Plusieurs réseaux de falsification de cartes de vaccination ont vu le jour, ces trois ou quatre dernières semaines. Certains sont en train de commercialiser ces documents de l’État au noir pour un montant qui oscille entre Rs 4 000 et Rs 5 000. Selon des sources policières, ces faussaires sont « très sélectifs » lors de l’octroi des cartes de vaccination. Le Dr Zouberr Joomaye, qui préside le National Covid Vaccination Committee, déclare que le gouvernement va bientôt numériser les cartes de vaccination et qu’une enquête policière est en cours.
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Des cartes de vaccination frappées du sceau du gouvernement, mais avec des signatures et des dates falsifiées, sont écoulées au noir à travers le pays depuis près d’un mois. Deux zones sont ciblées : Port-Louis et les hautes Plaines-Wilhems. Ces réseaux, avec plusieurs membres, fait-on comprendre, « ne proposent pas leurs services à n’importe qui ». « Ils sont très sélectifs en ce qu’il s’agit de leurs ‘clients’ », fait comprendre un habitant des basses Plaines-Wilhems à Le Dimanche/L’Hebdo. Ce dernier, réticent à se faire vacciner, affirme « avoir entendu dire que des individus faisaient des fausses cartes de vaccination contre paiement ». Il a ainsi contacté un membre d’un des réseaux. « Ils m’ont tout de suite fait comprendre que je ne pourrais en avoir, même si j’avais l’argent nécessaire et que j’étais aussi disposé à payer plus », précise-t-il.
L’état-major du National Security Service (NSS) confirme l’existence de ce trafic de cartes de vaccination depuis l’annonce des nouveaux règlements sanitaires interdisant au personnel enseignant et médical non-vacciné d’avoir accès aux hôpitaux et aux écoles. Des faussaires ont voulu se faire de l’argent facile en capitalisant sur ces mesures. Ils ont aussi été motivés par le nombre de Mauriciens qui sont réticents à se faire vacciner, dont certains n’hésitent pas à avoir recours à ce trafic, afin d’obtenir cette fameuse carte.
Quel est le montant réclamé pour une carte de vaccination ? On apprend qu’il faut débourser Rs 4 000 pour un document démontrant une première dose de vaccin et Rs 5 000 pour les deux doses. « Nous pensons qu’environ 500 cartes ou plus, déjà tamponnées, sont en circulation dans le pays », estiment les hauts gradés. Des cartes vierges, selon eux, seraient également en circulation au coût approximatif de Rs 500.
Le Dr Farhad Aumeer : « J’ai soulevé ce dossier dans l’intérêt du peuple »
C’est le Dr Farhad Aumeer, député travailliste de la circonscription no 2 (Port-Louis Sud/Port-Louis Central), qui a fait état de ce trafic lors de son intervention durant les débats budgétaires à l’Assemblée nationale, mardi. Sollicité samedi matin, il dit avoir « soulevé ce dossier dans l’intérêt du peuple ». Des sources basées au ministère de la Santé et du Bien-être avancent, sous le couvert de l’anonymat, que des mesures strictes ont été prises par les autorités, il y a quelques jours, afin d’éviter tout trafic des cartes vaccinales. ( Voir texte plus bas)
Le trajet remis en question
Mais comment ces documents officiels de l’État, frappés du tampon du ministère de la Santé et du Bien-être, tombent-ils entre les mains de ces faussaires ? Quand est-ce que des « officiers véreux » entrent-ils en jeu ? Quid du contrôle ? Un haut cadre du ministère de la Santé et du Bien-être explique qu’une fois les cartes de vaccination imprimées, elles sont livrées au siège du ministère. Un inventaire est ensuite effectué. Un Coordinator du ministère a alors pour tâche d’assurer l’acheminement des cartes vers les divers centres à travers le pays, où elles sont stockées. La sécurité lors du trajet entre le ministère et le centre de vaccination, tout comme l’exercice de redistribution, est remise en question.
Il semble, selon d’autres sources, que les officiers (du public et du privé) travaillant dans les centres de vaccination peuvent facilement avoir accès à ces cartes. Le Dimanche/L’Hebdo a approché un policier travaillant dans un de ces centres à Bambous, vendredi. Celui-ci souligne que la majorité des employés des centres de vaccination ont accès aux cartes. « Nous avons été mis au courant de ce trafic. C’est dommage, et surtout très grave », dit l’intervenant, « que certains déboursent de l’argent pour obtenir une carte de vaccination. Ils mettent leur santé en péril et sont en train de commettre un délit hautement condamnable par la loi. »
Julie Granckx-Lepert, initiatrice de la pétition ‘My body, my choice, my voice’ : « C’est ridicule »
Julie Granckx-Lepert, l’initiatrice de la pétition ‘My body, my choice, my voice’, qui regroupe les Mauriciens qui ne désirent pas se faire vacciner, déplore le trafic de ces cartes de vaccination. « Je ne suis ni pour ni contre cette pratique. Mais il est dommage qu’on se fasse de l’argent sur une chose aussi grave. C’est ridicule », estime-t-elle. En même temps, Julie Granckx-Lepert juge « tout à fait normal » que certains veulent donner l’occasion aux Mauriciens qui refusent le vaccin « de faire valoir leurs droits en tant que citoyens ».
Riposte des autorités : Les cartes vaccinales seront bientôt numérisées
Dans une déclaration accordée à Le Dimanche/ L’Hebdo, le Dr Zouberr Joomaye, président du National Covid Vaccination Committee, fait ressortir que la police a déjà ouvert une enquête afin de faire la lumière sur cette affaire et qu’aucun cas n’a été identifié pour le moment. « Certaines personnes se sont tournées vers nous pour dénoncer des vols de cartes de vaccination. La police en a été informée et une enquête est en cours. Le ministère de la Santé et du Bien-être a également initié une enquête interne », dit-il. « Tout le système est en train d’être informatisé. Les cartes vaccinales seront numérisées et possèderont un QR Code, entre autres. Toute falsification sera impossible. Le document en papier ne servira à rien », annonce le Dr Zouberr Joomaye.
Le président du Comité national de vaccination n’a toutefois pas donné de précisions quant à la mise en opération des cartes vaccinales numériques. « L’informatisation est en cours. Un comité, chapeauté par le ministre des Tic, Deepak Balgobin, travaille sur le projet », poursuit-il.
Un message à ceux qui ont recours à ces cartes de vaccination falsifiées ? « Ils sont en train de se mentir à eux-mêmes. Ils s’arrogent le droit de s’exposer dans des endroits interdits. Ce n’est pas bien », dira le Dr Joomaye.
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