Le Directeur des poursuites publiques préconise une codification des procédures liées à la ‘strip search’, telles qu’elles existent dans la Police and Criminal Evidence Act en Angleterre pour mieux préserver les droits des citoyens.
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Me Satyajit Boolell, Senior Counsel et Directeur des poursuites publiques (DPP), prévient d’emblée qu’un changement de mentalité s’impose au sein de la force policière.
La strip search, qui consiste à fouiller un individu après que ce dernier s’est dévêtu, a soulevé la polémique après qu’une photo d’un détenu nu et enchainé a été postée sur Facebook. Le DPP y consacre un article dans la Newsletter publiée par son bureau pour le mois de janvier 2018.
« L’arrestation, la fouille et la détention d’une personne peuvent se faire sur la base d’une suspicion raisonnable. C’est un seuil dangereusement bas et qui pourrait ouvrir la voie à des abus ne laissant pratiquement aucun moyen à nos cours d’exercer un contrôle sur les droits d’un citoyen durant le déroulement d’une enquête policière », déplore Me Satyajit Boolell.
Raisonnables, proportionnelles et nécessaires
Ce dernier rappelle cependant que la Constitution de Maurice autorise de telles pratiques tant qu’elles soient raisonnables, proportionnelles et nécessaires dans une société démocratique. Mais le DPP note qu’il n’existe aucune règle statutaire régissant ces pratiques à Maurice, contrairement à d’autres juridictions.
Me Satyajit Boolell estime que la Police and Criminal Evidence Act (PACE) pourrait résoudre le problème en codifiant les mesures que doit prendre la police lorsqu’il y a une ingérence dans les droits fondamentaux du citoyen.
« Mais PACE n’est pas une baguette magique », met en garde le DPP. Ce dernier souligne que cette loi pourrait déboucher sur la fin des charges provisoires.
La Newsletter du bureau du DPP contient aussi un article sur une conférence-débat organisée par une délégation de l’Union européenne sur la violence à l’égard des femmes. Selon les intervenants, ce fléau a une incidence sur l’émancipation économique des femmes.
Protection des prévenus et des victimes
La Police and Criminal Evidence Act pourrait déboucher sur une meilleure protection des droits des citoyens faisant l’objet d’une enquête policière. Mais l’avocat Erickson Mooneeapillay et l’inspecteur Jaylall Bhoojawon, président de la Police Officers’ Solidarity Union, sont tous deux unanimes à dire que, d’une part, il est temps de moderniser la police et, d’autre part, que les droits des victimes ne doivent pas être occultés.
Pour Me Erickson Mooneapillay, membre de la Human Rights Association, l’introduction de la PACE constituerait une avancée considérable sur la délimitation des pouvoirs de la police et le respect des droits humains.
Mais il estime qu’il faut avant tout mettre fin à la culture d’impunité qui règne actuellement. « Sinon, cela ne sert à rien d’avoir la PACE ou une quelconque autre loi. Il faut que les autorités prennent des sanctions là où il le faut ».
Selon l’avocat, les normes qui existent dans la société conduisent à plus de violence. Me Erickson Mooneeapillay précise que la police ne doit pas préjuger les gens et accepter que seule la cour est habilitée à juger et sanctionner une personne.
Quant aux victimes, l’avocat est d’avis qu’ils méritent autant, voire plus, d’attention que les prévenus. C’est pourquoi il souhaite voir un changement dans la loi afin que les victimes puissent se constituer partie civile dans une affaire au pénal.
De son côté l’inspecteur Jaylall Boojhawon reconnaît que c’est à la cour de décider si le dossier à charge est bien ficelé ou non. Mais il déplore le manque de dynamisme et d’évolution au sein de la force policière, surtout dans la façon de mener des enquêtes.
« Depuis 50 ans on évolue trop lentement. Nos équipements ne sont pas adéquats. Il faut se rendre à l’évidence que plus on met du temps, plus notre tâche d’appréhender le suspect devient difficile », souligne cet ancien enquêteur de la Criminal Investigation Division et Police Prosecutor.
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