Taux de change : la roupie prise en otage

Le dollar poursuit son ascension et maintient sa suprématie auprès des autres devises. La valeur de la roupie dépendra non seulement des facteurs externes, mais aussi des interventions de la Banque de Maurice sur le marché intérieur des changes. 

Au cours du mois de juillet, le dollar américain et l’euro ont perdu respectivement 0,1 % et 2,3 % par rapport à la roupie. En revanche, la livre sterling s’est appréciée de 0,4 %. Depuis le début de l’année, le dollar a gagné 4,2 % face à notre devise locale. A contrario, l’euro s’est affaibli de près de 6 % face à la roupie, indique AON Solutions dans un document publié récemment. 

La roupie peut-elle reprendre des forces ? Paul Baker, CEO d’International Economic Consulting, répond que dans le long terme, la capacité de Maurice à attirer les capitaux étrangers et augmenter sa productivité sera déterminante. 

Autre facteur essentiel : les revenus touristiques. Ceux-ci s’élevaient à Rs 1,3 milliard entre janvier et juillet 2021. Ce montant a atteint environ Rs 21 milliards pour les cinq premiers mois de l’année 2022. Cédric Béguier, Head of Research and Portfolio Management International chez Ekada Capital, est d’avis qu’il faudrait relancer les projets afin de mieux exploiter les différentes ressources du pays et ainsi augmenter le nombre de devises entrant à Maurice. 

Banque centrale

La Banque de Maurice (BoM), qui essaie de stabiliser la roupie, est intervenue à hauteur de 55 millions de dollars en juillet dernier sur le marché des changes. Sa première intervention pour le mois d’août se chiffre à 10 millions de dollar au taux de Rs 44,50. 

Or Randhir Mannick, Chief Investment Officer à l’African Alliance Group of Companies, explique que la dépréciation de la roupie risque de repartir après les interventions de la BoM. « La Banque centrale ne pourra intervenir éternellement », fait-il comprendre. D’autant que le bilan de la BoM et le niveau des réserves sont des éléments à prendre en compte. Cédric Béguier d’ajouter que le dollar a frappé les Rs 46 à plusieurs reprises et que la politique d’intervention de la Banque centrale n’est pas viable sur le long terme. 

Facteurs externes

La Réserve fédérale des États-Unis a revu le taux directeur à la hausse par 225 points de base. À Maurice, l’augmentation cumulée a été de l’ordre 40 points de base – le taux repo est à 2,25 %. Randhir Mannick soutient que cela peut également expliquer la dépréciation de la roupie mauricienne face au dollar. Cela a influencé la demande pour le dollar qui devrait, à en croire Paul Baker, continuer de s’apprécier. Ainsi, la monnaie américaine est appelée à garder sa position de valeur refuge en cette période d’incertitude et de risque de récession.  

Par ailleurs, le Fonds monétaire international (FMI) a, dans un article en date du 10 août, souligné que le cycle de la politique monétaire est désormais de plus en plus synchronisé dans le monde. « Fait important, le rythme du resserrement s’accélère dans plusieurs pays, en particulier dans les économies avancées, tant en termes de fréquence que d’ampleur des hausses de taux. Certaines Banques centrales ont commencé à réduire la taille de leurs bilans, s’orientant davantage vers la normalisation de leur politique », est-il mentionné. Pour Paul Baker, il est clair que la dépréciation de la roupie sera dans le court terme influencée par ce qui se passe du côté de la Banque centrale européenne ou encore la Banque d’Angleterre.

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