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Takesh Luckho, économiste et chercheur : «Tôt ou tard, il y aura un réajustement de la TVA»

Takesh Luckho

Il n’est pas contre des mesures en faveur les plus vulérables à travers une compensation salariale, mais cela aura un poids énorme sur les caisses de l’État et sur celles des Petites et moyennes entreprises (PME). Il n’y a pas mille et une solutions, selon l’économiste et chercheur Takesh Luckho, pour subvenir à ces dépenses : le gouvernement n’aura d’autre choix que de réajuster le taux de la TVA.

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Année après année, rebelote ! Les tripartites reviennent sur le tapis et finalement, c’est le gouvernement qui décide du quantum. N’est-il pas temps de trouver une formule plus « up to date » ?
La raison pour avoir des consultations tripartites est de réunir les partenaires sociaux - soit les représentants des syndicats et du patronat - afin d’avoir un consensus sur le montant de la compensation salariale. Le gros souci avec ce système est que les partenaires sociaux ne sont souvent pas d’accord sur le quantum à être payé, créant de la frustration d’une part et d’autre. Un nouveau système doit toujours inclure des consultations avec tous les partenaires sociaux pour écouter leurs doléances et pour qu’ils soient parties prenantes dans toute décision prise. Le nouveau système pourrait être calqué sur celui du Pay Research Bureau (PRB), où le quantum de compensation est connu pour les 3-4 prochaines années, basé sur différents scénarios de taxe, d’inflation et de groupes de salaires.

Une compensation salariale trop élevée entraînera des pressions additionnelles sur certains secteurs»

Selon la formule consacrée, statistiquement, si le taux d’inflation tourne autour de 0,5 %, le gouvernement n’est pas tenu à payer une compensation salariale. Question : est-ce que le contenu de la corbeille de la ménagère est calculée selon les besoins du 21e siècle ou contient-elle encore des produits dits ‘périmés’ ou ‘dépassés’ ?
On doit être mesurés, quand on parle des besoins du 21e siècle. La notion des besoins n’est pas la même quand on compare une maison dite à revenus moyens et une autre à revenus élevés. La corbeille ménagère utilisée pour calculer la taxe d’inflation dans le pays est basée sur les produits dits de « nécessité » tels que l’eau, l’électricité et l’essence. Si une personne est désireuse de consommer davantage de produits dits de marque, qui ne sont  pas abordables pour le Mauricien lambda, elle ne doit pas s’attendre à être compensée pour cela.

Les syndicalistes se battent pour une compensation entre Rs 700 et Rs 1 200, hormis le salaire minimal. Est-ce soutenable et raisonnable économiquement ?
Ce serait une bonne chose pour les travailleurs d’avoir une compensation entre Rs 700  et Rs 1 200 comme préconisée par les syndicalistes. Mais il est très important de souligner que, pour toute mesure économique, il y a un coût et cela aura des conséquences importantes pour nos opérateurs économiques. L’économie est déjà au ralenti, avec des pressions externes sur nos secteurs-clé. Une compensation salariale trop élevée entraînera des pressions additionnelles sur ces secteurs.

En sus du salaire minimal et d’autres facteurs comme les nouveaux « Remuneration Orders » en faveur des employés, ne pousse-t-on pas le patronat à bout ?
Les problèmes auxquels fait face le patronat, par rapport au ralentissement des activités dans les secteurs-clé du pays, ne peuvent pas être mis que sur le dos des mesures sociales en faveur des employés. Les budgets précédents ont fait la part belle au patronat, avec des réductions de la Corporate Tax, et maintenant, il va falloir que les patrons innovent dans leur style de management, en cherchant des nouveaux marchés et en proposant des produits innovants et compétitifs pour pouvoir relancer l’activité économique dans le pays.

Toute mesure de soutien aux PME est la bienvenue, comme un Stimulus Package, déguisée ou pas»

Dans tous ces calculs, on oublie les PME qui, pour la plupart, souffriraient de toute hausse salariale. Le GM aura-t-il le devoir de leur venir en aide à travers un Stimulus Package, même déguisé ?
Oui, les PME à Maurice ont beaucoup de difficultés à joindre les deux bouts : trouver les commandes qui généreront des revenus et payer les cotisations sociales de leurs employés. En règle avec la vision 2030 du gouvernement, les PME sont appelées à devenir un des fers de lance de notre nouvelle économie. Donc, toute mesure de soutien aux PME est la bienvenue, soit en termes d’Income Support ou d’un Stimulus Package, déguisée ou pas..

D’un côté, on taxe les syndicalistes de vautours, de l’autre le patronat de radins. Où trouver le juste milieu ?
Dans des consultations tripartites, c’est le rôle du gouvernement de trouver le juste milieu, prenant en compte les doléances et recommandations des syndicalistes et du patronat. Cette décision est souvent très difficile à prendre et sera sujette a de nombreuses critiques, compte tenu des résultats des récentes élections dans le pays. On espère juste que les décisions prises vont satisfaire tous les partenaires sociaux concernés.

Le gouvernement a fait de belles promesses électorales. Est-ce qu’elles sont soutenables, même à long terme, sachant que le marasme économique touche la planète Terre ?
Comme mentionné un peu plus tôt, toute mesure économique ou politique a un coût. La mise en œuvre des promesses électorales apportera une pression additionnelle sur les caisses de l’État. Vu qu’on a pris l’engagement de ramener la dette à des proportions plus justes par  rapport au Produit intérieur brut (PIB), tôt ou tard, il y aura un réajustement de la taxe sur la valeur ajoutée (TVA) ou une révision à la hausse des prélèvements sur les salaires pour pouvoir soutenir toutes ces promesses.

 

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