Un vaste réseau de trafic de drogue impliquant des gardiens, certains hauts placés, opère dans le milieu carcéral. Le trafic aurait cours en soirée et aux petites heures du matin.
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«Vous vous êtes déjà demandé comment se fait-il que le trafic de drogue perdure à la prison malgré les multiples saisies ? », interroge un officier basé au General Duties de la Prison centrale. Ce dernier, qui opère en rotation à la prison de Melrose, ajoute : « La drogue, les téléphones cellulaires et les armes tranchantes qui sont retrouvées à la prison lors des fouilles ne sont qu’une infime partie. Quand un produit prohibé est saisi par des officiers, lors des fouilles, le nombre est réintroduit immédiatement après. » Mais comment ?
Produits prohibés
L’officier explique que tout est calculé. Le haut gradé réceptionne les colis des proches des détenus qui contiennent de la drogue, des portables et des armes tranchantes. Lors de son service du soir, il dissimule les produits prohibés dans ses effets personnels car, étant un haut gradé, il n’est pas inquiété par les officiers de la Prison Security Squad (PSS) de garde. Ce serait la fermeture de la search room des prisons, aux alentours de 19 heures, qui vient favoriser le trafic.
Selon l’officier, à partir de la fermeture de ces unités de fouilles, aucun garde-chiourme ni haut-gradé de la prison n’est soumis au rub down search. C’est d’ailleurs, « une faille » de la prison qui est déplorée par un bon nombre d’officiers de la General Duties. La search room est opérationnelle uniquement lorsque des détenus font des sorties, que ce soit a l’hôpital ou ailleurs.
« Le trafic de drogue à la prison se déroule au beau milieu de la nuit, entre 22 heures et 23 heures ou entre 2 heures et 3 heures du matin, lors des rondes qui sont obligatoirement effectuées en la présence d’un haut gradé (c’est-à-dire un Assistant Superintendant of Prisons voire le Deputy Commissionner of Prisons) et d’un garde-chiourme. Lors de la ronde nocturne qui se déroule dans toutes les cellules, le/les colis sont livrés à l’officier-passeur. Ce dernier a pour tâche de déposer le produit dans un coin des toilettes, des salles de bains, dans des tuyaux d’évacuation ou encore directement au détenu à travers des inspections holes et les barreaux des cellules… Le manque de caméras de surveillance, à la prison, ne peut permettre de déceler ce qui se déroule entre les protagonistes, soit trois représentants de la prison, explique l’officier. La distribution se ferait par des détenus classés red band (qui agissent comme plantons à la prison) au lever du jour. Ces derniers ont accès à tous les coins de la prison. »
Manque d’exercice de fouilles
Un ancien représentant de la Prisons Officers Association (POA) estime aussi que « certains hauts gradés sont de connivence avec des officiers, concernant le trafic de drogue à la prison qui a cours principalement durant la soirée ». Ces établissements sont la Prison centrale et celle de Melrose. Il va même plus loin en soulignant que la POA avait soumis une liste de recommandations, en mai 2014, au département pénitencier concernant la manière d’effectuer les fouilles.
« Les circonstances qui existent en milieu carcéral, permettent à un individu de s’enrichir du jour au lendemain mais la base d’une prison, c’est le contrôle, la supervision et la discipline. Les recommandations, figurant dans le dossier soumis en 2014, font état d’une discrimination dans les fouilles des officiers, de leurs sorties nocturnes de leurs va-et-vient lors des rondes du soir alors que les portes de la prison menant aux cellules ne devraient plus être ouvertes durant la soirée, entre autres. Comme stipulé dans les standing orders de la prison, la POA avait fait ressortir que de tels agissements favorisaient le trafic de drogue et d’autres trafics, une fois la nuit tombée, souligne le responsable de la POA. Cependant, ces recommandations n’ont jamais été appliquées. »
Sollicité au téléphone, l’ancien Commissaire des prisons déclare : « Les fouilles se faisaient d’une façon régulière et les statistiques le prouvent. Pour qu’une mesure soit efficace, il faut de la coordination. Il y a également eu l’introduction des chiens renifleurs. C’est ainsi qu’on a découvert qu’il y avait des clans qui voulaient s’évader ! »
La prison condamne
Le département pénitencier se dit « sceptique » concernant l’implication d’officiers des prisons, hauts gradés, dans le trafic de drogue. « On remercie la commission sur la drogue. D’ailleurs tous nos espoirs reposent sur la cellule de renseignements. Il n’y a pas de connexion entre haut gradés et officiers. Nous sommes plutôt d’avis que chacun fait son chemin... Mais au niveau de la prison, nous ne tolérons pas ces agissements. Le gouvernement ne peut pas rémunérer des officiers pour qu’ils s’adonnent au traficm de connivence avec des détenus », déclare l’administration de la prison.
Les astuces employées pour dissimuler de la drogue
« Les méthodes d’introduction de la drogue à la prison varient », confie Michel Buckland, le président de la Prisons Officers Association (POA). Ce dernier intervenait en deuxième partie du Grand journal, le mardi 2 mai, sur les ondes de Radio plus. Il a expliqué les divers moyens employés par les trafiquants pour dissimuler la drogue. Selon des officiers des prisons, outre la lancée de projectiles à travers les murs des prisons, des semelles de chaussures et de tongs sont également utilisés. Certains passeurs préfèrent aussi introduire les substances illicites dans leurs orifices, gorge ou estomac. « Mais la cachette souvent utilisée est le body cavity en raison du manque d’appareil pouvant détecter la présence d’une substance », fait remarquer Hanson Mungrah, le secrétaire de la POA.
De la drogue dans un tube de dentifrice
La dernière saisie de drogue remonte à jeudi matin. Les éléments du service de renseignements de la prison de Melrose ont mis la main sur un vieux tube de dentifrice et un morceau de conduit d’eau contenant tous deux de la drogue. La substance, sous forme de capsules, a été envoyée au Forensic Science Laboratory.
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