Ses ambitions : être bien dans sa peau et vivre sa vie comme une femme à part entière. Grande avec de beaux yeux sublimés par un maquillage ultra-naturel, Viksha Vinaya Anthony a de la prestance. À 26 ans, la jeune femme attire les regards avec ses longs cheveux et son style vestimentaire vintage. Avec un petit air de Blair Waldorf de la série télévisée « Gossip Girl », elle nous livre son histoire.
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« Ne transformez pas votre différence en un handicap. Utilisez-la comme une force pour atteindre vos objectifs »
Déterminée, ambitieuse, combattive… Autant de qualificatifs qui caractérisent parfaitement Viksha Anthony, âgée de 26 ans. La jeune femme est Customer Success Manager à goFLUENT Mauritius Ltd, une société de formation à distance offrant des cours en langues. Détentrice d’un diplôme en gestion des affaires (+psychologie), la Portlouisienne a aussi suivi des cours en ACCA et IATA. Philantrophe, elle siège aussi aux conseils d’administration d’organisations non gouvernementales, comme Diabetes Safeguard, Mère Theresa Shelter et le collectif Arc-en-Ciel.
Bien que son métier consomme le plus clair de son temps, elle fait de son mieux pour répondre à ses engagements sociaux. Parmi les nombreuses causes pour lesquelles elle milite figure la dédramatisation de la transidentité à Maurice. Si cette cause lui tient personnellement à cœur, c’est parce que depuis ses quatre ans, elle n’était pas en adéquation avec le genre qui lui avait été assigné à la naissance. Aujourd’hui, après un combat de longue haleine, elle affirme sans ambages : « Je suis une femme parmi les femmes. »
Reflet dans le miroir
Si durant son enfance elle porte des robes et les chaussures à talons de sa mère, Viksha s’improvise aussi des robes avec des draps. À l’école, elle ne joue pas au foot avec les autres garçons. Elle passe son temps à papoter avec les filles de sa classe. Au fur à mesure qu’elle grandit, son reflet dans le miroir lui rappelle constamment qu’elle n’est pas dans le bon corps. « Je me suis dit que j’étais peut-être gay », confie-t-elle. Si elle tente l’expérience à 15 ans, elle ne se sent toutefois pas confortable dans la relation. Elle s’en défait, tout en maintenant sa beauté androgyne.
À 16 ou 17 ans, elle se sent mal dans son corps. Lors d’une visite à Maurice, sa tante lui parle de la possibilité de faire une transition. Intéressée par la démarche, Viksha multiple les recherches en ligne. Le cours de sa vie changera à tout jamais.
Elle sait déjà que l’argent et l’éducation seront les clés d’un meilleur avenir. Après le secondaire, elle travaille pour payer ses études supérieures. Parallèlement, elle enclenche son combat transidentitaire. Elle économise son salaire au maximum. Elle postule pour un meilleur poste. Elle peut compter sur le soutien de sa mère et de sa grand-mère. Tout en se donnant à fond dans sa carrière, Viksha commence sa transition. « Je ne voulais pas imposer ce changement à mes parents et à mon entourage. Mais je voulais aussi être une femme indépendante. »
Deux ans plus tard, elle revient à la maison de son père en tant que femme. Raison : sa mère est décédée. Viksha est meurtrie, surtout lorsqu’elle réalise qu’elle n’a pas passé suffisamment de temps avec sa mère. Elle prend son petit frère sous son aile et s’occupe de lui comme s’il s’agissait de son propre enfant. Depuis, les deux partagent une complicité sans faille.
Aujourd’hui, Viksha dit être une femme comblée au niveau des relations familiales. Au travail, elle s’entend à merveille avec ses collègues. Comment voit-elle l’avenir ? Elle souhaite continuer à faire ses preuves au niveau professionnel. Elle veut aussi fonder une famille et continuer à profiter de la vie.
Droits humains : Maurice à la traîne ?
La transidentité est le fait, pour une personne transgenre, d’avoir une identité de genre différente du sexe assigné à la naissance. Bien qu’elle soulève certaines questions juridiques à Maurice, la transidentité touche les droits fondamentaux d’un citoyen de se définir homme ou femme au-delà de son sexe biologique, indique l’avocat Erikson Mooneapillay. Il ajoute que même si la reconnaissance légale de la transidentité varie considérablement à travers le monde, Maurice est à la traîne en ce qu’il s’agit des droits de la communauté LGBTQI. Selon lui, l’État ne peut s’ingérer dans la vie des gens.
Young Queer Alliance - Najeeb Fokeerbux : « On est libre d’être qui on veut »
Intervenant dans une formation des médias sur la couverture des sujets liés à la communauté LGBTQI (Lesbiennes, Gays, Bisexuels, Transgenres, Queer et Intersexe), Najeeb Fokeerbux de l’association Young Queer Alliance a laissé entendre que chacun est libre de s’exprimer et d’être celui ou celle qu’il ou elle veut. Selon lui, il faut cesser de coller une étiquette ou de nourrir les stéréotypes. Il a souligné l’importance du rôle de la presse pour empêcher la stigmatisation de la communauté LGBTQI. L’atelier de travail était organisé par GenderLinks Mauritius.
Le combat de Kayla
Kayla avait six ans quand elle a commencé à ressentir qu’elle n’était pas née dans le bon corps. « Enfant, je jouais à la poupée. À 10 ans j’ai commencé à m’habiller comme une fille. Conventionnel, homophobe et strict, mon père ne le voyait pas d’un bon œil. J’ai même pris des coups de règle et de rotin », soutient la jeune femme, aujourd’hui âgée de 28 ans.
En grandissant, elle peine à panser la blessure du rejet. Au plus profond d’elle, elle se sent plus que jamais femme. Rongée par l’anxiété, elle multiplie les fugues. Elle envisage à trois reprises de mettre fin à ses jours. Dépressive, Kayla trouve refuge dans les jeux vidéo. Cet univers la console et lui permet d’être virtuellement une femme.
Après le secondaire, Kayla va à l’étranger. Sa partenaire la soutient dans sa démarche de transition. Cela fait cinq ans que Kayla est rentrée à Maurice. Même si son père la renie, elle a l’appui de sa mère. Toutefois, elle essaie de temps en temps de briser la glace avec son papa. « Même si je me fiche désormais du regard des autres, pour ne pas l’offusquer, je limite ma présence aux célébrations et aux rencontres familiales. Il s’agit de mon père après tout. »
Sur le plan professionnel, Kayla s’est tournée vers le secteur privé où elle dit être mieux acceptée. Pour être celle qu’elle est aujourd’hui, la bataille a été longue. Afin de sortir de la dysphorie du genre, Kayla s’est réfugiée dans la spiritualité. « Cela m’a aidée à me reconstruire pour devenir la femme que je suis. »
À la fois belle et intelligente, Kayla s’y connaît en matière de glamour. D’une simplicité hors pair, elle en jette avec son look d’enfer. « Au début j’avoue que c’était difficile de bien mettre son eye-liner. Maintenant je suis une pro », conclut-elle.
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