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Traité sur les Chagos : un comité parlementaire britannique juge l’accord « imparfait », mais « stratégique » pour sécuriser la base de Diego Garcia

L’accord sur les Chagos est en examen parlementaire britannique jusqu’au 3 juillet 2025.

Le rapport de l’International Agreements Committee, déposé au Parlement britannique à la mi-semaine, analyse l’accord entre le Royaume-Uni et Maurice sur l’archipel des Chagos, incluant Diego Garcia, où se trouve une base militaire américano-britannique stratégique. Soumis dans le cadre de la Constitutional Reform and Governance Act 2010, ce document de 27 pages juge l’accord « imparfait », mais nécessaire pour protéger la base militaire britanno-américaine à Diego Garcia. Déposé le 22 mai 2025, l’accord est en examen parlementaire jusqu’au 3 juillet 2025. Une législation primaire sera nécessaire pour sa ratification.

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Le rapport du comité reconnaît que l’accord, bien que constituant un compromis, protège les intérêts stratégiques du Royaume-Uni. Il note cependant que, sans ratification, « Maurice est susceptible de reprendre sa campagne pour obtenir un jugement juridiquement contraignant sur la souveraineté contre le Royaume-Uni ». Le comité a entendu des témoignages détaillés indiquant qu’une cour internationale statuant sur cette question serait peu susceptible de trancher en faveur du Royaume-Uni, en raison de l’avis consultatif de la Cour internationale de justice (CIJ) de 2019, qui a jugé que l’archipel des Chagos avait été « illégalement détaché de Maurice au moment de son indépendance dans les années 1960 ».

Le président du comité, Lord Goldsmith, a déclaré que « comme tous les traités, l’accord reflète un compromis entre les points de vue des deux parties. En particulier, le coût pour le contribuable britannique est élevé et l’accord ne garantit pas que les Chagossiens puissent retourner sur les îles. Il n’y a aucune garantie que l’accord sera prolongé après la période initiale de 99 ans. »

Le rapport exprime des regrets quant à la perception que les intérêts des Chagossiens ont été « subordonnés aux intérêts nationaux du Royaume-Uni » lors des négociations. Le comité déplore que les membres de la communauté chagossienne estiment que leurs intérêts n’ont pas été suffisamment pris en compte. Il appelle le gouvernement britannique à collaborer avec Maurice pour établir un programme de réinstallation dans les îles, y compris pour les Chagossiens résidant actuellement au Royaume-Uni. Il souligne également que l’accord aurait pu faire davantage pour favoriser l’emploi des Chagossiens sur la base de Diego Garcia.

Le rapport demande des clarifications sur la manière dont les Chagossiens seront consultés dans la gestion du fonds fiduciaire capitalisé par le gouvernement britannique pour leur bénéfice. Il pose la question de savoir si les Chagossiens basés au Royaume-Uni pourront en bénéficier. De plus, il exige des précisions sur les mécanismes de supervision et de responsabilité pour garantir « la transparence et l’allocation équitable et efficace » de la subvention de développement versée à Maurice pour financer des projets de développement économique et de bien-être.

L’accord, bien que critiqué pour ses lacunes, est présenté comme une réponse pragmatique face à la pression internationale croissante, notamment après l’avis de la Cour Internationale de Justice. Le rapport avertit que sans ratification, le Royaume-Uni s’expose à un « risque accru » d’une décision défavorable d’une cour internationale, ce qui pourrait compromettre l’avenir de la base militaire de Diego Garcia, un atout stratégique clé pour Londres et Washington.

Qu’est-ce que l’International Agreements Committee ?

L’International Agreements Committee est un comité de la Chambre des Lords, chargé d’examiner les traités déposés devant le Parlement britannique conformément à la Constitutional Reform and Governance Act 2010. Il évalue les négociations, la conclusion et la mise en œuvre des accords internationaux. Présidé par Lord Goldsmith, il compte parmi ses membres Lord Anderson of Swansea, Lord Howell of Guildford et Baroness Verma, qui scrutent les implications diplomatiques et juridiques des engagements internationaux du Royaume-Uni.

