Si les salariés travaillant dans le secteur formel sont assurés d’une rémunération qui leur est versée chaque semaine, quinzaine ou par mois, par contre ceux faisant partie du secteur informel touchent leur salaire au quotidien.
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Tout travail nourrit son maître, mais tout travailleur n'oeuvre pas dans les mêmes conditions. D’un côté, il y a ceux que l’on peut considérer comme les mieux lotis. Ils ont un emploi permanent dans le secteur formel et sont garantis d’un salaire à chaque fin de mois. Ces personnes ont aussi une fiche de paie qui leur est utile pour bénéficier d’un emprunt bancaire, pour faire des achats à crédit ou encore contracter une police d’assurance pour sécuriser une vie décente après la retraite.
De plus, ils jouissent d’un certain nombre de congés annuels avec rémunération, sans compter le boni de fin d’année en décembre. À la fin de leur carrière, ils bénéficient d’une lumpsum, ou compensation financière à la retraite, calculée sur le nombre de leurs années de service.
Soulignons que les autres travailleurs du secteur formel, notamment des ouvriers du secteur de la zone franche et du secteur de la construction, peuvent aussi toucher leur salaire chaque semaine ou chaque quinzaine. Il se pourrait qu’ils ne jouissent pas des mêmes facilités pour effectuer certaines transactions financières, mais bénéficient des mêmes facilités, comme la garantie d’un salaire fixe, le paiement des heures supplémentaires et les congés annuels, entre autres.
À l’opposé, il y a ceux qu’on appelle dans le jargon mauricien des « batte ». Ils sont pour la plupart des rejetés du système éducatif. Certains peuvent à peine lire et écrire. Sans un bon bagage scolaire ou une formation vocationnelle, ils sont condamnés à faire des menus travaux, comme aide-camionneur, transporteurs de légumes au marché, ou pour le désherbage des jardins, les travaux de nettoyage dans des boutiques et à domicile, entre autres.
D’autres sont aussi recrutés par des contracteurs et sous-contracteurs pour des travaux spécifiques, mais ne sont jamais employés sur une base permanente.
Contrairement aux employés permanents, ils n’ont pas un travail fixe avec les facilités et les avantages que cela comporte. La plupart du temps, leur travail ne dure que quelques heures ou une journée seulement. Ils touchent une somme d’argent pour le travail effectué et le lendemain se mettent à la recherche d’un autre travail. Ces citoyens font partie de la classe la plus pauvre du pays.
Avis des observateurs
Désiré Guildhary : « Ces gens se laissent exploiter »
Le président de la Free Democratic Unions Federation (FDUF), Désiré Guildhary, reconnaît que certaines personnes, surtout celles qui sont arrivées à un âge avancé, sont contraintes de travailler pour améliorer leurs conditions de vie. « Ils font des petits travaux par-ci par-là pour se faire un peu d’argent qui leur permet d’ajouter du beurre aux épinards. » Il explique aussi qu’il y a d’autres personnes, jeunes pour la plupart, qui préfèrent « batte » dans l’espoir de se faire plus d’argent qu’au sein des entreprises. Il regrette que, ce faisant, ils se laissent exploiter sans le savoir par des employeurs peu scrupuleux. Il cite notamment des sous-contracteurs. « Ces jeunes se laissent employer pour Rs 1 000 par jour, mais ne réalisent pas qu’ils ne sont pas enregistrés au plan de pension de la Sécurité sociale, qu’ils ne bénéficient pas de congés de maladie et des local leaves et d’autres avantages dont jouissent les travailleurs du secteur formel », dit-il. Il souhaite que les autorités obligent les employeurs concernés à cotiser pour leurs employés à la Sécurité sociale.
Il cite le cas des aide-camionneur. « Qu’est-ce qui va se passer, si par malheur, ils sont victimes d’un accident. Est-ce que le propriétaire du camion va assumer ses responsabilités », se demande-t-il.
Eric Ng : « Les travailleurs informels doivent être enregistrés »
L’économiste Eric Ng explique que les travailleurs informels contribuent, certes, à l’économie, mais que leur contribution ne figure pas dans le PIB, car ils ne sont pas enregistrés. Cela dit, il souhaite que tous les travailleurs informels soient enregistrés officiellement auprès des autorités, car cela va leur permettre aussi de toucher le salaire minimal et l’impôt négatif.
Témoignages
Ignace : « Ce travail m’aide à gagner ma vie »
Ignace a été licencié pour raison économique après plus d’une dizaine d’années de travail dans une entreprise de textile. À l’époque, il touchait un salaire de Rs 4 500 par quinzaine, heures supplémentaires incluses. Certes, il a retrouvé un emploi dans une autre compagnie, mais les conditions de travail n’étaient pas aussi avantageuses. Après quelques mois de travail, il a quitté cette compagnie. Las de travailler dans la zone franche, il a choisi de se mettre à son propre compte. « Après la cinquantaine, il m’était difficile de trouver un emploi », dit-il.
Ignace effectue des menus travaux chez des individus pour gagner sa vie. « Le matin, je fais des travaux d’entretien chez une famille. Je balaie la cour et j’effectue d’autres travaux de nettoyage, dont le lavage de la voiture. Je m’occupe aussi des chiens. Pour ces travaux, j’ai Rs 400 par jour. Je bénéficie d’une somme supplémentaire pour des travaux de peinture à l’approche des fêtes », dit-il. Il reconnaît que ce n’est pas un travail de tout repos, mais cela a le mérite de le faire vivre. « À mon âge, où vais-je trouver un autre emploi. Heureusement, que je connais cette famille depuis longtemps et qu’elle m’offre du travail. » Il travaille pendant une demi-journée et dans l’après-midi, il se rend chez une autre famille pour s’occuper du jardinage pour Rs 300.
Ashok : « Il faut avoir une bonne santé pour faire ce travail »
Ashok est aide-camionneur et livre des légumes chaque matin au marché. Il touche Rs 350 pour ce travail qui ne dure que quelques heures. Il reconnaît que ce n’est pas un travail facile. « Il faut avoir une résistance physique et être en bonne santé pour transporter des légumes sur une longue distance. » Il eplique qu'il s’est essayé à plusieurs postes, mais il n’était pas satisfait et, finalement, c'est un ami qui lui a proposé ce travail.
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