La variole du singe est une maladie le plus souvent bénigne mais sa diffusion en dehors des zones endémiques, principalement en Europe, reste une source de préoccupation, alors que des questions demeurent sur sa transmission.
A Maurice, trois cas suspectés d’être la variole du singe ont été détectés, selon une annonce du ministre de la Santé, cet après-midi du jeudi 2 juin.
Répondant à une question de la presse, Kailesh Jagutpal a expliqué que les trois cas suspects « ne présentaient pas les lésions typiques de monkeypox mais ils sont en observation. »
Selon le ministre, trois adultes, en isolement dans un hôpital régional, sont concernés. L’un d’eux revient de France. Un autre de La Réunion mais est passé par le Congo au préalable.
Kailesh Jagutpal a affirmé que la vigilance est de mise au port, à l'aéroport et dans les centres de soin. Ajoutant au passage que tout cas qui présente des lésions, « bane rougeurs dan zot lapo », sont traités comme un possible cas de variole du singe.
Toutefois, il faudra attendre les résultats des analyses effectuées pour confirmer l’apparition de la maladie sur le sol mauricien, selon Kailesh Jagutpal qui participait à la signature d’un accord avec des cliniques privées.
Comment est transmise la maladie ?
L'infection des cas initiaux résulte d'un contact direct avec des animaux infectés mais des incertitudes subsistent quant aux réservoirs naturels du virus.
La transmission secondaire - c'est-à-dire interhumaine - nécessite, elle, un contact étroit et prolongé entre deux personnes, et se fait principalement via la salive ou le pus des lésions cutanées formées au cours de l'infection.
Parmi les cas recensés, une majorité sont des hommes ayant eu des rapports sexuels avec d'autres hommes. Mais la variole du singe "n'est pas considérée comme une maladie sexuellement transmissible", a rappelé jeudi Alexandra Mailles, épidémiologiste à Santé publique France lors d'un point presse de l'ANRS (maladies infectieuses).
Ce pourrait être le contact avec les lésions qui conduirait à l'infection plutôt que le rapport sexuel lui-même.
Pourquoi une flambée de cas en ce moment ?
La flambée actuelle dans une trentaine de pays laisse penser que la transmission du virus est passée sous les radars pendant un certain temps, a déclaré mercredi l'Organisation mondiale de la Santé (OMS).
Ce virus présente des similitudes avec celui de la variole humaine, éradiqué officiellement depuis 1980, et pour laquelle les campagnes de vaccination ont cessé.
La baisse de l'immunité dans la population qui s'en est suivie pourrait expliquer la recrudescence de cas constatée actuellement, selon l'OMS.
Quelle est la gravité de la maladie ?
Depuis sa récente diffusion en Europe, aucun décès et très peu de cas graves ont été répertoriés. La variole du singe guérit en général spontanément et les symptômes durent de deux à trois semaines. Les cas graves se produisent plus fréquemment chez les enfants et sont liés à l'ampleur de l'exposition au virus, à l'état de santé du patient et à la gravité des complications.
Dans les pays endémiques, les décès constatés ont été "surtout liés à une prise en charge tardive ou des surinfections bactériennes", a expliqué jeudi Steve Ahuka Mundeke, chef du département de virologie à l'Institut national de recherche biomédicale (République démocratique du Congo).
Une prise en charge médicale adéquate réduit considérablement les risques.
Peut-on la soigner ?
Un médicament antiviral, le tecovirimat, conçu pour la variole, a été homologué par l'Agence européenne des médicaments (EMA) pour la variole du singe en 2022 sur la base de données venant des études menées sur les animaux et les humains. Il n'est pas encore largement disponible.
Un vaccin de 3e génération (vaccin vivant non réplicatif, c'est-à-dire ne se répliquant pas dans l'organisme humain) est autorisé en Europe depuis juillet 2013 et indiqué contre la variole chez les adultes. Il dispose également d'une autorisation de mise sur le marché aux États-Unis.
"On peut l'utiliser en vaccination préventive mais la gravité de la maladie ne le justifie pas", a souligné jeudi Brigitte Autran, professeure émérite d'immunologie à la faculté de médecine de Sorbonne Université.
Puisque la période d'incubation dure entre une et trois semaines, il est intéressant de "l'utiliser en post-exposition" sur des cas ayant été en contact avec un malade "pour prévenir ou empêcher la dissémination de l'infection", a-t-elle poursuivi.
Peut-on stopper la contagion ?
"Les flambées de cas peuvent être stoppées", a expliqué mercredi la responsable technique de l'OMS pour la variole du singe, Rosamund Lewis, soulignant tout de même que la diffusion actuelle de la maladie était "une source d'inquiétude."
"Ce que nous savons pour le moment, c'est que cette maladie tropicale est faiblement transmissible à l'homme", a pour sa part relevé mercredi l'épidémiologiste Antoine Flahault dans l'Express.
"Nous sommes à un stade ou l'alerte est payante à un très faible coût", a-t-il ajouté. "Quand vous avez seulement 32, 64, 128 ou 256 cas, il est aisé de les isoler pendant 21 jours dans des hôpitaux et de démanteler les chaînes de transmissions en isolant les cas contacts".
Mesure de sécurité : Maurice commande déjà ses vaccins
Le ministère de la Santé vient de lancer un appel d’offres pour l’achat de vaccins Imvanex, qui sont utilisés dans le traitement des patients contractant la variole. « Après qu’une personne a été infectée, le vaccin doit être utilisé dans les trois jours qui suivent. Deux doses doivent être administrées », fait comprendre un cadre du ministère.
Comment savoir si quelqu’un arrivant à Maurice est porteur du virus ? « Si une personne positive vient à Maurice, elle sera aussitôt conduite à l’hôpital ENT. En ce moment, une unité séparée est aménagée au sein de l’hôpital afin de dispenser les traitements appropriés aux patients concernés, s’il y en a », assure le fonctionnaire.
Au sein du ministère, on affirme que toutes les procédures auxquelles doivent se soumettre les personnes venant à Maurice depuis l’étranger seront amendées. « Le formulaire qui doit être rempli sera modifié. Le passager devra indiquer s’il a une éruption cutanée, les pays dans lesquels il a voyagé au cours des 21 derniers jours, s’il a été en contact avec quelqu’un qui est infecté à la variole du singe ou qui est soupçonné de l’être », précise le cadre.
Il affirme que les passagers se verront remettre une brochure où tout sera inscrit. « Ils disposeront de toutes les informations voulues sur les procédures à suivre, si quelqu’un contracte le virus. En revanche, si un cas suspect est détecté à l’aéroport et au port, la personne sera placée en isolement. »
À Maurice, les médecins sont formés pour traiter ceux contaminés par la variole du singe. « Les enfants sont enclins à l’attraper. Mais là aussi, il y aura un pédiatre. Même un dermatologue fera un suivi », avance le fonctionnaire.
Il souligne que ce qui est rassurant, c’est que le virus de la variole du singe n’est pas aéroporté, contrairement à la Covid-19. « C’est une maladie qui existe depuis des années en Afrique de l’Ouest. On n’a jamais entendu parler de cela comme c’est le cas en ce moment », reconnaît-il.
Avec l’AFP
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