écosystème marin, ainsi que de ceux qui ont fait de leur préservation une véritable mission.

Car protéger la mer, c’est aussi protéger ceux qui la font vivre… et l’avenir de notre planète.

Fabrina Louison, Thirooven Gengan

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