Maurice possède des « droits souverains résiduels sur Diego Garcia »

Le rapport cite l’article 1 de l’accord, qui stipule que Maurice « est souveraine sur l’ensemble de l’archipel des Chagos, y compris Diego Garcia ». 

L’article 2, souligne le document, précise que Maurice autorise le Royaume-Uni à exercer « tous les droits et autorités nécessaires pour l’opération à long terme, sécurisée et effective de la base » sur Diego Garcia, conjointement avec les États-Unis. Le rapport note que « Maurice conserve certains droits souverains résiduels sur Diego Garcia qui ne sont pas requis pour l’opération de la base », comme l’émission de pièces, l’enregistrement des naissances ou la gestion des ressources naturelles, mais uniquement avec l’accord du Royaume-Uni via une commission conjointe. 

La position du rapport sur les Chagossiens ?

Le rapport exprime des regrets clairs : « Nous regrettons que les membres de la communauté chagossienne estiment que leurs intérêts n’ont pas été suffisamment pris en compte dans la négociation de cet accord. » Il reconnaît une « perception regrettable, qui a une certaine base dans la réalité, que les intérêts des Chagossiens ont été, pendant de nombreuses années, subordonnés aux intérêts de sécurité nationale du Royaume-Uni et de ses alliés ». Le comité déplore que « l’accord ne fournit pas une voie claire pour la réinstallation des Chagossiens dans l’archipel des Chagos ». Il appelle le gouvernement britannique à « collaborer avec Maurice pour établir un programme de réinstallation des îles, y compris pour les membres de la communauté chagossienne actuellement basés au Royaume-Uni ». Concernant le fonds fiduciaire de 40 millions de livres sterling (Rs 2,5 milliards selon le taux de change du jour), le rapport demande « des clarifications sur la manière dont les Chagossiens seront consultés dans l’administration du fonds fiduciaire » et si ceux basés au Royaume-Uni en bénéficieront.

Aspects financiers de cet accord

Le rapport détaille les engagements financiers dans l’article 11 : « Le Royaume-Uni accepte de payer à Maurice : (a) une somme annuelle de 165 millions de livres sterling (Rs 10,2 milliards) pour les trois premières années pour l’utilisation de la base de Diego Garcia, diminuant à 120 millions (Rs 7,4 milliards) par an par la suite, ajustée pour l’inflation après la 14e année ; (b) une somme de 40 millions de livres (Rs 2,5 milliards) pour capitaliser un fonds fiduciaire destiné aux Chagossiens ; (c) une subvention annuelle de 45 millions de livres (Rs 2,8 milliards) pendant vingt-cinq ans pour soutenir des projets de développement et de bien-être de Maurice et de son peuple. » Le coût total est estimé à « 3,4 milliards de livres (Rs 210,5 milliards) durant la période initiale de 99 ans » selon une méthodologie de valeur nette actualisée. 

Le rapport indique que l’archipel des Chagos abrite une zone marine protégée (MPA) de 640 000 km², décrite par le Dr Bryan Wilson comme « le récif le plus important au monde » (« the most important reef wilderness on the planet »). L’article 5 de l’accord stipule que « le Royaume-Uni soutiendra et assistera Maurice dans l’établissement et la gestion d’une MPA dans l’archipel des Chagos ». Cependant, le comité s’inquiète des capacités limitées de Maurice. « Maurice dispose de seulement deux navires océaniques et deux petits avions, qui n’ont pas la portée nécessaire pour atteindre l’archipel des Chagos depuis Maurice. » Le rapport recommande qu’« une partie de la subvention annuelle de 45 millions de livres soit utilisée pour des projets de protection environnementale ». 

  • Nou Lacaz

 

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