Être une femme, cela a été le plus grand désir de Kelly Wayne depuis toujours. Après avoir été travestie, elle a finalement pu réaliser son rêve et changer de sexe. Si aujourd’hui, elle est transsexuelle, elle veut être officiellement reconnue comme une femme, sauf qu’elle se heurte à des obstacles administratifs.
«J’ai toujours été une femme coincée dans le corps d’un homme », avance d’emblée Kelly Wayne. Elle a fait la une de nombreuses publications locales et françaises, non seulement à cause de ses revendications, mais également de par ses talents d’artiste. Elle pense que changer de sexe est un droit humain et aujourd’hui, elle voudrait que son pays natal, l’île Maurice, puisse la reconnaître comme femme. étant né homme, son extrait de naissance fait mention de sexe masculin et cela la dérange profondément.
Elle a prouvé ses talents d’artiste peintre à Maurice et a plusieurs fois monté des expositions de ses tableaux sous différents termes. Elle a également possédé une gallerie à Pointe-aux-Piments. Kelly nous explique avoir depuis toujours voulu se transformer en une femme complète. Et pour cela, elle a choisi de se rendre en France. Pour concrétiser son rêve, elle a décidé de tout vendre à Maurice, dont sa gallerie d’art et ses effets personnels, pour pouvoir financer son voyage, ainsi qu’une opération chirurgicale.
En janvier 2011, elle débarque en France. Seule contre tous, sans aucun soutien moral, elle prend rendez-vous à l’hôpital Saint-Louis, à Paris. « Quand le chirurgien m’a vue pour la première fois, il pensait que j’étais venue pour faire des corrections esthétiques. Mais il avait l’air surpris quand je lui ai expliqué le but de ma visite et c’est alors qu’il a remarqué que j’étais une femme emprisonnée dans le corps d’un homme », raconte Kelly.
Après avoir écouté les risques de santé qu’une telle intervention peut engendrer, Kelly Wayne accepte de prendre le pari.
Le 12 avril 2012, Kelly se rend seule à l’hôpital face à son destin, en se disant que quand on veut, on peut. « J’ai insisté qu’on me fasse la chirurgie totale et que le médecin enlève tout signe de mon corps masculin pour me transformer en femme », dit-elle.
L’opération dure douze heures, mais comme dit le dicton, il faut souffrir pour être belle. Et pendant les trois semaines consécutives à l’opération, elle doit subir le douloureux changement quotidien des pansements, effectué à vif par une aide-soignante. « Mais le résultat peut être qualifié de sublime. Quand je me regarde dans le miroir, je ressens une grande satisfaction personnelle. Désormais, on ne me verra plus comme une travestie. Mon plus grand bonheur est d’être en possession d’une attestation médicale émise par le professeur Marc Rivol, de l’hôpital Saint-Louis, qui certifie que j’ai fait une castration bilatérale génitale et aujourd’hui, en France, je suis reconnue à l’état civil comme une femme. Malheureusement, ce n’est pas le cas à Maurice. J’ai adressé plusieurs correspondances aux autorités concernées pour demander qu’on apporte les rectifications nécessaires dans le registre de l’état civil, mais mes requêtes sont restées sans réponse », ajoute-t-elle.
Après avoir subi cette opération, Kelly a décidé de s’établir en France, voilà sept ans déjà. Elle nous explique qu’elle travaille très dur, surtout la nuit, et garde sa journée pour continuer à peintre. Elle compte monter sa première exposition à l’hôtel Ibis le Mans, du 26 octobre au 5 novembre 2019. « Je souhaite conserver ma nationalité mauricienne, même si je suis éligible à la nationalité française. J’espère que mon pays m’aide à changer mon statut », lance Kelly.
Contacté pour une réaction, un préposé de l’état civil explique que la loi mauricienne ne prévoit rien concernant un quelconque changement de sexe et que c’est la première fois que son bureau reçoit une telle requête.
Un responsable de l’ONG AC Together, de l’association Arc-en-Ciel, nous confirme qu’il n’y a aucune provision spécifique dans la loi mauricienne pour valider un tel changement. Il ajoute toutefois que la personne concernée peut solliciter l’avis de la Cour suprême et que l’association est disposée à lui procurer les services d’un homme de loi, au cas où elle décidait d’aller de l’avant.
Me Erickson Mooneapillay : «La transidentité est un droit fondamental»
Me Erickson Mooneapillay, directeur de Dis-Moi Maurice, explique, pour sa part, que la transidentité est un droit fondamental et que tout citoyen devrait avoir le droit de se définir homme ou femme, indépendamment du sexe qui lui a été assigné à sa naissance.
« Une personne qui est né masculin, mais qui fondamentalement et mentalement vit comme une femme, ne peut pas remplir une fiche d’embauche ou une candidature pour les élections comme il se doit. Chaque personne a le droit à la vie privée et de ce fait, au droit de vivre sa vie pleinement aussi longtemps qu’elle n’empiète pas sur la liberté des autres. Maurice ne permet pas le changement de la mention du sexe à l’état civil. On est à la traîne en ce qui concerne les droits des personnes LGBT dû grandement à la bigoterie de nos parlementaires. Il faut se mettre au diapason des pays développés. C’est le seul recours dans un pays laïc. Il faut une prise de conscience nationale. L’état ne peut s’ingérer dans la vie des gens et décider à leur place. Il faut avant tout comprendre qu’on est tous humains, au-delà de nos orientations sexuelles », dit-il.
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