La deuxième édition du tribunal populaire d’Afrique australe pour démanteler le pouvoir des multinationales a eu lieu du 16 au 18 août 2017, à Johannesburg en Afrique du Sud. Ce tribunal s’inscrit dans le cadre de la campagne mondiale pour démanteler le pouvoir corporatiste. Durant trois jours, huit communautés de l’Afrique australe ont présenté leurs cas devant un panel d’éminents juges, comprenant un mélange d’académiciens, de juristes et d’activistes.
Pousser par la quête du profit, les transnationales (TNC) violent de façon systématique les droits de l’homme et sont l’auteur de crimes économique et écologique. L’idée de juger symboliquement la mainmise des TNC sur l’Afrique constitue un tournant dans la lutte des communautés pour retrouver leur souveraineté et mettre fin à l’impunité.
Ce tribunal permet, d’une part, de mettre à nu les crimes et les exactions commis par les TNC durant plus d’un siècle; d’autre part, il constitue une plateforme de réflexion et de discussion pouvant amener non seulement les communautés exploitées mais aussi la société civile dans son ensemble à une plus grande conscience des verrous de la domination et de l’exploitation.
Cet aspect pédagogique du tribunal est primordial dans la mesure où il joue un rôle important dans la mobilisation des classes populaires en vue d’une véritable transformation de l’Afrique.
Le tribunal populaire
Il est utile de rappeler que la « pratique » du tribunal populaire n’est pas nouvelle. Celui qui, sans doute, a eu le plus de succès est le tribunal Bertrand Russel institué en 1966 et présidé par Jean-Paul Sartre. Son objectif était de juger les crimes de guerre commis par l’impérialisme américain au Vietnam.
Depuis, plusieurs tribunaux populaires ont vu le jour. Soulignons entre autres, celui sur la Palestine pour juger les crimes de l’occupation sioniste et celui sur l’exploitation sexuelle.
Dans sa forme actuelle, le tribunal populaire reste avant tout une arme idéologique consistant à dénoncer et à condamner les crimes perpétrés par la classe dominante. L’acte de juger est un instrument au service de ceux qui détiennent le pouvoir et la richesse. Le tribunal populaire est donc une réponse légitime des peuples dans un monde sans justice.
Cas présenté par la République de Maurice.
C’est dans cette optique que notre délégation, le Centre for Alternative Research and Studies (CARES) a présenté un cas où nous avons traîné l’État mauricien, les États signataires d’un traité de non double imposition avec Maurice ainsi que les sociétés incorporées dans l’offshore à Maurice, au banc des accusés. Nous soutenons l’idée que l’île Maurice en complicité avec les États signataires et les sociétés offshore, perpétuent un système qui viole les droits de l’homme et porte préjudice à la souveraineté de notre République. Pour étayer notre position nous avons pris le cas d’Alvaro Sobrinho et celui d’Heritage Oil en exemple.
Cas présenté par les autres délégations.
Parmi les autres cas présentés, nous retenons celui de Madagascar où une compagnie minière Australienne, World Titane Holdings, incorporée nul autre qu’a Maurice menace la survie d’un peuple indigène, les Mikeas et la fòret où ils vivent. Nous notons également le cas présenté par le Mozambique dénonçant la construction d’une centrale hydraulique qui risque de déplacer près de 1400 habitants. Parmi les autres cas qui retiennent l’attention, il y a celui de Prosavana, un géant de l’agribusiness qui souhaite s’établir au Mozambique. La présence de Prosavana représente une menace pour les petits fermiers et pour la souveraineté alimentaire du Mozambique.
Appel à l’État Mauricien.
Durant le dernier jour du tribunal, nous avons lancé un appel à l’Etat Mauricien, auquel toutes les personnes présentes ont agréé (texte que vous pouvez lire ci-dessous) afin de démanteler l’architecture du système financier Mauricien car celui-ci porte préjudice aux habitants de Maurice ainsi qu’à ceux d’autres pays de l’Afrique australe.
“Common call to the people of the Southern African region appealing to the Mauritian government to stop the architecture of impunity via its financial sector like the offshore that is allowing the plundering and tax evasion of African countries. This architecture of impunity is having real impact on the people’s livelihood all across the southern african region and it is at no point in adequation with the idea of a South African region of the people and for the people.”
C’est en scandant Amandla Awethu, cri de guerre datant de l’époque de l’apartheid, qui signe le pouvoir au peuple qu’a pris fin la seconde édition de ce tribunal populaire d’Afrique australe pour démanteler le pouvoir des multinationales.
Par Robbie Hurloll, chercheur assistant chez CARES et jeune activiste de Rezistans ek Alternativ.
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