
Le ministre de la Santé a attribué la situation catastrophique du service public de santé à des dettes énormes. Il a néanmoins présenté un programme de réforme visant l’excellence régionale.
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La restructuration des services d’urgence optimisera l’utilisation des trente médecins urgentistes. Dirigés par des spécialistes qualifiés, ils assureront un triage plus rapide et des soins standardisés pour les traumatismes, les AVC et les arrêts cardiaques. Ce qui améliorera le taux de survie.
D’autre part, la lutte contre le cancer se réorganise autour de la prévention. Une campagne d’envergure nationale sensibilisera la population aux modes de vie sains et à la détection précoce. Les mammographies systématiques pour les patientes à haut risque de cancer du sein s’inscrivent dans cette démarche préventive. Cependant, pour y parvenir, le ministère est confronté à divers problèmes qu’il devra résoudre.
Lors de son intervention à l’Assemblée nationale, le 19 juin, le ministre Bachoo a indiqué que la situation est bien pire qu’anticipée. La Santé a des dettes énormes et il y a des risques de rupture de service de certains prestataires en raison du non-paiement des créances.
Les ardoises laissées par l’ancien gouvernement, selon le ministre Bachoo, ont pour conséquence que les prestataires de services peinent à obtenir leurs dus. Et les heures supplémentaires du personnel de la santé accusent plusieurs mois de retard, engendrant de nombreuses frustrations. Parmi ceux qui n’ont pas obtenu leurs heures supplémentaires figurent notamment les médecins et les spécialistes qui assurent les services 24/7.
Projet de réforme
Malgré cette situation critique, le ministre Bachoo a affirmé que tout espoir n’est pas perdu. Le projet de réforme proposé par son ministère dépasse la simple réparation d’un système défaillant et incarne une vision transformatrice du système de santé mauricien, visant l’excellence, l’équité et la durabilité.
Le ministre a néanmoins reconnu que la route sera longue et semée d’obstacles, mais la détermination affichée, les moyens accordés et la rigueur de la planification augurent d’une renaissance du système. « Les citoyens mauriciens méritent des soins de qualité, et ce programme ambitieux constitue un engagement solennel en ce sens. »
Actions concrètes
Face à cette situation catastrophique, les syndicats du service de santé insistent sur la nécessité d’agir pour recouvrer l’argent perdu et pour sanctionner les coupables. Dr Meetheelesh Abeeluck, président de la Government Medical and Dental Officers Association (GMDOA), considère qu’il est trop facile de dénoncer une situation sans que des sanctions soient prises à l’encontre des fautifs.
« Il est possible de faire de la ‘money trail’ afin d’établir où l’argent est allé », explique-t-il. Il préconise des enquêtes approfondies avec le soutien du State Law Office. « On ne peut pas dire que l’argent a été volé ou a disparu. Il y a, semble-t-il, eu des malversations et il faudrait qu’il y ait des sanctions », insiste le Dr M. Abeeluck.
Rétention du personnel
Un défi majeur consiste à restaurer la confiance du personnel du service public de santé pour les retenir. Ils sont nombreux à se tourner vers le secteur privé ou à partir à l’étranger. Le président de la GMDOA souligne qu’il est indécent de demander aux médecins et aux spécialistes de travailler davantage et de délaisser leur famille sans être rémunérés pour leurs efforts et leurs sacrifices. « Certains refusent de travailler davantage et attendent d’être rémunérés avant de vouloir faire d’autres heures supplémentaires », affirme-t-il.
Pénurie de personnel
Outre le manque de financement, le service public de santé fait face à une pénurie aiguë de personnel. Le constat est que l’ancienne administration s’est contentée de construire des bâtiments sans recruter suffisamment de personnel pour y travailler. Il manque des médecins, des spécialistes, des ambulanciers, des infirmiers, des health care attendants et des Records Officers.
Le Dr M. Abeeluck remet en question le concept du service 24/7 pour les spécialistes (gynécologues, pédiatres et anesthésistes), imposé depuis quelques années. Si le ministère n’a pas suffisamment d’argent pour payer ces heures supplémentaires, il faut selon lui mettre un frein à ce système. Il indique que contrairement aux objectifs visés, « le ministère dépense beaucoup plus avec le système de shifts des médecins généralistes que sous l’ancien système ».
Médecins versus gestionnaires
Un débat oppose les syndicats sur la question de savoir qui doit diriger les services de santé. Le Dr M. Abeeluck considère que les médecins assumant la responsabilité de Regional Health Director (RHD) connaissent mieux le système et sont plus aptes à diriger les services. Il estime qu’un gestionnaire peut épauler le RHD mais ne peut s’y substituer, car il ne maîtrise pas les implications médicales et ne peut prendre de décisions cliniques.
À l’opposé, le Dr Mansoor Takun, ancien consultant en pédiatrie dans le service public de santé, considère que d’excellents médecins ne sont pas nécessairement de bons gestionnaires, ce qui contribue à l’effondrement du système. Il explique qu’au niveau des hôpitaux, les trois responsables (surintendant, directeur et nursing administrator) n’ont aucune formation poussée en administration. De même, les directeurs de santé au ministère, bien que doués dans leur discipline médicale, ne sont pas suffisamment qualifiés pour gérer des budgets de plusieurs millions de roupies, selon lui.
Le Dr M. Takun préconise donc le recrutement de gestionnaires qualifiés, non-médecins, qui seraient épaulés par des équipes médicales pour les conseils cliniques.
Perspectives
Selon nos informations, le ministère compte régler rapidement toutes les dettes laissées par l’ancien gouvernement pour repartir sur de nouvelles bases. L’objectif n’est pas uniquement d’avoir des bâtiments, mais aussi toutes les infrastructures et le personnel nécessaire. Le ministre plaide pour un plan d’action global visant une « transformation complète » du système, passant d’un état de « quasi-faillite » à un système moderne et efficace.
« Ces réformes reflètent une vision holistique : de meilleurs résultats en matière de santé, une productivité économique accrue et une résilience face aux chocs futurs. La santé n’est pas un luxe – c’est notre formulation de la prospérité nationale », a expliqué le ministre Anil Bachoo lors des débats sur le Budget 2025/26.

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